«Voir l’Église et le Vatican s’investir sur les Jeux olympiques et sur le sport, c’est une formidable initiative», s’enthousiasme le journaliste Jacques Vendroux. «Ici au Vatican, on est dans la maison de Dieu, et c’est merveilleux. Les religions ont des choses à apporter au monde du sport. Il faut apaiser le monde.» À 74 ans, dont 56 ans de carrière comme journaliste sportif à l’ORTF puis à Radio-France et désormais à Europe 1, Jacques Vendroux, qui se dit «fier d’être catholique», se réjouit de voir l’Église s’investir dans l’accompagnement d’un monde sportif fragilisé par les scandales à répétition.
«Moi qui ai connu des moments merveilleux avec les Français champions du monde en 1998 et 2018, je suis bouleversé par ce qui se passe, s’attriste-t-il. Jamais je n’aurais imaginé qu’une footballeuse puisse faire casser la gueule à une coéquipière pour prendre sa place dans une équipe de foot, ou qu’un champion du monde se retrouve mêlé à des affaires de viols multiples. Avec toutes ces affaires de corruption, de chantage… Je tombe de très haut», reconnaît-il.
Dans ce contexte de crise morale, l’Église a «un rôle important à jouer», insiste Jacques Vendroux, marqué dans son enfance par la foi et la passion pour le sport de son grand-oncle par alliance, le général de Gaulle.
La marathonienne kényane Tegla Logroupe, victorieuse notamment du marathon de New York en 1994, explique que »dans le sport, nous avons besoin de beaucoup de règles, et nous avons besoin de la religion pour faire vivre la fraternité, pour se pardonner les uns les autres», y compris dans des contextes de forte pression individuelle.
«Quand vous prenez un faux départ lors d’une course, vous êtes immédiatement disqualifié, vos efforts sont réduits à néant. Vous n’êtes plus personne. Mais la religion nous invite à vivre les uns avec les autres, les uns pour les autres», explique la marathonienne, qui a été chef de mission de l’équipe des réfugiés aux JO de Rio en 2016 et de Tokyo en 2021. «Le monde d’aujourd’hui est rempli de personnes déplacées et réfugiées. En les encourageant, nous les aidons à retrouver l’estime d’elles-mêmes», explique-t-elle.
Le cardinal Tarcisio Bertone, Secrétaire d’État du Saint-Siège de 2006 à 2013, s’est rendu au congrès en tant que simple passionné de sport. «Le sport a des racines très anciennes dans l’Église», confie-t-il à I.MEDIA. «Saint Paul était lui-même un grand expert du sport, il connaissait très bien les olympiades, les techniques du sport… Il est par exemple intéressant de voir comment il décrit la lutte, un sport important des Jeux olympiques», remarque-t-il.
Issu de la congrégation des salésiens, à l’origine de nombreuses écoles, le cardinal Bertone précise que «l’Église a toujours perçu l’importance du sport, notamment dans l’éducation des jeunes. Le sport contient des valeurs qui peuvent former la personne dans la dimension physique, dans le soin du corps, mais aussi dans le soin de l’esprit, de la psychologie, avec les vertus sociales de la compétition : le respect des autres, l’aide réciproque, notamment pour les plus faibles et les personnes avec un handicap».
L’ancien secrétaire d’État, qui a notamment fondé la Clericus Cup, un tournoi de football entre les séminaires de Rome, vient de publier un livre en italien intitulé Credere nello sport (Croire dans le sport). Il a recueilli à cette occasion de nombreux témoignages de champions sur le lien entre la foi et le sport.
«Nous avons vu que dans l’histoire des papes, depuis les interventions de Pie XII jusqu’à l’amour du pape François pour l’équipe sportive du Vatican et l’impulsion qu’il a donnée pour la faire grandir, il y a une forte alliance entre l’Église et le sport. C’est une conjonction très positive qui aide la société à progresser», insiste le cardinal de 87 ans, qui, fait inhabituel pour un ecclésiastique, commentait des matchs de football à la radio lorsqu’il était archevêque de Gênes. Il confie aussi son enthousiasme pour le modèle d’intégration offert par les joueurs de l’équipe de France lors de leurs victoires aux Coupes du monde de 1998 et 2018.
Isabelle de Chatellus, directrice du projet «Église catholique de France et Jeux olympiques», est venue au Vatican pour enrichir sa réflexion sur la façon dont l’Église pourra «habiter ce temps festif» des JO de Paris à l’été 2024. Elle a identifié quatre «axes de travail» à partir de la volonté du pape François, qui souhaitait, dans un message édité en 2018, que «le sport soit un instrument au service de la rencontre, la formation, la sanctification et la mission».
L’organisation d’une messe d’ouverture des JO est notamment à l’étude. Isabelle de Chatellus se réjouit de l’écoute bienveillante des membres du Comité d’organisation des Jeux olympiques, qui ont eux-mêmes suggéré d’organiser cette messe une semaine avant l’ouverture officielle des compétitions, afin de «marquer l’entrée en vigueur de la trêve olympique. Dans un contexte de guerre, cela aurait beaucoup de sens», souligne-t-elle. Elle précise que cette messe pourrait se tenir à la basilique de Saint-Denis, près du village olympique et du Stade de France, «ce qui serait un signe important pour la fraternité».
Parmi les autres projets liés au Jeux olympiques figure la mise en place d’une paroisse dédiée aux sportifs, à Paris. L’église de La Madeleine, lieu de rassemblement des fans de Johnny Hallyday depuis les obsèques très médiatisées du chanteur en 2017, pourrait aussi devenir l’église des athlètes dès septembre 2023, au moment de l’ouverture de la Coupe du monde de rugby.
Relativement discrète lors de la Coupe du monde 1998, l’Église de France compte désormais faire de ces évènements internationaux des leviers de créativité pastorale, afin de soutenir les sportifs ainsi que les spectateurs venus du monde entier en quête de moments de ferveur et de communion. (cath.ch/imedia/cv/mp)
I.MEDIA
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