Environ 5’000 membres de la Cofindustria, confédération générale de l’industrie italienne, ont été reçus dans la Salle Paul VI au Vatican par le pontife. Au début de son discours, celui-ci a annoncé souhaiter s’adresser, à travers ses hôtes, «au monde des entrepreneurs», qu’il a décrit comme «une composante essentielle de la construction du bien commun» et «un moteur primordial du développement et de la prospérité».
Le pape a souligné combien l’économie ne vivait actuellement «pas un moment facile» du fait de la pandémie et de la crise énergétique qui découle de la guerre en Ukraine. Dans ces crises, le bon entrepreneur «souffre aussi», a-t-il reconnu.
Le pape a aussi rappelé combien «la vie des entrepreneurs dans l’Église n’a pas toujours été facile». Il a cité les «mots durs» prononcés par le Christ contre les marchands du temple ou la métaphore du chameau et du chas de l’aiguille (Mt, 19,23-24), qui insiste sur la difficulté pour un riche d’entrer au paradis. Malgré cela, «on peut être commerçant, entrepreneur, et être un disciple du Christ», a insisté le pontife.
Il a énuméré quelques «conditions» pour être un bon patron, la plus importante étant «le partage». Le partage, a-t-il insisté, est «un autre nom pour la pauvreté évangélique». Il a expliqué que «la richesse appelle la responsabilité» et qu’un patron doit donc la faire fructifier et agir de sorte qu’elle serve «le bien commun».
Le partage peut être de la philanthropie, a poursuivi le pontife, parce que cela consiste à «rendre à la communauté». Mais il a aussi défendu l’existence dans toute société d’un «pacte fiscal» de redistribution des richesses par l’impôt et les taxes. Ceux-ci ne sont pas «une usurpation», a-t-il insisté. Il a rappelé qu’ils permettent de créer des «biens communs» comme les écoles ou les hôpitaux.
Le partage passe aussi par la création d’emplois, a insisté le pontife, «en particulier pour les jeunes». «Les entreprises, sans les jeunes, perdent l’innovation, l’énergie, l’enthousiasme», a-t-il insisté. Il a demandé aux patrons de prendre des mesures pour aider les jeunes italiens, dont 23% étaient au chômage au 1er janvier 2022, à trouver du travail.
Il a aussi appelé les patrons italiens à faire un effort «patriotique» pour favoriser un modèle social qui combatte la «dénatalité». L’Italie a un des taux de natalité les plus bas du monde avec seulement 1,2 enfant par femme, un «hiver démographique» qui, selon le pontife, empêche le pays de se développer.
Sur ce point, l’évêque de Rome a vivement critiqué le fait que pour les femmes employées, «dès que tu commences à voir s’arrondir le ventre, on te met dehors». Il a demandé aux patrons de trouver une solution pour qu’une femme enceinte et une jeune mère puisse continuer à travailler.
Le pontife a aussi mis en garde contre le risque qui pesait aujourd’hui sur l’emploi du fait de certaines technologies qui permettent de créer des richesses «sans plus créer de travail». Il a aussi encouragé les entreprises à travailler avec les territoires où elles sont installées, rappelant que c’est d’eux que l’entreprise «tire son énergie».
Le pape a souligné le rôle clé que jouent les entreprises vis-à-vis de l’immigration en «favorisant une intégration constructive» tout en condamnant l’exploitation dont souffrent de nombreux migrants. «Si le migrant est rejeté ou simplement utilisé comme un travailleur sans droits, c’est une grande injustice et cela nuit également au pays», a-t-il insisté.
Créer du travail «génère une certaine égalité» dans les entreprises mais aussi dans la société, a affirmé le pontife. Mais pour cela «les salaires ne doivent pas être trop différents», a-t-il poursuivi, déplorant que la «part de la valeur qui revient au travail» soit aujourd’hui «trop faible» en comparaison des «rentes financières» et des «salaires des hauts dirigeants».
«Lorsque les salaires et les traitements sont trop différents, le sentiment d’appartenance à un destin commun» en souffre, a mis en garde le pape François. Il a invité à prendre soin du «capital spirituel» des travailleurs en gardant en tête que la valeur créée par un entrepreneur «dépend de chacun».
«Les gens savent reconnaître les bons entrepreneurs», a expliqué le pontife, les comparant au «bon Samaritain» des évangiles. Il a opposé à ces derniers les «entrepreneurs mercenaires» qui vivent de «l’argent de Judas». L’économie se développe et devient humaine «lorsque les deniers des Samaritains deviennent plus nombreux que ceux de Judas», a-t-il affirmé. Tout au long de son discours, il a été très applaudi par les industriels italiens. (cath.ch/imedia/cd/rz)
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