Le pape promulgue la nouvelle constitution de l’Ordre de Malte

Par un décret publié le 3 septembre 2022, le pape François promulgue et fait entrer en vigueur la nouvelle Charte constitutionnelle et le nouveau Code Melitense de l’Ordre souverain de Malte afin de «compléter le processus de renouvellement entamé, dans la fidélité au charisme originel».

Le pontife nomme aussi un nouveau Souverain Conseil provisoire et convoque un Chapitre général extraordinaire qui se tiendra le 25 janvier 2023 afin d’élire un nouveau Grand Maître et un nouveau Souverain Conseil et ainsi entériner la réforme de l’Ordre, lancée par le pape en 2017.

Dans cette perspective, François a intégralement changé la direction de l’Ordre: il a donc prononcé la dissolution du Souverain Conseil en place et l’a remplacé par 13 nouveaux membres provisoires. Parmi ceux-ci, le pape a nommé un nouveau Grand Commandant, un nouveau Grand Chancelier, un nouveau Grand Hospitalier et un nouveau Receveur du Trésor Commun. Seul reste en poste le Lieutenant du Grand Maître, Fra’ John T. Dunlap, que le pontife avait nommé le 13 juin dernier après le décès soudain du précédent Lieutenant.

Le Souverain Conseil comprend maintenant 14 membres. La constitution de 1961 en prévoyait seulement onze, ce qui est un signe probant de l’entrée en vigueur immédiate de la réforme, explique une source interne à l’Ordre contactée par I.Média.

Changement de mode de gouvernance

«De nombreuses étapes ont été franchies, mais tout autant d’obstacles et de difficultés ont été rencontrés en cours de route», affirme le pontife dans le décret. Initiée après une grave crise interne – qui avait vu le Grand Maître de l’époque, Fra’ Matthew Festing remettre sa démission en janvier 2017 –, la réforme menée par le cardinal Silvano Maria Tomasi en tant que délégué spécial du pontife vise à faire évoluer la gouvernance de l’Ordre.  

Plus particulièrement, elle a pour but de réformer les statuts des membres de «première classe et de deuxième classe», respectivement les membres profès (religieux) et les membres en obédience (laïcs), qui sont à la «tête» de l’Ordre. Le 9 juin 2021, le cardinal Tomasi avait annoncé la suppression dans la nouvelle constitution des «conditions de noblesse pour être élu» à des postes de responsabilité dans l’Ordre.

Il avait par ailleurs assuré que les «chevaliers profès», membres religieux laïcs qui dirigent l’institution, devraient à l’avenir faire vœu de pauvreté et seraient intégralement dévoués à leur mission au sein de l’Ordre de Malte. Concernant ces derniers, la réforme prévoit une «profonde rénovation spirituelle» pour mieux encadrer leur charisme, explique pour sa part le pontife dans son décret.

Souveraineté: l’Ordre «dépend» du Saint-Siège

La question de la souveraineté de l’Ordre a été au cœur des discussions entre le Saint-Siège et la direction de l’Ordre, certaines voix craignant qu’elle soit remise en cause par la réforme. Dans son décret, le pontife estime que le statut d’«ordre religieux» de l’Ordre de Malte fait qu’il «dépend, dans ses diverses articulations, du Saint-Siège», insistant sur la «protection spéciale» du Siège apostolique dont il bénéficie historiquement. Sans la remettre en question ouvertement, il insiste aussi sur la nature «fonctionnelle» de la souveraineté de l’Ordre. 

Sur ce point, une source interne à l’Ordre affirme à I.Média que la spécificité de l’Ordre «demande de trouver un équilibre entre son statut religieux et souverain qui est toujours délicat». Elle insiste sur la nature vitale de la souveraineté, laissant entendre que de celle-ci «dépendent des accords avec de nombreux pays qui encadrent son action humanitaire».

Elle salue la relative rapidité de la réforme – la précédente constitution (1961) avait été approuvée au bout de 11 ans. Elle constate une forme de «brutalité» dans l’annonce des nominations, qu’elle considère comme un des effets collatéraux de la volonté du pontife de mener à bien la réforme dans les plus brefs délais après «plusieurs années très difficiles».

Pas de publication de la Charte et du Code

Pour l’heure, la nouvelle Charte constitutionnelle de l’Ordre souverain militaire hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, de Rhodes et de Malte – son nom officiel – et le Code Melitense (qui rassemble les lois fondamentales de l’Ordre) n’ont pas été publiés. Un membre de l’Ordre a assuré à I.Média qu’ils n’avaient pas encore été transmis en interne. Aucune date officielle de publication n’a été communiquée.

Le Lieutenant de l’Ordre de Malte Fra’ John T. Dunlap a réagi à la publication du décret dans un communiqué, remerciant le pape et le cardinal Tomasi pour leur action «qui promet d’assurer l’avenir de l’Ordre à la fois comme Institut religieux et comme entité souveraine». La nomination d’un gouvernement provisoire par le pontife apporte «du sang neuf» et une «pensée nouvelle» à la tête de l’Ordre, estime-t-il, y voyant la «première étape d’un plan clair pour un gouvernance plus efficace et plus rationalisée de l’Ordre». (cath.ch/imedia/cd/bh)

Un ordre présent dans 120 pays
L’histoire de l’Ordre de Malte commence en Terre Sainte, en 1048, avec la fondation de la communauté religieuse des Hospitaliers de Saint-Jean. Ordre religieux et laïc de l’Église catholique depuis 1113 et sujet de droit international, il entretient des relations diplomatiques avec plus de cents États, ainsi qu’avec l’Union européenne et jouit d’un statut d’observateur permanent aux Nations unies.
Présent dans 120 pays, l’Ordre vient en aide aux personnes dans le besoin à travers des activités médicales, sociales et humanitaires. Sur son site, l’Ordre explique qu’il se compose de plus de 13’500 Chevaliers, Dames et Aumôniers. Quelque 80’000 bénévoles permanents travaillent à leurs côtés, ainsi que 42’000 employés, du personnel médical en majorité. Dans son décret, le pape François salue la «généreuse contribution» des membres et volontaires de l’Ordre dans le monde entier. I.M 

I.MEDIA

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