Le déplacement du pape François dans cette ville d’environ 70’000 habitants, capitale des Abruzzes, la région de l’Italie située au bord de la mer Adriatique, s’inscrit en effet dans le cadre du «Pardon célestinien». Cette célébration jubilaire est organisée chaque année à l’Aquila à la fin du mois d’août, depuis une bulle promulguée par le pape Célestin V en 1294, Inter Sanctorum Solemnia, aussi appelée la «Bulle du Pardon».
En proposant l’organisation d’un temps dédié au pardon des péchés à l’occasion de sa messe de couronnement, ce pape originaire de cette région des Abruzzes avait ouvert la voie à l’organisation du premier Jubilé organisé en l’an 1300 à Rome. Cette tradition s’est pérennisée depuis cette époque, la prochaine Année Sainte étant programmée pour 2025. Ce rite d’ouverture de la Porte Sainte rappelle aussi le Jubilé de la Miséricorde, une Année sainte extraordinaire que le pape François avait convoquée en 2015-2016.
Pour les habitants de L’Aquila, cette ouverture de la Porte Sainte par le pape en personne «constitue la réalisation d’un rêve vieux de 700 ans», a expliqué au Messaggero l’historien Angelo De Nicola. Ce spécialiste de Célestin V précise qu’il s’agit aussi d’une revanche après le pontificat de Boniface VIII, son successeur, qui tenta par tous les moyens de détruire la Bulle du pardon. Il échoua «grâce à la résistance courageuse des habitants de L’Aquila», qui font vivre cette tradition annuelle depuis 728 ans. Au fil de la période récente, 39 cardinaux ont célébré l’ouverture de la Porte Sainte pour ce Jubilé annuel, mais François sera le premier pape à venir depuis 1294.
La ville de L’Aquila avait été visitée par son prédécesseur, Benoît XVI, le 28 avril 2009, en signe de compassion pour les personnes affectées par le tremblement de terre du 6 avril précédent, qui avait fait près de 300 morts et 65’000 sans-abri. Le pape allemand avait aussi rendu hommage au pape Célestin V en déposant le pallium de sa messe d’installation sur la châsse du pape ermite. Ce geste de Benoît XVI a été interprété, a posteriori, comme un signe de sa renonciation ultérieure, le 11 février 2013.
De nombreuses rumeurs accompagnent ce déplacement du pape François qui s’inscrit dans un agenda déjà surchargé, au lendemain du consistoire durant lequel il créera 20 nouveaux cardinaux parmi lesquels 16 électeurs en cas de conclave, et à la veille d’une réunion des cardinaux du monde entier au sujet de la nouvelle Constitution apostolique sur la Curie romaine. Alimentant lui-même les rumeurs, le pape a dit à plusieurs reprises que son éventuelle renonciation n’est pas un tabou.
«Je crois qu’à mon âge, et avec ces limites, je dois m’économiser un peu pour pouvoir servir l’Église, ou au contraire penser à la possibilité de me mettre de côté», avait reconnu le pape lors de sa conférence de presse au retour du Canada, en juillet dernier.
Alors que la question d’une éventuelle renonciation est revenue plusieurs fois, le pape a convenu que la porte était «ouverte», mais qu’il n’avait pas encore pensé le faire. Devant les journalistes de l’avion papal, il a confié s’en remettre à Dieu pour sa décision: «Si le Seigneur te dit continue, tu continues. Si le Seigneur te dit de te mettre à l’écart, tu te mets à l’écart. (…) Le Seigneur peut me dire de renoncer, c’est le Seigneur qui commande».
Dans un entretien à l’agence Reuters, au début du mois de juillet, le pape avait assuré ne pas avoir d’échéance en tête. «Nous ne le savons pas. Dieu le dira», avait lancé l’évêque de Rome.
Parmi les journalistes mais aussi parmi les cardinaux eux-mêmes, les interrogations sur une éventuelle renonciation papale se poursuivent, certains s’attendant à une annonce imminente, d’autres pensant qu’une renonciation à court terme serait improbable compte tenu des projets du pape François pour l’année è venir, notamment ses possibles voyages au Liban, en Ukraine ou encore au Soudan du Sud, ainsi que la poursuite du Synode sur la synodalité.
Après l’annulation pour raison de santé de sa visite prévue à Florence le 27 février dernier, ce déplacement à L’Aquila constitue la première visite pastorale en Italie du pape François en cette année 2022. Deux autres déplacements en Italie sont pour le moment au programme du pontife: à Assise le 24 septembre pour le Congrès «The Economy of Francesco«, et à Matera le lendemain pour la clôture du Congrès eucharistique italien. (cath.ch/imedia/cv/bh)
Un programme condensé
L’hélicoptère du pape décollera à 8h de l’héliport du Vatican, et atterrira à 8h25 au stade du Gran Sasso de l’Aquila. Une voiture le conduira ensuite sur la Piazza Duomo, devant la cathédrale, où il sera accueilli par les autorités civiles et religieuses, notamment le cardinal Giuseppe Petrocchi, archevêque de la ville, qu’il a élevé à la pourpre en 2018, offrant alors son premier cardinal à cette ville d’environ 70’000 habitants.
Le pontife effectuera alors une brève visite privée dans la cathédrale encore endommagée par le séisme de 2009, avant de saluer à 9h15, les proches des victimes et les fidèles rassemblés sur le parvis. Il se déplacera ensuite en voiture vers la basilique de Santa Maria in Collemaggio, et célèbrera la messe en extérieur à 10h, sur la place attenante, d’où il prononcera ensuite la prière de l’Angélus avant de procéder au rite d’ouverture de la Porte Sainte. I.M
I.MEDIA
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