Le pape François a atterri à l’aéroport d’Iqaluit, dans le Nunavut, aux alentours de 15h40 heure locale (21h40 heure de Rome), ce 29 juillet 2022, pour la dernière étape de son voyage au Canada. Pendant les trois heures qu’il passera sur le territoire de l’Arctique, concluant son pèlerinage pénitentiel envers les autochtones, il doit rencontrer les Inuits, qui l’avaient convié à venir lors de leur visite au Vatican en mars dernier.
Après un spectacle présentant différentes traditions inuites, le pape a salué le «courage» des témoignages d’anciens élèves des écoles résidentielles qu’il venait d’entendre avant ce rassemblement dédié aux personnes âgées et aux jeunes. «Cela a réveillé en moi l’indignation et la honte que j’éprouve depuis des mois», a-t-il déclaré.
Sur le sol de l’Inuit Nunangat, devant l’école primaire Nakasuk, le chef de l’Église catholique a alors renouvelé ses excuses, formulées déjà lors des premières étapes de son périple, dans l’Alberta et au Québec: «Aujourd’hui encore, ici même, je voudrais vous dire que je suis très attristé et que je désire demander pardon pour le mal commis par un certain nombre de catholiques qui, dans ces écoles, ont contribué aux politiques d’assimilation culturelle et de déracinement.»
Le pontife a dénoncé un «scandale», où «les familles ont été désagrégées, les enfants emportés, loin de leur milieu». Mais il a aussi rendu hommage à la résilience du peuple Inuit, qui a su «aimer», «respecter» et «valoriser» les espaces du grand Nord considérés comme «hostiles» par certains. Dans ces régions du globe souvent plongées dans l’obscurité, leur a-t-il dit, « vous êtes le témoignage constant de la vie qui ne s’éteint pas, d’une lumière qui resplendit et que personne n’a réussi à étouffer».
Au fil d’une longue exhortation, le pape s’est adressé «à toi, jeune Inuit, avenir de cette terre et présent de son histoire». «Ce que tu as hérité de tes pères, reconquiers-le si tu veux vraiment le posséder», a-t-il lancé avec les mots du poète Goethe, encourageant la jeunesse à se «passionner» et «prendre position face aux événements et aux personnes».
Il a spécialement demandé aux jeunes générations de ne pas vivre « uniquement pour [leurs] loisirs et [leurs] intérêts», ni «passer leurs journées isolés, tenus en otage par un téléphone ». «Tu n’es pas fait pour vivoter, pour passer tes journées à équilibrer les devoirs et les plaisirs », a insisté le pape, invitant à lutter contre la « force de gravité spirituelle qui pousse pour nous entraîner vers le bas».
«Tu es la réponse. […] Parce que l’avenir est entre tes mains. Dans tes mains se trouve la communauté qui t’a engendré, l’environnement dans lequel tu vis, l’espérance de tes pairs», a lancé le successeur de Pierre. Et d’inviter aussi à «renaître chaque jour», à «apporter au quotidien une lumière nouvelle au monde, celle de tes yeux, de ton sourire, du bien que toi seul peux offrir».
Le pape François a affirmé à chaque jeune que Dieu « ne cesse jamais de te faire confiance, pas même un instant». «Il croit à tes talents », a-t-il assuré, en encourageant: «Bats-toi, implique-toi à fond et tu ne le regretteras pas.»
Cette rencontre s’est tenue en présence de plusieurs centaines de personnes, parmi lesquelles de nombreux Inuits mais aussi des migrants venus travailler en Arctique. Certains participants portaient des pancartes appelant à l’abrogation de la «doctrine de la découverte».
Interrogé par I.MEDIA, Mgr Anthony Krótki, évêque de Churchill – Baie d’Hudson, s’avoue surpris qu’il y ait «autant de monde ici», la ville d’Iqaluit ne comptant qu’environ 7’500 habitants. Très ému par la visite du pape, il confie que «c’est une grande opportunité de l’avoir ici à Iqaluit, dans cette communauté, en Arctique, au Nord».
«Nous voulons que la réconciliation avance», confie l’évêque d’origine polonaise, missionnaire des Oblats de Marie Immaculée. «C’est aussi une grande opportunité pour croire en nous-mêmes », confie-t-il. «Peut-être que nos cœurs sont prêts et préparés pour quelque chose qu’il va nous donner, une énergie pour avancer dans la vie. Il ne faut pas espérer que des miracles arrivent immédiatement. Mais on ne sait jamais… la vie de quelqu’un peut changer», assure-t-il avec espoir.
Steven, un Inuit de confession anglicane, explique être venu pour «voir le pape». Cet homme d’une cinquantaine d’années, qui compte plusieurs membres de sa famille ayant étudié dans des pensionnats autochtones, confie être très ému en pensant à l’un de ses cousins qui s’est battu pour faire reconnaître la souffrance des autochtones. «Cela aurait été beau pour lui d’entendre lui-même le pape présenter des excuses, après une vie de souffrance due aux écoles résidentielles», confie-t-il. (cath.ch/imedia/ak/bh)
I.MEDIA
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