Ashfaq Masih, mécanicien de profession, est en prison depuis juin 2017 après qu’une plainte a été déposée contre lui, en vertu de la section 295 «c» du Code pénal pakistanais, qui punit l’outrage au prophète Mahomet. Un tribunal de Lahore, dans la province du Penjab, l’a condamné à la pendaison.
Ashfaq Masih, marié et père d’une fille de huit ans, affirme qu’il n’a ni diffamé ni prononcé de paroles désobligeantes à l’encontre du prophète Mahomet. «Je suis innocent, et l’accusation portée contre moi est fausse et sans fondement. J’ai été piégé. Il y a un autre magasin avec la même activité, dirigé par Muhammad Naveed. Je me suis disputé avec lui le 5 juin 2017 car La plupart des clients se rendent quotidiennement dans mon magasin pour des réparations», a-t-il affirmé à la cour.
Dans sa déclaration, Ashfaq Masih évoque la jalousie de son concurrent et un complot organisé par ce dernier. «Le 15 juin, un client du nom de Muhammad Irfan est venu dans mon magasin et a refusé de payer 40 roupies pakistanaises (environ 20 centimes), le coût de la main-d’œuvre pour une réparation. Il a prétendu qu’il était un croyant soufi et qu’il n’avait donc pas à payer», raconte-t-il.
«En réponse, j’ai dit que je croyais en Jésus-Christ, poursuit l’accusé, et j’ai demandé le paiement des réparations. Au lieu de cela, Muhammad Irfan et Muhammad Naveed ont transformé l’affaire en une question religieuse et m’ont accusé de blasphème». Ashfaq Masih ajoute qu’il a été menacé par les deux hommes qui voulaient le voir quitter l’atelier.
Joseph Jansen, président de l’ONG «Voice for Justice», qui suit l’affaire, a déclaré à l’Agence Fides: «La condamnation à mort d’Ashfaq Masih suscite la déception et la peur de toute la communauté chrétienne du Pakistan, et en particulier de tous les autres prisonniers accusés de blasphème et de leurs familles».
«De nombreux cas de blasphème sont basés sur de fausses accusations pour régler des différends personnels, précise Joseph Jansen. Il est triste de voir que de telles accusations, foulant aux pieds l’État de droit, conduisent à des violences collectives contre les accusés, qui ne peuvent se défendre».
«Les chrétiens du Pakistan sont profondément blessés par la condamnation à mort d’Ashfaq Masih, accusé à tort», indique Jospeh Jansen. «Il est clair que toutes les preuves dans cette affaire sont fabriquées et qu’Ashfaq Masih n’y est piégé que pour avoir réclamé des frais de service pour la réparation de la moto d’un musulman».
«Voice for Justice», qui prépare un recours devant la Haute Cour, demande que justice soit rendue à Ashfaq Masih et qu’il soit immédiatement libéré. Elle exhorte le tribunal à punir ceux qui incitent à la violence ou la commettent sur la base de fausses accusations de blasphème.
Ashiknaz Khokhar, un militant des droits des minorités au Pendjab explique qu’«il est inquiétant de voir les tribunaux de première instance prononcer des condamnations à mort pour les personnes accusées de blasphème, même sans preuves suffisantes».
Des groupes extrémistes exercent des menaces et des pressions sur les tribunaux, mais il est clair que la plupart des affaires de blasphème reposent sur de fausses accusations, liées à des différends personnels. (cath.ch/fides/bh)
2’000 cas de blasphème en près de 30 ans
Selon les données du «Center for Social Justice«, entre 1987 et 2021, il y a eu 1’949 cas de personnes accusées de blasphème au Pakistan, dont 928 musulmans, 643 ahmadis (branche de l’islam qui se fonde sur la croyance que Mohammed n’est pas le dernier prophète), 281 chrétiens, 42 hindous et 55 de confession inconnue. Parmi elles, 84 personnes ont été tuées de manière extrajudiciaire, avant qu’un verdict final ne soit rendu. AF
Bernard Hallet
Portail catholique suisse
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