Une politique «immorale», qui fait «honte à la Grande-Bretagne». C’est ainsi que le primat de l’Eglise d’Angleterre, Justin Welby, a qualifié le «projet Rwanda» du Premier ministre Boris Johnson, selon le journal Mirror. Le gouvernement britannique entend en effet envoyer certaines personnes entrées illégalement au Royaume-Uni dans ce pays d’Afrique de l’Est pour y demander l’asile. Le plan de Boris Johnson est présenté comme une tentative de perturber le modèle économique des organisations criminelles qui s’efforcent de faire entrer illégalement les migrants sur le territoire.
Plus de 28’000 migrants sont entrés au Royaume-Uni en traversant la Manche l’année dernière, contre 8’500 en 2020. Des dizaines sont morts, dont 27 personnes en novembre lorsqu’un seul bateau a chaviré.
La mesure est cependant perçue par beaucoup comme une façon de se défausser du problème de la migration. L’envoi vers le Rwanda, un pays dont le respect des droits humains est réputé peu fiable, pose pour les observateurs, de graves problèmes éthiques.
Des demandeurs d’asile présents en Grande-Bretagne se sont dits assurés que s’ils étaient envoyés au Rwanda, les services secrets de leur pays d’origine pourraient très facilement les retrouver et les tuer. Le plan a déjà été vivement critiqué par des associations d’aide aux migrants et des personnalités publiques. Selon des journaux britanniques, le Prince Charles lui-même aurait qualifié en privé cette politique «d’épouvantable».
Le «projet Rwanda» indigne en tout cas les autorités chrétiennes. En avril 2022, la Conférence des évêques catholiques d’Angleterre et du Pays de Galles a rappelé que «nous avons affaire à des individus créés à l’image de Dieu qui ont enduré de grandes difficultés dans leur propre pays et au cours de leur voyage».
L’évêque Paul McAleenan, responsable des migrants et des réfugiés pour la Conférence épiscopale, a craint que l’action du gouvernement «n’aggrave les difficultés de ceux qui arrivent sur nos côtes en espérant un nouveau départ. Les actions des habitants de ce pays montrent qu’ils souhaitent relever ceux qui sont dans le besoin, les décisions du gouvernement devraient faire de même». Le prélat anglais a estimé que les pays riches devraient plutôt s’attaquer aux problèmes qui poussent les gens à fuir leur foyer.
Justin Welby a publié le 14 juin dans la presse une lettre allant dans le même sens. Il a considéré que «notre héritage chrétien devrait nous inciter à traiter les demandeurs d’asile avec compassion, équité et justice, comme nous le faisons depuis des siècles.» Les autres principaux évêques anglicans du pays ont signé le texte. (cath.ch/ag/rz)
Raphaël Zbinden
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