Sophie Delhalle, journal Dimanche
Je me suis convertie à l’âge de quinze ans et le premier livre religieux que j’ai eu en main, c’était Histoire d’une âme de Thérèse. C’est pour dire comme c’est une longue histoire entre elle et moi». Et depuis, les deux «amies» ne se sont plus quittées.
Après des études de philosophie, Hélène Mongin est engagée comme libraire à Notre-Dame des Victoires, sanctuaire thérésien à Paris, avant d’officier, pendant sept ans, comme libraire au Carmel de Lisieux où se pressent chaque année 700’000 pèlerins. Depuis 25 ans, Hélène continue de lire et d’étudier celle qui lui a permis de découvrir le visage du Christ. «C’est à travers elle que j’ai découvert le visage de Jésus, c’est d’ailleurs le mot qu’elle utilise le plus dans ses écrits, Jésus.»
Après avoir travaillé au service communication, Hélène devient éditrice pour les éditions de l’Emmanuel. Un travail qu’elle adore. «Je dis souvent que nous sommes des sage-femmes. Nous accompagnons les auteurs pour qu’ils donnent le meilleur d’eux-mêmes. Mon rôle d’éditrice est aussi de me mettre à la place des lecteurs». Et leur offrir des merveilles!
En 2021, Hélène se lance un défi de taille: rééditer les œuvres de Thérèse de Lisieux. Pourquoi? «Il existait des œuvres complètes, en un ou huit volumes, publiées au Cerf. Ces dernières ont même reçu en 1997 le prix de l’Académie française. Malheureusement, elles ne sont plus disponibles chez l’éditeur. Quand j’étais libraire à Lisieux, cela me fendait le cœur de voir que ces trésors – soit épuisés soit très chers – étaient devenus peu accessibles, avec souvent des appareils critiques très scientifiques.»
Donc, à son arrivée aux éditions de l’Emmanuel, Hélène s’emploie à proposer rapidement une première collection poche dédiée à la petite sainte. Abordable, par son texte comme par son prix, elle rencontre un beau succès. «Cette première expérience m’a prouvé que les gens ont soif de lire Thérèse». Dans cette nouvelle édition en quatre volumes, Hélène a voulu donner au lecteur de précieuses clés de lecture, introductions et notes, mais aussi des photos, le tout dans une version moderne et dynamique pour briser l’image «vieillotte» de la sainte. «Je veux redonner l’accès et l’envie», insiste Hélène.
Des œuvres presque complètes puisqu’il manque les pièces de théâtre. «Je le ferai dès que je peux», promet l’éditrice. Cette édition renouvelée a aussi nécessité un travail de discernement en équipe, notamment avec le graphiste et le maquettiste. «Nous avons voulu un texte aéré, lisible, classique et moderne à la fois», détaille Hélène qui a pu également compter sur l’aide précieuse des archives du Carmel de Lisieux.
Au terme de cette «très belle aventure», Hélène reste marquée par l’investissement de chaque membre de l’équipe pour faire (re)vivre Thérèse. «Entre nous, nous disions: Alors comment va Thérèse? Où en est notre Thérèse? Ne t’inquiète pas, on prend soin de Thérèse. Je l’ai beaucoup priée, et c’est un projet que nous avons vécu avec elle.»
Malgré un déjà long compagnonnage, Hélène a redécouvert certains aspects de la personnalité de la petite sainte: son humanité, sa tendresse, son humour. Notamment dans le volume consacré à ses dernières paroles. Un travail d’édition qui a permis de confronter représentations fantasmées et réalités. Pour ceux qui croient d’ailleurs bien connaître Thérèse, nous conseillons vivement cette plongée dans ses écrits. «C’est un modèle féminin catholique fort, et ça fait du bien», clame Hélène.
Lire Thérèse, c’est aussi rencontrer une personnalité audacieuse, d’une intelligence et d’une profondeur stupéfiantes, souligne encore l’éditrice chevronnée. «Dans ses écrits, elle nous partage sa relation personnelle avec le Christ, avec beaucoup de pédagogie, de manière innovante pour l’époque. On n’a pas l’impression de lire un texte mais de rencontrer quelqu’un, et ce quelqu’un, de surcroît, nous conduit vers le Christ». Thérèse, pour Hélène, est ainsi devenue «une très bonne amie».
Sur les quatre ouvrages de cette nouvelle collection, Hélène suggère d’entamer la lecture avec Histoire d’une âme, là où tout a commencé pour Thérèse. Dans ce récit autobiographique, la carmélite raconte l’action de Dieu dans sa vie, et c’est précisément ce qui en fait un récit universel. L’histoire de Thérèse ne peut se résumer à «la vie d’une jeune religieuse du XIXe morte à l’âge de 24 ans et qui n’est jamais sortie de chez elle. Cela n’aurait pas d’intérêt», affirme Hélène. Le lecteur pressé pourra directement se rendre au manuscrit B où Thérèse décrit sa spiritualité. «C’est du feu!», s’enthousiasme notre éditrice. Le manuscrit C évoque la charité, l’amour avec les proches. Ceux qui s’attendent à y trouver de grands discours théologiques seront déçus. En effet, pour lire Thérèse, il faut se faire petit comme elle, à l’image du petit oiseau, cette parabole thérésienne est probablement «l’une des plus grandes réflexions sur la prière», conclut Hélène Mongin. (cath.ch/dimanche/mp)
Thérèse de Lisieux: Histoire d’une âme, Editions de l’Emmanuel, 2022, 314 p.
Thérèse de Lisieux: Poésies et Prières, Editions de l’Emmanuel, 2022, 220 p.
Thérèse de Lisieux: Lettres, Editions de l’Emmanuel, 2022, 378 p.
Thérèse de Lisieux: Dernières Paroles, Editions de l’Emmanuel, 2022, 322 p.
Rédaction
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