Le pape a une nouvelle fois déjoué les pronostics en créant un nouveau cardinal pour les États-Unis en la personne de Mgr Robert Walter McElroy, évêque de San Diego, en Californie. Né en 1954 à San Francisco et ordonné prêtre en 1980 pour le diocèse de San Francisco, il a été formé par les jésuites, notamment à Berkeley et à la Grégorienne à Rome. Après différentes missions en paroisse et au sein de la curie diocésaine, il a été promu évêque auxiliaire de San Francisco en 2010 puis évêque de San Diego en 2015. Ce titulaire d’un doctorat en sciences politiques est, contrairement à une partie de ses confrères évêques, opposé au principe d’interdiction d’accès de la communion aux responsables politiques favorables à la légalisation de l’IVG. Il est aussi connu pour s’être opposé frontalement à Donald Trump, dont il avait qualifié le projet de murs anti-migrants à la frontière mexicaine de «grotesque et inefficace».
Cette création comme cardinal peut être considérée comme une façon de contrebalancer l’influence des deux poids lourds de l’épiscopat californien, qui incarnent une ligne conservatrice fortement relayée dans les médias: l’archevêque de San Francisco, Mgr Salvatore Cordileone, et surtout l’archevêque de Los Angeles, Mgr José Gomez. Ce dernier, membre de l’Opus Dei, exerce la présidence de la Conférence épiscopale et il aurait pu s’attendre à devenir cardinal, si la logique institutionnelle prévalait.
Cette création cardinalice est à mettre en relation avec les avertissements du pape, lors de sa visite de 2015 aux États-Unis, contre le repli des catholiques dans une «guerre culturelle» contre le reste de la société. Cette tendance a été alimentée notamment par certaines nominations épiscopales intervenues sous le mandat de l’ancien nonce apostolique aux États-Unis, Carlo Maria Vigano, qui, après avoir quitté sa charge, est entré en dissidence par rapport au pontificat actuel.
Mgr Adalberto Martínez Flores, quelques mois seulement après sa nomination comme archevêque d’Asunción le 17 février 2022, deviendra le premier cardinal de l’histoire du Paraguay. Le pays, enclavé entre le Brésil, l’Argentine, la Bolivie, avait reçu la visite du pape François en 2015. Né dans la capitale paraguayenne en 1951, il a étudié l’économie dans les années 1970 à Washington, puis a été ordonné prêtre en 1985 pour le diocèse de saint Thomas, dans les Iles Vierges américaines, sous la conduite d’un évêque qui sera appelé ultérieurement à de hautes responsabilités: le futur cardinal O’Malley, actuel archevêque de Boston.
En 1994, l’alors Père Adalberto Martínez Flores revient dans son diocèse natal, Asunción, où Jean Paul II le nomme évêque auxiliaire en 1997. Sa longue expérience épiscopale au Paraguay l’amènera à diriger plusieurs diocèses successifs. Il devient le premier évêque de San Lorenzo en l’an 2000, puis est transféré en 2007 à San Pedro. Il succède dans ce diocèse rural à Fernando Lugo, évêque laïcisé qui deviendra président de la République un an plus tard. En 2018, il devient évêque de Villarrica del Espíritu Santo, une charge qu’il cumule avec la conduite du diocèse aux armées et la présidence de la conférence épiscopale. Après son transfert récent dans le diocèse d’Asunción, sa création comme cardinal apparaît donc comme un nouveau signe d’attention aux périphéries de la part du pape venu d’Argentine, pays dont les relations avec le Paraguay furent souvent tendues.
Mgr Leonardo Ulrich Steiner sera le premier cardinal à diriger l’archidiocèse de Manaus, dans l’État d’Amazonas, au nord-ouest du Brésil. Expert en philosophie et figure importante de la région amazonienne, cet homme de 71 ans est né le 6 novembre 1950 à Forquilhinha, dans l’État méridional de Santa Caterina. Il est entré dans l’ordre des Frères mineurs en 1972 et a été ordonné prêtre en 1978. En 1995, il a déménagé à Rome pour étudier la philosophie et la théologie à l’Université pontificale de Saint-Antoine, dont il est devenu le secrétaire général de 1999 à 2003. De retour au Brésil peu après, il a continué à enseigner la philosophie jusqu’en 2005, date à laquelle il est nommé évêque de la prélature de Sao Felix do Araguaia, dans le nord-est du Brésil.
En 2011, Mgr Steiner devient évêque auxiliaire de Brasilia et secrétaire général de la Conférence des évêques du Brésil (CNBB). Il occupe cette fonction jusqu’en 2019, après avoir été réélu pour un second mandat en 2015. En 2020, il devient archevêque de Manaus, la ville la plus peuplée de la région amazonienne, qui constitue un point de connexion important avec la forêt. En avril 2022, il est par ailleurs nommé président de la Commission épiscopale spéciale pour l’Amazonie, succédant au cardinal Claudio Hummes. Son intégration dans le Sacré-Collège s’inscrit donc en continuité avec le Synode sur l’Amazonie organisé en 2019 au Vatican, afin d’assurer à cette région complexe une visibilité dans les débats ecclésiaux à venir.
Suivant les traces de son prédécesseur, Mgr Paulo Cezar Costa dirigera également, en tant que cardinal, l’archidiocèse de Brasilia, capitale du Brésil, située dans le centre-ouest du pays. Né le 20 juillet 1967 à Valença, dans le nord-est du Brésil, cet homme de 54 ans sera le deuxième plus jeune membre du Collège des cardinaux, après le missionnaire italien en Mongolie Giorgio Marengo, 47 ans, également nommé aujourd’hui. Ordonné en 1992 dans son diocèse d’origine, Mgr Costa a étudié la philosophie et la théologie, obtenant sa licence et son doctorat à l’Université pontificale grégorienne de Rome en 2001. De 2007 à 2010, il a dirigé le département de théologie de l’Université catholique pontificale de Rio de Janeiro et, de 2006 à 2010, il a été le directeur de l’Institut de philosophie et de théologie Paulo VI à Nova Iguaçu.
Ordonné évêque auxiliaire de Rio de Janeiro en 2010, il a notamment été impliqué dans l’accueil de millions de pèlerins dans la ville brésilienne en 2013 lors des premières JMJ du pape François. Il est ensuite devenu évêque de São Carlos en 2016, succédant alors à un évêque démis de sa charge pour conduite en état d’ébriété. Il devient enfin archevêque de la capitale fédérale, Brasilia, en 2020, après le transfert du cardinal Sergio da Rocha à Salvador de Bahia.
Avec ces deux créations, le Brésil compte désormais six cardinaux électeurs, un signal important envoyé par le pape François pour soutenir une conférence épiscopale confrontée à une société polarisée, marquée par les conséquences dramatiques de la pandémie de Covid-19 et la présidence controversée de Jair Bolsonaro. (cath.ch/imedia/cv/rz)
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