Burkina Faso: création d’un ministère des Affaires religieuses

Alors que le pays fait face à une vague de violence extrémiste religieuse depuis 2015, le Burkina Faso s’est doté, le 6 mars 2022, pour la première fois de son histoire, d’un ministre des Affaires religieuses et coutumières.

Après avoir renversé par un coup d’Etat le président civil Roch Marc Christian Kaboré, le 24 janvier dernier, le Lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, nouveau président du pays, a formé son  gouvernement, marqué par la création de ce  ministère des Affaires religieuses et coutumières, qu’il a confié à Issaka Sourwèma, jusqu’ici président de l’Association pour la tolérance religieuse et le dialogue interreligieux (ATR/DI). Mise sur pied en octobre dernier à Ouagadougou, la capitale, cette association s’inscrit dans le cadre du projet: «Liberté religieuse et conviction en action». Son but: promouvoir le vivre-ensemble

Un tabou tombe

Pour le site burkinabé d’information en ligne lefaso.net, la création d’un département chargé spécifiquement des religions, de tout gérés par le ministre de l’Administration territoriale (Intérieur), fait tomber un tabou. Car, le sujet ‘religion’ a toujours été considéré comme relevant des «questions très sensibles».  «Le contexte d’insécurité, son impact sur les religions et les gardiens des coutumes et traditions ont fini par imposer l’érection d’un département en bonne et due forme (…)».

Le Burkina Faso est l’un des quatre pays de l’Afrique de l’ouest à souffrir de la violence des groupes extrémistes religieux, aux côtés du Nigeria (avec Boko Haram), du Niger, et du Mali dont il est voisin. Depuis la première grande attaque d’envergure du 15 janvier 2016 à Ouagadougou, les groupes radicaux musulmans multiplient les attentats, razzias, et attaques directes contre les personnes, les mosquées et les églises.

Selon les estimations des organisations humanitaires, plus de 2’000 personnes (des civiles, religieux, agents de sécurité: militaires, gendarmes, douaniers) ont été tués dans ces violences, qui ont lieu particulièrement dans les régions nord et est, appelées la zone «des trois frontières» (Mali, Niger Burkina Faso).

1,4 millions de déplacés

Les différents mouvements islamistes qui opèrent dans ces zones sont le  Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), filiale d’Al-Qaïda, et l’organisation Etat islamique du grand Sahara (EIGS). Ces violences extrémistes ont aussi provoqué le déplacement de plus de 1,4 million de personnes qui ont fui leurs foyers, faisant de la situation au Burkina Faso l’une des crises de déplacement de population dont la croissance est la plus rapide au monde, a rapporté le Haut-commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés.

La nomination de Issaka Sourwèma intervient dans cette situation, démontrant qu’à travers la création de son ministère des Affaires religieuses et coutumières, la junte militaire au pouvoir intègre la donne religieuse dans sa politique nationale. L’érection de son département répond également aux reproches, plusieurs fois adressés aux dirigeants du pays, de reléguer au second plan les questions religieuses, alors qu’elles devraient être maîrisées pour éviter des dérives.

La création de ce ministère permettra, en outre, aux dirigeants burkinabés, de mieux affronter le phénomène de l’intégrisme religieux et ses conséquences, en s’appuyant sur les leaders religieux et coutumiers, afin maintenir la paix et la cohésion sociale nationales, pour mieux faire face aux défis du développement.

Issaka Sourwèma est le Naaba Boalga (chef traditionnel) de la commune de Saponé, au sud de Ouagadougou. Homme de médias, Il a été directeur des Editions Sidwaya (quotidien gouvernemental), et a animé des chroniques sous des pseudonymes dans des journaux du pays. Il a aussi occupé de nombreux postes de responsabilités dans des ministères, dont celui de chargé de missions au ministère du commerce, de l’industrie et de l’artisanat. (cath.ch/ibc/bh)

Ibrahima Cisse

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