L’audience a duré un peu moins de deux heures, la plus grande partie – au moins une heure et demie – étant consacrée à la lecture de l’ordonnance de quarante pages qui traitait les demandes de la défense et des parties civiles.
Dans l’ordonnance, le juge Giuseppe Pignatone a qualifié d’«injustifiées» et de «déplacées» certaines accusations véhiculées par la défense ces derniers mois. Il visait en particulier celles qui l’accusaient d’avoir organisé un «tribunal spécial» et celles remettant en cause son indépendance.
Insistant au contraire, articles à l’appui, sur le fait que les conditions étaient remplies pour assurer un «juste procès», le magistrat a fustigé la tentative de mettre en doute la probité de la procédure. La défense, a-t-il insisté, a usé d’une «interprétation inadmissible» des conventions internationales et d’une «lecture erronée» des normes du Vatican.
Les demandes déposées par la défense – notamment celles concernant l’indisponibilité d’une partie des preuves déposées au dossier – ont toutes été rejetées, provoquant la colère des avocats de la défense qui ont tous déclaré vouloir fait appel.
À l’issue de l’audience, l’avocat de Raffaele Mincione, Me Gian Domenico Caiazza, a déclaré que certaines pièces du dossier n’étaient toujours pas mises à disposition par le Bureau du Promoteur de justice. «J’espère que le Promoteur de la justice, frappé par la foudre sur le chemin de Damas, nous donnera accès à ce matériel», a-t-il affirmé.
Le tribunal a en revanche accepté que l’Administration du Patrimoine du Siège apostolique (APSA), l’Autorité de surveillance et d’information financière (ASIF) et l’Institut des Œuvres de Religion (IOR) rejoignent la Secrétairerie d’État comme partie civile.
Le procès reprendra le 17 mars prochain avec l’interrogatoire du cardinal Angelo Becciu, accusé de détournement de fonds, d’abus de pouvoir en bande organisée et de subornation de témoin.
Le cardinal Becciu, à l’issue de l’audience, s’est dit heureux d’être le premier à pouvoir s’exprimer. «Le moment de vérité est arrivé», s’est-il exclamé devant les journalistes, affirmant attendre cet instant depuis sept mois.
Le juge Pignatone a souligné qu’il commencerait par le questionner sur le «volet sarde» du procès. Il s’agit de l’accusation de financement – à hauteur de 600’000 euros par le Saint-Siège et de 225’000 par la Conférence des évêques d’Italie – d’une coopérative gérée par le frère du cardinal en Sardaigne.
Dans les deux cas, les sommes n’auraient pas été utilisées de façon appropriée, estime le Tribunal de la Cité du Vatican, et auraient par exemple servi à aider une nièce à acquérir une propriété à Rome.
Le haut prélat dément ses accusations. Il reconnaît avoir facilité certains versements quand il était substitut de la Secrétairerie d’État mais affirme avoir agi conformément au droit et à la morale.
Il l’interrogera séparément sur deux autres volets: d’une part sur son rôle dans l’acquisition de l’immeuble de Londres, et d’autre part sur ses relations avec Cecilia Marogna.
Lors de l’audience, l’avocat de cette dernière a une nouvelle fois affirmé qu’elle n’était pas en mesure de s’exprimer, étant «tenue au secret» par la Secrétairerie d’État du Saint-Siège, l’État italien, et même l’OTAN.
L’Italie ayant d’ores et déjà nié cette affirmation, le juge Pignatone a affirmé être en mesure de la vérifier concernant la Secrétairerie d’État, mais pas concernant l’OTAN. «Pour l’heure, je l’imagine occupée», a-t-il ironiquement affirmé, faisant référence implicitement au conflit ukrainien. Des audiences sont planifiées les 17, 18, 29, 30 mars, et les 5 et 6 avril prochains. (cath.ch/imedia/cd/bh)
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