Lors de l’émission, le pape s’est notamment penché sur les défis spirituels que le catholicisme affronte actuellement. Il a indiqué que l’avenir de l’Église dépendra de sa fidélité à Jésus. «Sans la chair du Christ, il n’y a pas de rédemption possible. Sans le scandale de la croix, il n’y a pas de futur pour l’Église», a martelé le pape François. Il a expliqué que «ce n’est que par la force de l’Esprit Saint et de la miséricorde de Dieu que l’Église peut avancer».
Le pape s’est inquiété de voir que, dans certains milieux, «l’idéologie prend la place de l’Évangile». En avertissant une nouvelle fois que la mondanité spirituelle est un danger pire que le libertinage de certains papes du passé, le pontife s’est aussi alarmé du «cléricalisme qui suscite la rigidité».
Interrogé sur la question migratoire, François a une nouvelle fois dénoncé l’enfermement de migrants dans de véritables camps de concentration dans certains pays de transit, et le drame vécu par ceux qui meurent en mer quand les bateaux sont repoussés.
L’anticipation est nécessaire de la part des pays d’arrivée, a expliqué le pape. «Chaque pays doit dire combien de migrants il peut accueillir», a-t-il souhaité, plaidant pour un accord au niveau de l’Union européenne, en cherchant «un équilibre, en communion». Tout l’effort ne doit pas seulement reposer sur l’Italie ou l’Espagne, a reconnu l’évêque de Rome. La politique migratoire doit donc être pensée «de façon intelligente».
Dans un contexte d’inégalités sociales croissantes, les jeunes nés dans un environnement privilégié et éduqué ne doivent pas avoir une «mentalité fermée», et tomber dans la «psychologie de l’indifférence». Le pape a invité à oser «toucher» les misères, à l’image du bon Samaritain.
Le pape a donné de nombreux exemples concrets, saluant le dévouement des médecins et des infirmières restés au contact des malades du Covid-19. Il a aussi expliqué avoir l’habitude de partager ce conseil simple aux personnes qu’il reçoit en confession: en donnant une pièce à un sans-abri, il faut lui toucher la main et le regarder dans les yeux, car si l’on regarde ailleurs, on reste bloqué dans «la culture de l’indifférence».
Le pape s’est alarmé de voir la dégradation environnementale s’accélérer. Il a évoqué les paroles d’une chanson du chanteur brésilien Roberto Carlos, dans laquelle un enfant demande: «Papa, pourquoi le fleuve ne chante plus?». Et son père de répondre: «Car il n’y a plus de fleuve. Nous l’avons épuisé».
Le monde pourrait devenir «inhabitable» dans 30 ans, s’est alarmé le pape en évoquant les propos d’un médecin lors d’un récent congrès. Il a déploré les tonnes de plastique récupérées en mer par des pêcheurs, et dont le volume ne cesse d’augmenter. «Jeter le plastique à la mer est criminel, cela tue la biodiversité», s’est-il attristé.
«L’agressivité sociale» est un autre problème prégnant et croissant, a déploré le pontife. Il s’est alarmé de l’augmentation du nombre de suicides de jeunes, souvent liés à des faits de harcèlement scolaire. «C’est un problème de la société dans son ensemble, et non pas seulement une pathologie personnelle», a-t-il analysé.
Concernant les défis éducatifs, le pape a une nouvelle fois invité à la «proximité entre parents et enfants». Il a confié aimer demander aux jeunes parents reçus en confession s’ils prennent le temps de jouer avec leurs enfants, et les inviter à ne pas «s’effrayer des dérapages de leurs enfants» lors de leur adolescence. Une complicité parentale aide les parents et les enfants à grandir ensemble, a expliqué le pape.
Interpellé sur sa définition de la prière, il a délivré un conseil spirituel simple en invitant chaque chrétien à oser «prier comme un enfant» qui demande l’aide de son papa ou de sa maman. Prier, c’est «regarder ses propres limites» et parler directement à Dieu en l’appelant «papa», en s’assumant petit, et en assumant le besoin d’être regardé avec bienveillance.
Interrogé sur ses souhaits professionnels durant sa jeunesse, le pape a confié qu’enfant, il rêvait de devenir boucher car ce métier semblait rapporter beaucoup d’argent.
Revenant brièvement sur sa première expérience professionnelle de technicien dans un laboratoire de chimie, il a expliqué avoir ensuite renoncé à des études de médecine pour entrer au séminaire.
Au sujet de sa récente visite dans un magasin de disques du centre de Rome, le pape argentin a redit son affection pour la musique classique et pour le tango, comme tout «Porteño», terme qui désigne les habitants de Buenos Aires.
Il a par ailleurs expliqué tenir depuis plus de 30 ans son vœu de ne jamais regarder la télévision, par choix spirituel, sauf pour des actualités spécifiques comme les attentats du 11 septembre 2001.
Le pape a répété avoir «besoin de la proximité des gens» et d’avoir des amis pour échanger sans protocole, d’où sa décision de vivre à la maison Sainte-Marthe et non pas dans les appartements pontificaux. Avec humour, il a reconnu ne pas se sentir aussi saint que «les papes qui étaient là avant».
La participation du pape François à une émission «d’infotainment» avait suscité quelques interrogations et perplexités en Italie, certains éditorialistes y voyant un signe d’une excessive désacralisation de la figure du pape.
«Le pape a choisi cette façon de parler à tous, de parvenir à tous!», s’est au contraire réjoui, ému, le présentateur de l’émission, Fabio Fazio. Ce fervent catholique est membre de la communauté Nuovi Orizzonti, une association de droit pontifical engagée dans l’évangélisation de rue.
Selon la presse italienne, il s’agissait de la première participation d’un pape à une émission de talk-show, si l’on excepte le salut téléphonique de Jean Paul II, le 13 octobre 1998, lors de l’émission Porta a Porta consacrée au 20e anniversaire de son pontificat. (cath.ch/imedia/cd/rz)
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