L’italien est certes toujours la langue dominante entre les murs du Vatican. Mais la langue de Dante y est aujourd’hui sérieusement concurrencée par celle de Cervantes, souligne l’agence allemande Katholische Nachrichtenagentur (KNA).
Le pape argentin, bien qu’il maîtrise parfaitement l’italien de par ses origines piémontaises, s’entoure naturellement de personnes parlant sa langue maternelle. Il a pourvu des dizaines de postes dans la direction supérieure et moyenne de la Curie avec des candidats originaires d’Espagne et d’Amérique latine.
Au sommet de la hiérarchie, il est difficile d’ignorer l’influence croissante des Espagnols: le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, l’une des autorités les plus puissantes du Vatican, est depuis 2017 le Majorquin Luis Francisco Ladaria Ferrer (77 ans). Son compatriote, le cardinal Miguel Ayuso (69 ans), est président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux depuis 2019. Ils ont été rejoints la même année par Juan Guerrero (62 ans), originaire de Mérida, à l’ouest de l’Espagne, en tant que préfet du Secrétariat pour l’économie.
Un autre Espagnol encore, Alejandro Arellano (59 ans), dirige depuis quelques mois la Rote romaine, le deuxième plus haut tribunal de l’Église. Et en octobre, François a nommé Mgr Fernando Vergez Alzaga (76 ans), de Salamanque, président du gouvernorat et donc chef du gouvernement de la Cité du Vatican.
L’espagnol est également abondamment parlé à la Secrétairerie d’État, l’organisme en charge des relations diplomatiques du Saint-Siège. C’est pourtant encore là un Italien, Pietro Parolin, qui est aux commandes. Le cardinal dispose toutefois d’une excellente connaissance de la langue de Cervantes, après avoir été nonce au Venezuela pendant plusieurs années.
Le pape lui a adjoint en 2018 l’archevêque vénézuélien Edgar Pena Parra (61 ans). Ce dernier a repris le poste important de substitut à la Secrétairerie d’État et est désormais désigné comme le «numéro trois» du Vatican.
Les origines du personnel du pape se reflète de façon sensible sur le travail quotidien au Vatican. Lorsque les réunions importantes impliquent presque exclusivement des hispanophones, ils se concertent naturellement entre eux dans leur langue maternelle, note KNA. Les communiqués de presse du Vatican sont également de plus en plus souvent publiés en espagnol, parfois même sans traduction en italien.
Cette évolution n’est pas seulement l’expression des désirs du pape. Elle tient compte du poids des pays hispanophones dans l’Eglise universelle. Quarante pourcent des catholiques dans le monde vivent en Amérique latine. Ce nouvel équilibre fait que l’eurocentrisme traditionnel n’a plus de raison d’être.
En 2020, une exhortation apostolique, Querida Amazonia, était pour la première fois dévoilée en espagnol.
La composition du collège des cardinaux est également un signe de la nouvelle donne. En cas de conclave, il y aurait aujourd’hui 119 cardinaux en droit de voter. Parmi eux, 23 sont des Espagnols ou des Sud-Américains hispanophones. Si un pape devait être élu, ils remplaceraient les 20 Italiens actuels en tant que groupe linguistique le plus important. (cath.ch/kna/rz)
Raphaël Zbinden
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