«Le Christ envoyait toujours ses disciples par deux», souligne Marie-Andrée Beuret lors de la conférence de presse à Delémont (JU). Une façon de dire que la mise place d’un binôme à la tête du Jura pastoral s’inscrit pleinement dans une logique évangélique. L’annonce suscite en tout cas la bonne humeur dans un centre paroissial où se côtoient de nombreux journalistes, principalement des médias régionaux.
L’abbé Jean Jacques Theurillat, encore vicaire épiscopal pour le Jura pastoral jusqu’au 31 juillet 2022, prend tout d’abord la parole pour expliquer les raisons de son départ. Après 13 ans de mandat, il invoque une certaine fatigue et la volonté de retrouver un élan à quelques années de la retraite. Il a ainsi estimé que l’année de ses 60 ans convenait à une nouvelle orientation dans sa carrière. Une décision mûrement discutée et réfléchie avec Mgr Felix Gmür, évêque de Bâle. L’abbé Theurillat devrait ainsi reprendre le poste de curé du Vallon de Saint-Imier, dans le Jura bernois.
Dans le «brainstorming» sur sa succession, l’évêque n’a pas perçu comme indispensable que la direction du Jura pastoral soit reprise par un prêtre. Les responsables se sont donc penchés sur les personnes les plus compétentes pour assurer cette fonction. Plusieurs noms sont ressortis, dont ceux de Marie-Andrée Beuret et de Didier Berret. La théologienne pastorale jurassienne occupera le poste à 70%, alors que le diacre des Franches-Montagnes, accessoirement commentateur de l’Evangile du dimanche sur cath.ch, s’y attellera à 30%.
Cette répartition leur permettra de conserver une partie de leurs activités actuelles. Marie-Andrée Beuret restera engagée en Ajoie comme membre associée à l’équipe pastorale. Elle doit encore déterminer ce qu’elle pourra garder de ses autres engagements.
Didier Berret n’assumera plus la responsabilité de l’unité pastorale des Franches-Montagnes. Il restera cependant actif comme diacre en ministère paroissial pour cette unité. Il diminuera également son activité d’enseignement au Centre catholique romand de formations en Eglise (CCRFE) à Fribourg.
La théologienne jurassienne assurera le rôle principal de conduite. Le diacre franc-montagnard aura la responsabilité de domaines particuliers. Mais l’un comme l’autre assumeront pleinement la fonction de délégué épiscopal dans leurs tâches réciproques, n’ayant comme supérieur direct que l’évêque.
Les intervenants se réjouissent du fait que la direction du Jura pastoral puisse être confiée à des «enfants du pays», connaissant notamment parfaitement le milieu ecclésial local.
L’absence d’un prêtre dans la direction du Jura pastoral conduira à ce que l’abbé Georges Schwickerath, vicaire épiscopal pour le secteur Saint-Vérène (Berne-Jura-Soleure) soit associé plus fortement dans certains dossiers de la partie francophone du diocèse. Il s’agit principalement de procédures de nominations ou d’administrations de sacrements qui ne peuvent être réalisées que par un prêtre.
Un changement significatif, mais pas forcément révolutionnaire dans le diocèse de Bâle, ont toutefois noté les intervenants. Jean Jacques Theurillat explique que des laïcs, dont des femmes, ont été nommés à des postes de responsabilités depuis au moins 18 ans dans d’autres régions du diocèse. L’évolution s’inscrit donc dans une forme de «tradition» diocésaine.
Adoptant une couleur plus laïque, le Jura pastoral se teinte ainsi également de féminité. Les intervenants précisant bien que le genre n’a joué aucun rôle dans la nomination de la Marie-Andrée Beuret. «Il s’agissait juste de la personne la plus compétente pour ce poste», souligne Jean Jacques Theurillat.
La démarche réalisée dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF) a bien sûr été mentionnée lors de la conférence de presse. Mgr Charles Morerod a en effet nommé en 2021 dans les cantons des représentants de l’évêque en lieu et place des vicaires épiscopaux. Même si cette évolution n’a pas influencé la décision pour le Jura pastoral, assure l’abbé Theurillat, elle en facilitera néanmoins certainement la réception sur le terrain.
Un nouveau modèle de gouvernance qui, pour les responsables d’Eglise, devrait trouver une large compréhension parmi les fidèles. «Il y aura certainement des réticences, comme c’est le cas partout quand quelque chose change, note Didier Berret. Mais tout ira bien quand les personnes verront que cela fonctionne».
A noter que le diocèse de Bâle a opté pour le terme «délégués» de l’évêque, alors que LGF parle de «représentants» de l’évêque pour les régions diocésaines.
Les intervenants n’ont pas fait mystère du fait que cette décision était également motivée par un manque de prêtres. Leur effectif a diminué d’un quart en dix ans dans le Jura pastoral. Le nombre des autres postes est, lui, resté stable, précise Jean-Jacques Theurillat.
Le renforcement ainsi effectué de prêtres dans les paroisses est aussi l’un des effets souhaités de cette évolution.
Les deux nouveaux délégués se disent conscients que cette brise de changement rejoint le nouveau souffle que le pape François donne à l’Eglise, notamment à travers le synode sur la synodalité. «Pour moi, cette nomination, c’est surtout le signe d’une ouverture, confie ainsi Marie-Andrée Beuret à cath.ch. Cela montre que les choses sont en train de bouger, qu’il est désormais possible que les responsabilités soient partagées dans l’Église. J’espère que cela pourra insuffler aux fidèles, d’abord dans le Jura pastoral, l’envie de s’impliquer encore davantage dans le cheminement commun». (cath.ch/rz)
Marie-Andrée Beuret,
Marie-Andrée Beuret est une théologienne en pastorale, célibataire, née le 29 février 1972. Titulaire Certificat d’aptitudes pédagogiques à l’enseignement primaire, elle faut des études en théologie à Fribourg et à Lucerne (1999-2004). Elle a un doctorat en droit ecclésiastique à Lucerne (2007) et a été Instituée assistante pastorale le 7 juin 2009. Marie-Andrée Beuret est Actuellement théologienne en pastorale en ministère paroissial dans l’Espace pastoral Ajoie-Clos du Doubs (Chevenez).
Didier Berret
Didier Berret est né le 9 mars 1966. Il est marié et père de cinq enfants. Il a fait des études en théologie à Fribourg et à Jérusalem (Dormition) de 1985 à 1990. Il a été institué assistant pastoral le 15 juin 1991 et a été ordonné diacre le 2 juillet 2000. Il est actuellement responsable de communauté pour l’Unité pastorale des Franches-Montagnes (Saignelégier)
Jean Jacques Theurillat
Né le 2 mars 1962, Jean Jacques Theurillat a suivi une formation de droguiste, d’abord en apprentissage puis à l’École supérieure de droguerie. Il a fait des études en théologie à Fribourg de 1984 à 1990. Il a été ordonné prêtre le 16 juin 1991. Il a été nommé ministère à Moutier (1991-1998) puis à Delémont (1998-2009) et a été doyen de Delémont-Courrendlin de 1999-2003. Il a ensuite été nommé représentant de l’évêque de Bâle pour le Jura pastoral en tant que Délégué épiscopal (2009-2012) puis comme Vicaire épiscopal (2012-2022). Il a été président de la COR – Conférence des Ordinaires de la Suisse romande de 2016 à 2019. SCJP
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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