La Commission du Sénat brésilien a présenté le 26 octobre son rapport final sur la mauvaise gestion de la pandémie de COVID-19 par le président Jair Bolsonaro. Le document contient neuf chefs d’accusation contre le président, dont celui de «charlatanisme» et de «crimes contre l’humanité».
Plus de 600’000 personnes sont mortes du COVID-19 au Brésil. Les experts estiment qu’au moins 120’000 vies auraient pu être épargnées si le gouvernement avait adopté les protocoles suggérés par les experts, comme l’imposition des distanciations sociales et l’utilisation régulière de masques.
Jair Bolsonaro a toujours refusé de décréter un confinement et a critiqué les gouverneurs des États brésiliens et les maires des villes qui l’ont fait. À plusieurs reprises, il a rencontré ses partisans sans distanciation et promu de grands rassemblements, généralement sans appeler au port du masque. Le président a en outre exprimé des doutes quant à l’efficacité et à la sécurité des vaccins contre le COVID-19. Il n’a pas acheté les doses offertes au Brésil en 2020, ce qui a entraîné un retard dans le processus de vaccination de la population.
La commission a publié son rapport après avoir entendu des dizaines de témoins et de suspects. 78 personnes- dont Jair Bolsonaro et trois de ses fils – ainsi que deux entreprises ont été inculpées par la Commission du Sénat. Le document a été transmis à plusieurs autorités, dont le procureur général Augusto Aras, qui décidera si les conclusions de la commission donneront lieu à une action en justice.
Augusto Aras est considéré par beaucoup comme un allié de Bolsonaro, qui l’a nommé à son poste. Beaucoup doutent ainsi que les travaux de la commission aboutissent à des sanctions concrètes pour le président.
Au Parlement brésilien, il est peu probable que le rapport conduise à la destitution de Jair Bolsonaro, relève le site américain Crux. Le président y possède un soutien trop important pour être inquiété.
Les accusations portées par la commission pourraient toutefois motiver des actions en justice menées par la Cour suprême du Brésil, voire par la Cour pénale internationale (CPI). Selon les analystes, l’atmosphère politique sera un facteur décisif dans ce contexte.
S’ils ont peu d’espoir que le président Bolsonaro puisse être amené prochainement devant la justice, ses détracteurs – dont font partie plusieurs dirigeants catholiques – pensent que le document est une étape importante pour faire en sorte que le chef d’Etat répondent un jour de ses actes.
Des militants catholiques tels que Daniel Seidel, secrétaire général de la Commission Justice et Paix de la Conférence des évêques du Brésil (CNBB), prévoient de diffuser largement les accusations contre le président. Dans l’optique, notamment des prochaines manifestations de rue, prévues le 20 novembre.
«Nous sommes conscients de tous les obstacles qui existent au Congrès brésilien et dans les autres instances de la République. C’est pourquoi nous allons diffuser le rapport parmi les catholiques et la société au sens large», a déclaré Daniel Seidel à Crux.
La CNBB a soutenu la commission d’enquête du Sénat depuis le début. Un engagement qui a déjà trouvé un retentissement auprès des laïcs catholiques. «Nous voulons créer une atmosphère dans laquelle il deviendrait impossible pour le gouvernement actuel de rester au pouvoir. Nous pensons que le massacre ne prendra fin que lorsque le président sera évincé».
Les catholiques ont également joué un rôle important lors des dernières auditions de la commission. L’idée d’inviter les victimes de la pandémie et leurs familles a été suggérée au comité par l’association Vie et justice, qui défend les droits des personnes touchées par la maladie.
Mgr Zanoni Demettino Castro, archevêque de Feira de Santana, à l’est du Brésil, estime que la commission d’enquête du Sénat a pu «influencer l’opinion publique, malgré ses limites.» Il assure que le mécontentement augmente sans cesse envers Bolsonaro, malgré les tentatives de ses alliés de discréditer les accusations. «Le chômage, l’extrême pauvreté et la faim augmentent. Le nombre de personnes qui soutiennent Bolsonaro diminue progressivement», affirme le prélat. (cath.ch/crux/arch/rz)
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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