La communauté conservatrice Saint-Martin est née il y a 45 ans. Elle s’est tellement développée en France qu’elle représente désormais une ordination sacerdotale sur cinq. Quitte à parfois crisper, comme au Mont-Saint Michel où elle vient de s’implanter.
Ils portent la soutane et apprécient le chant grégorien: les prêtres de la communauté Saint-Martin sont d’apparence pour le moins classique, même s’ils célèbrent la messe d’après Vatican II et ne se rattachent pas à la mouvance traditionaliste. Et ce style séduit les jeunes. En juillet, 26 prêtres ont été ordonnés en France pour la communauté. Une centaine de séminaristes Saint-Martin sont actuellement en formation. Si la tendance continue, 20% à 40% des prêtres français pourraient être issus de leurs rangs dans 30 ans, selon le journal La Croix qui consacrait un dossier à cette communauté le 20 septembre.
Ce succès a de quoi réjouir les évêques, dont plusieurs attendent encore que Saint-Martin leur envoie des religieux. 168 prêtres de la communauté officient déjà dans 30 diocèses français. Saint-Martin a en effet pour vocation de servir dans les paroisses. Dès la sortie du séminaire, ses prêtres sont pris en charge financièrement par les diocèses. D’un autre côté, certains catholiques voient d’un mauvais œil l’arrivée de ces curés en soutane et à la théologie plutôt carrée.
Exemple par excellence de ce choc des cultures, l’arrivée d’un prêtre de Saint-Martin au Mont-Saint-Michel. Le recteur sortant, Henri Gesmier, dit «Riton», était de la Mission de France, tendance catholicisme social. Le contraste ne pourrait être plus grand, et une pétition circule – sans beaucoup de succès semble-t-il – pour s’opposer à cette arrivée. Le nouveau venu, Don Maurice Franc, se veut conciliant: «J’ai conscience que si on joue les coqs, ce sera la catastrophe», confie-t-il à La Croix. (cath.ch/la croix/cmc)
Des cadres pour l’Eglise de France
La communauté Saint-Martin est née en 1976 autour de l’abbé Jean-François Guérin, qui dans l’époque mouvante qui a suivi Vatican II disait préférer entraîner son époque plutôt que se laisser entraîner par elle. Sans être pour autant séduit par les thèses antimodernes d’un Mgr Lefebvre.
Moins adulé que d’autres fondateurs de communautés nouvelles, Jean-François Guérin, décédé en 2005, laisse à ses héritiers un style terre à terre, un peu boyscout, peu enclin à la mystique ou au sentimentalisme. La formation intellectuelle est cruciale pour Saint-Martin ; le modérateur actuel, Don Paul Préaux, avoue clairement former des «cadres» dont certains seront sans doute appelés à devenir évêques, mais se défend d’avoir un agenda caché. La communauté compte d’ailleurs déjà deux évêques, à Bayonne et à Pamiers (Ariège), avec des styles assez différents, «signe que Saint-Martin ne forme pas des clones», estime La Croix.
Christine Mo Costabella
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