Le charisme de Michel Corboz aura marqué toute une génération de choristes, mais aussi de chefs de choeur et d’orchestre. Sa personnalité aura fait vibrer des dizaines de milliers de mélomanes, en Suisse, mais également à l’étranger. Son importante discographie, de plus d’une centaine d’enregistrements, a souvent fait date. Régulièrement invité dans les émissions de radio et de télévision, Michel Corboz y a livré son âme musicienne.
Né en Gruyère dans une famille de chanteurs, Michel Corboz découvre très tôt le pouvoir de la musique et de la voix. Il se forme ensuite au Conservatoire de Fribourg où il étudie le chant et la composition. Très vite, il est attiré par la direction chorale. Il fonde à 27 ans l’Ensemble vocal de Lausanne et l’Ensemble instrumental de Lausanne au début des années 1960.
Dans ces même années, le Fribourgeois fait la connaissance du directeur artistique de la maison de disques Erato. Cette rencontre sera décisive pour la suite de sa carrière au plan international. C’est avec ce label français qu’il enregistre en effet ses plus grands succès: la Messe en si et les Passions de Bach, les Requiem de Mozart, Brahms, Verdi ou Fauré. La Messe de Puccini ainsi que des œuvres de Frank Martin et Arthur Honegger ont également été gravées sur le vinyle.
[rts:video:432793]Son rapport à la musique était instinctif, témoignent les chanteurs et chanteuses. Il savait transmettre l’envie de se dépasser et de donner le meilleur de soi. D’une extrême exigence, il était attentif à la moindre des nuances, afin que le choeur résonne comme un unique instrument.
Michel Corboz a été régulièrement invité à diriger d’autres ensembles comme l’Orchestre de chambre de Lausanne, de l’Orchestre de la Suisse romande, de l’Orchestre de la radio danoise, du Chœur de la radio bavaroise, du Sinfonia Varsovia. Il a enseigné la direction chorale au Conservatoire de Genève durant près de 28 ans.
Titulaire de nombreuses récompenses, le musicien avait donné en juin 2020 son ultime concert à Genève, une messe d’adieu à la cathédrale Saint-Pierre qu’il a offerte dans le cadre du Festival Haydn-Mozart.
«J’ai eu beaucoup de chance à vivre comme j’ai pu vivre. Alors cela m’aide aussi à l’idée de mourir, d’avoir pu vivre tout ça. Il existe un moment où il faut passer à l’autre rive. J’aimerais que ce passage se fasse le plus calmement possible», confiait Michel Corboz en 2005 à l’émission Racines.
Le musicien est décédé d’un arrêt du coeur à la suite d’une opération, a expliqué à l’ATS son épouse Janine. (cath.ch/ag/mp)
«Michel Corboz n’aimait pas le joli, il nous entraînait vers le beau»
Jean-Daniel Loye, membre de l’ensemble vocal de Lausanne depuis 1990, revient sur la personnalité de Michel Corboz. «Né le 14 février 1934, qui était celle année-là à la fois le mercredi de cendres et la Saint-Valentin, Michel Corboz vivait de cette tension entre la joie et la souffrance.
L’exigence et la perfection ne sont pas tout à fait les mots que j’utiliserais pour le qualifier. Je dirais plutôt qu’il avait la capacité de faire sortir le meilleur de nous-mêmes pour offrir, aux choristes et aux auditeurs, des instants hors du temps et du monde. On entrait alors avec lui dans une autre dimension. Il n’y avait pas de concert où nous ne versions quelques larmes.
Michel Corboz n’était ni dogmatique, ni doctrinal. Il n’insistait pas sur l’aspect religieux, mais il y avait toujours chez lui cette dimension spirituelle, existentielle. Le Gloria a deux couleurs, expliquait-il: la joie et la souffrance surmontée. Pour lui, l’une n’allait pas sans l’autre. Il n’aimait pas le joli, mais voulait toujours nous conduire, avec le public, vers le beau. Les concerts qu’il dirigeait, en particulier les Passions étaient presque des liturgies. Comme maître d’oeuvre, il tenait tout le monde en haleine de bout en bout.
Chef à l’immense réputation, souvent adulé par la critique et le public, Michel Corboz, doué d’une extraordinaire autorité naturelle, était cependant resté proche de ses chanteurs et ses musiciens. C’est plutôt nous qui, par respect, gardions une certaine distance.» MP
Maurice Page
Portail catholique suisse
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