Les chrétiens sont, avec les druzes, chiites et sunnites, l’une des principales communautés qui garantissent l’existence même du Liban. Au cours de l’histoire, «chacune de ces communautés a appris à ses dépens qu’elle ne pouvait prendre le pouvoir seule » mais qu’elle avait besoin des autres, explique Mgr Gollnisch, directeur de l’Œuvre d’Orient à I.Média. Cruciale pour l’équilibre du pays, la communauté chrétienne a notamment un rôle de médiateur entre les chiites et sunnites et est sans doute la seule qui peut parler à toutes les communautés, poursuit-il.
À l’heure où la tentation de l’émigration est forte, notamment pour la classe moyenne chrétienne, le pape rappellera sans doute la vocation humaniste des chrétiens pour l’ensemble de la société libanaise et mettra en garde contre tous risques de replis ou de fuite. Vincent Gelot, responsable projets de l’Œuvre d’Orient au Liban et en Syrie l’affirme: «si le pays tient aujourd’hui, c’est grâce aux Églises». Ni politique, ni vraiment spirituelle, ce sommet «va se centrer sur la mission des chrétiens dans la vie nationale libanaise», résume Mgr Gollnisch.
«Il y a un énorme décalage entre les discours tenus par les chefs spirituels libanais et leurs pratiques de corruption dans l’Église», confie une source au Liban à I.Média. Le problème de la corruption – précisément le mal qui gangrène la classe politique actuelle – n’a pas épargné les différentes Églises au Liban.
«Nous avons tous été touchés d’une manière ou d’une autre», reconnaît Mgr César Essayan, vicaire apostolique pour les catholiques romains au Liban à l’occasion d’une conférence de presse. Il décrit une pratique qui s’immisce subtilement dans toutes les institutions.
Pour Mgr Gollnisch, nul doute que le pape interviendra sur cette thématique des finances, très chère à ses yeux. De telles remontrances ne seront sans doute pas publiques. «Les Églises au Liban doivent donner l’exemple de la transparence sur le plan économique et il y a une marge de progression sur ce plan », insiste le directeur de l’Œuvre d’Orient. Ce changement de cap est gage de la confiance des nouvelles générations, déçues par leurs élites.
«Nous n’allons pas au Vatican en portant seulement les doléances des chrétiens, mais bien celles de tous les Libanais», a affirmé le patriarche Rai dans son homélie le 27 juin dernier. Le pape a conscience que le Liban traverse «une crise d’identité» et veut écouter les chefs chrétiens lui parler de la situation actuelle et de l’avenir, explique Mgr Essayan.
Pour le haut prélat, «ce qui se passe sur le terrain prouve qu’on est à la fin d’un régime politique mais au aussi à la veille d’un nouveau commencement», analyse-t-il. Selon lui, cette journée sera concrètement l’occasion d’évoquer «le programme» du Liban de demain. «Certains parlent d’un État laïc», avance-t-il en conférence de presse.
Le prélat va jusqu’à remettre en question l’actuelle répartition confessionnelle. Mettre fin à ce système est «un risque qu’il faut prendre pour sortir de ce bourbier» car «beaucoup de Libanais, chrétiens comme musulmans» ne s’y reconnaissent plus. Une position qui est loin de faire l’unanimité. Le cardinal Raï, par exemple, patriarche d’Antioche des Maronites, affirme que ce modèle politique est un patrimoine à protéger.
Si cette réunion au sommet n’offrira pas de solution toute faite à la crise libanaise, elle peut renforcer l’implication des chrétiens à s’investir pour sauver leur pays. Le pape va sans doute s’adresser à la fois aux évêques, au peuple chrétien, au Liban dans son ensemble et à la communauté internationale, imagine Mgr Gollnisch. Toutefois, il veut d’abord «pousser les Libanais à se regarder eux-mêmes». Sans aucun doute, la solution doit venir de nous, renchérit Mgr Essayan. (cath.ch/imedia/cg/bh)
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