Alexander Brüggemann/kath.ch
Les nouvelles en provenance des Ardennes feront plaisir aux amateurs de bières monastiques belges: l’abbaye trappiste Notre-Dame de Saint-Remy à Rochefort, dans la province belge de Namur, a mis à genoux un géant minier.
L’entreprise minière «Lhoist», active à l’échelle internationale, souhaitait poursuivre l’exploitation du puits de calcaire «La Boverie», situé près du monastère, jusqu’en 2046. L’exploitation menaçait la source à laquelle l’abbaye puise l’eau pour sa brasserie depuis 1892.
Plus d’eau – plus de bière! Cette menace planait depuis de nombreuses années. Cela aurait été la fin de l’une des onze bières labélisées «trappistes» authentiques qui restent dans le monde. Mais une cour d’appel de Liège vient de décider que, bien que la source appartienne au propriétaire de la mine, celui-ci n’a pas le droit, selon un contrat datant de 1833, de couper l’approvisionnement en eau du monastère.
De plus, selon les moines, les plans d’expansion du géant minier mondial violent un accord datant de 1984, selon lequel la société n’est pas autorisée à exploiter des mines en dessous d’une profondeur, déjà atteinte, de 220 mètres; l’eau de la source se situe à plus de 211 mètres. Pour leur défense, les trappistes avaient même lancé une campagne en ligne «Sauvez la source Tridaine» en 2013.
L’abbaye wallonne brasse la célèbre bière trappiste Rochefort depuis environ 130 ans; le monastère est une destination populaire pour les excursions. Avec la source et l’écosystème de la Tridaine, l’abbaye voit non seulement sa bière et donc ses emplois menacés, mais aussi l’approvisionnement en eau de toute la ville.
Depuis 1892, les moines de Rochefort fournissent à la commune 400’000 m3 par an, soit les 80% du volume total d’eau consommée. Le transport d’une eau pure provenant d’une source plus éloignée pour la brasserie entraînerait des coûts supplémentaires considérables ainsi qu’une perte d’authenticité du produit.
Le monastère a connu bien des épreuves tout au long de son histoire. Fondé vers 1230 comme monastère cistercien, un ordre de moines s’est installé dans les bâtiments au 15e siècle. Mais peu après la découverte de la source en 1797, l’abbaye a été pillée au cours de la Révolution française, puis supprimée, et l’église du monastère démolie.
Ce n’est que près d’un siècle plus tard, en 1887, que des trappistes venus des Pays-Bas réinvestissent l’abbaye ; l’église néogothique date également de cette période de refondation. Enfin, en janvier 2011, un court-circuit a déclenché un incendie qui a détruit plus de 1000 mètres carrés de toiture. Les parties les plus importantes du bâtiment n’ont heureusement, pas été endommagées, notamment la bibliothèque historique ainsi que la brasserie de 1899.
Les trappistes de Rochefort produisent chaque année des dizaines de milliers d’hectolitres de bière forte, dont les arômes fruités et caramélisés sont loués par les connaisseurs. Cette bière semble être sauvée. Du moins provisoirement. Selon un porte-parole, l’entreprise minière étudie la possibilité de faire appel de l’arrêt de Liège devant la Cour de cassation. (cath.ch/kath.ch/kna/bh)
Label trappiste
Pour obtenir le label de l’Association trappiste internationale, les bières de fermentation haute doivent être brassées au sein de l’abbaye et sous la responsabilité de l’ordre. C’est pourquoi, tout récemment, la bière belge d’Achel a perdu le label de bière trappiste après que les derniers moines ont quitté l’abbaye Benedictus qui s’y trouvait en 2018.
Il existe actuellement onze bières trappistes authentiques dans le monde: cinq en Belgique (Westvleteren, Westmalle, Chimay, Rochefort et Orval), deux aux Pays-Bas (Koningshoeven, Zundert), une en Autriche (Engelszell), une en Italie (Tre Fontane), aux États-Unis (Spencer, Massachusetts) et, depuis 2018, une en Angleterre (St Bernard, Leicestershire). AB
Rédaction
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