Depuis le 1er avril 2021, de nombreux de pèlerins se massent sur les bords du Gange, à Haridwar, dans l’État de l’Uttarakhand, à l’occasion de la Kumbh Mela (littéralement « fête de la cruche »). L’événement est organisé à tour de rôle dans les villes saintes de Prayagraj (en Uttar Pradesh), de Haridwar, d’Ujjain (Madhya Pradesh) et de Nashik (Maharashtra).
Au moins un million de pèlerins sont attendus chaque jour à Haridwar. Plusieurs millions de personnes prennent traditionnellement part à chaque festival, ce qui en fait l’une des plus grandes manifestations religieuses au monde. La Purna Kumbh Mela, ou grande Kumbh Mela, a lieu tous les douze ans. Ainsi, du 1er au 30 avril à Haridwar, les bords du Gange sont traditionnellement bondés de pèlerins.
Cette année beaucoup d’entre eux ont été vus sans masques ou ne respectant pas les restrictions sanitaires, rapporte Eglises d’Asie (EdA), l’agence d’information des Missions Etrangères de Paris. Le 12 avril, malgré les avertissements des autorités, presque 3 millions de personnes se sont rassemblées, sur les bords du Gange, quasiment sans aucune distanciation physique, pour le Somvati Amavasya, le jour le plus important du pèlerinage.
L’inspecteur général de la police locale, Sanjay Gunjyal, s’est défendu en affirmant que beaucoup de pèlerins auraient pu être tués s’ils avaient tenté de faire respecter les règles, alors que les gens s’approchaient des rives pour se baigner dans les eaux sacrées.
Selon les statistiques officielles locales, seuls 18’169 pèlerins ont été testés, dont 102 étaient positifs au Covid-19. Cette situation suscite de nombreuses inquiétudes alors que le pays enregistre une nouvelle vague de contagions. Le 14 avril, l’Inde a établi un record absolu depuis le début de la pandémie, avec plus de 200’000 cas de contaminations. Les experts incriminent les fêtes religieuses, les meetings politiques et tous les lieux publics bondés.
Le Père Anand Mathew, de la Société missionnaire indienne et directeur du forum interreligieux Sajha Sanskriti Manch, proteste contre cette situation. «L’hypocrisie du gouvernement et l’inégalité des mesures imposées sont évidentes», tempête-t-il. Il note que les écoles et les universités sont fermées, et qu’il y a des restrictions concernant les mariages et les funérailles. «Dans notre communauté, nous avons dû annuler les célébrations du Vendredi Saint, parce que nous n’étions pas en mesure de respecter le protocole sanitaire».
Le prêtre catholique ne comprend donc pas pourquoi le festival hindou a été maintenu. «Le gouvernement de l’Uttarakhand a même envoyé des avions qui ont survolé les pèlerins pour jeter des pétales de fleurs. Seuls les haut gradés ont été invités à ne pas participer au festival. Leur santé est considérée comme plus importante que celle des gens ordinaires», poursuit le Père Mathew. «En Inde, la laïcité ne signifie pas l’absence de religion, mais un respect équitable de toutes les religions. Ces derniers événements prouvent que nous ne sommes plus dans un pays laïc, et pour ceux qui, comme nous, se soucient de protéger la Constitution indienne, c’est une inquiétude.»
L’Inde est dirigée depuis 2014 par Narendra Modi, de la formation nationaliste hindoue Bharatiya Janata Party (BJP). Depuis son élection, des minorités religieuses du pays ont à maintes reprises dénoncé un recul de la démocratie et de la liberté religieuse à leurs dépens. (cath.ch/eda/asianews/ag/rz)
Raphaël Zbinden
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