Gianluigi Torzi – incarcéré par la justice vaticane pendant dix jours en 2020 – est soupçonné par la justice italienne, d’avoir utilisé, «avec la collaboration active de prête-noms et d’hommes de confiance», de nombreuses sociétés en Italie et à l’étranger comme «écran» pour ses activités commerciales «largement basées sur l’évasion fiscale».
Le juge de l’enquête préliminaire, Corrado Cappiello, estime en outre que le «danger absolument concret et réel de réitération de crimes» par le courtier justifie cette arrestation. Trois collaborateurs de l’homme d’affaires sont aussi impliqués.
L’argent utilisé dans les opérations illégales proviendrait selon l’ordonnance des 15 millions d’euros que la Secrétairerie d’État a payé à Gianluigi Torzi pour récupérer le contrôle de l’immeuble de Londres des mains du banquier Raffaele Mincione en 2018.
Le parquet romain aurait obtenu ces informations de la part du bureau du promoteur de justice du Saint-Siège – qui poursuit de son côté son enquête contre le courtier originaire de Molise.
L’ordonnance du tribunal romain soulève par ailleurs d’importants dysfonctionnements au sein de la Secrétairerie d’État, qui a opéré l’acquisition du bien immobilier londonien.
La puissante entité vaticane aurait en effet agi en dehors de ses prérogatives légales en investissant dans l’immeuble de Londres, affirme le juge italien, le Denier de Saint-Pierre utilisé dans l’opération ne lui permettant pas d’effectuer des investissements spéculatifs, cette prérogative étant réservée à l’Administration du patrimoine du siège apostolique (APSA).
Le juge Corrado Cappiello rapporte qu’une enquête de l’IOR affirme qu’il n’existe en outre pas de documentation sur l’acquisition de l’immeuble à la Secrétairerie d’État.
En plus de rendre nulles toutes transactions ayant permis d’acheter le bien immobilier londonien, ces irrégularités questionnent sur la responsabilité des deux personnes à la tête de l’institution lors de l’investissement, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège, et le cardinal Angelo Becciu, à l’époque substitut de la première section.
La coopération entre la justice vaticane et italienne pourrait donner une autre dimension à l’action des promoteurs de justice – procureurs du Vatican – dont les moyens sont limités. Elle est facilitée par le fait que le droit du petit État est souvent calqué sur celui de la péninsule.
Les juges de la cité du Vatican sont d’ailleurs souvent d’anciens magistrats de la justice italienne, à l’instar du président du Tribunal de la cité du Vatican, Giuseppe Pignatone, ancien célèbre juge anti-mafia. Une tendance qui semble se renforcer: le 5 février dernier, le pape a nommé la juge italienne Catia Summaria promoteur de justice de la Cour d’Appel de la Cité du Vatican.
Un signe important du rapprochement entre le Saint-Siège et l’Italie sur les questions judiciaires a été donné récemment par la présence du Premier ministre italien Mario Draghi au Vatican lors de la cérémonie d’ouverture de l’année judiciaire du Tribunal du Vatican le 27 mars 2021.
(cath.ch/imedia/cd/gr)
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