La demande d’ouverture des lieux de culte avait été formulée par l’Association nationale des juristes évangéliques (Anajure) et était soutenue par le président Jair Bolsonaro. Le 3 avril, à la veille du dimanche de Pâques, le président d’extrême droite avait même signé un décret permettant la réalisation d’activités religieuses collectives en présentiel. Au grand dam des maires de grandes villes et de gouverneurs de la plupart des 27 Etats du pays, qui vit une situation de pandémie hors de contrôle.
Les sept juges du Tribunal Suprême Fédéral (sur neuf) qui ont voté contre la requête ont d’ailleurs vertement critiqué les positions du président d’extrême droite. « Le Brésil est confronté à une gravissime, alarmante et terrorisante crise sanitaire, a déclaré Cármen Lúcia, l’une des juges du STF, infectée elle-même par le Covid-19 en fin d’année dernière. Interdire la célébration des messes et des cultes ne constitue pas un irrespect à la Constitution. L’inconstitutionnalité est de ne rien faire pour éviter les morts ».
Cette position largement majoritaire a cependant été critiquée par Nuno Marques, l’un des deux juges qui a voté pour l’ouverture des messes et cultes au public. Sans citer d’études ou recherches scientifiques, le juge du STF a néanmoins affirmé : « nous savons que ce virus se transmet dans les fêtes et les bars bondés, sans distanciations sociales ni masques ». « Ce ne sont pas durant les messes et les cultes que la pandémie gagne du terrain ».
Dans un communiqué, l’Association nationale des juristes évangéliques (Anajure) a indiqué respecter la décision du Tribunal Suprême Fédéral et a demandé aux Eglises de se conformer à cette décision. Se félicitant tout de même d’avoir soulevé le débat, l’Anajure, fondée par Damares Regina Alves, avocate, pasteure évangélique et… Ministre de la Femme, de la Famille et des Droits Humains du gouvernement Bolsonaro, espère que « les célébrations en présentiel reprendront dès l’amélioration des taux d’occupation des services de réanimation », qui sont surchargés.
Du côté de la Conférence Nationale des Évêques du Brésil (CNBB), pas de commentaires sur la décision du STF. Mais l’Église catholique brésilienne a marqué dès le début de la pandémie sa détermination à lutter contre la propagation du virus en interdisant la célébration des messes en présentiel et en invitant les prêtres à utiliser les réseaux sociaux pour retransmettre les homélies.
Depuis plus d’un an, la CNBB a d’ailleurs été très critique à l’égard de Jair Bolsonaro, participant même à une demande de destitution contre lui en janvier dernier.
Le Brésil compte une moyenne de plus de 4’000 morts par jour dus au Covid-19 et dépasse désormais les 350’000 décès.
Selon l’Université de Washington, le pays pourrait comptabiliser plus de 100’000 décès au mois d’avril. Face à la lenteur de la campagne de vaccination, la crainte d’une perte de contrôle définitif de la crise sanitaire se rapproche. Plus de 90 nouvelles souches du coronavirus ont ainsi été identifiées et le Brésil est désormais considéré comme « un péril dans la lutte contre l’épidémie, pour l’Amérique latine et le reste du monde ». (cath.ch/jcg/be)
Jean-Claude Gérez
Portail catholique suisse
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