Les grands sites religieux romands face à la pandémie

Comment la pandémie a-t-elle affecté la fréquentation et l’animation musicale des cathédrales et hauts lieux du catholicisme romand? De Fribourg à Sion, survol non exhaustif de certains lieux emblématiques.

Alors qu’en Valais, l’abbaye de Saint-Maurice a rouvert le site patrimonial du Trésor et son exposition temporaire, le 16 mars dernier, l’heure est à un premier bilan de l’impact de la pandémie sur la fréquentation des grands sites catholiques de Suisse romande, non en tant que paroissiens, mais que visiteurs.

À la cathédrale Saint-Nicolas à Fribourg, seuls 9’823 visiteurs ont grimpé en 2020 les escaliers menant à la tour de la cathédrale, contre 18’970 en 2019, selon Cédric Clément, directeur de Fribourg Tourisme et Région, qui chiffre le manque à gagner de cette visite payante à 28’000 francs. Quant à la fréquentation de la cathédrale elle-même, qu’il calcule en estimant que seuls 5% des visiteurs choisissent de visiter la tour, elle a été de 196’460 en 2020, contre 373’000 en 2019. La baisse est donc de plus de 50%.

Ayant le statut de musée, le Trésor de l’Abbaye de Saint-Maurice, avec ici la chasse de Saint-Maurice, a rouvert le 16 mars dernier | © Pierre Pistoletti

Expositions prolongées pour compenser les pertes

En Valais, la Basilique de Saint-Maurice, qui a accueilli en 2019 quelque 130’000 personnes, a vu en 2020 sa fréquentation chuter à 89’000 visiteurs, selon Olivier Roduit, l’économe général de l’Abbaye. Seule bonne nouvelle, la réouverture mardi 16 mars dernier du Trésor de l’abbaye. Sa fréquentation a chuté de 42% en 2020, avec un manque à gagner qui avoisine les 60’000 francs. Pour compenser cette perte, l’Abbaye a donc pris le parti de prolonger jusqu’à la fin décembre son exposition temporaire «Le chanoine Bourban et les premières églises d’Agaune».

À la cathédrale Notre-Dame de Sion, la fréquentation – estimée à 35’000 personnes par an hors pandémie, selon Jean-Marc Jacquod, directeur de l’Office du tourisme du chef-lieu valaisan – a aussi chuté en 2020. La visite de la cathédrale étant gratuite, la seule estimation possible vient des visites guidées que son Office y organise, le long d’un parcours comprenant la cathédrale, l’église Saint-Théodule, ainsi que des vestiges de thermes romains. La baisse constatée, de 60% l’an dernier, se traduit par «un manque à gagner de l’ordre de 27’000 francs.»

La Basilique Notre-Dame de Valère 

Située face au château de Tourbillon, sur une colline dominant la ville de Sion, la Basilique Notre-Dame de Valère, l’ancienne résidence des chanoines du chapitre de la cathédrale, accueille hors pandémie 180 personnes dans le chœur et la nef de la Basilique. En travaux depuis 4 ans, et jusqu’en 2022, «la remise en état du décor peint des murs et du plafond a impliqué une diminution d’un tiers des fréquentations aux cérémonies religieuses», explique son Sacristain, Pierre-Alain Lugon. Depuis le début de la pandémie, la provenance des pèlerins a aussi changé: «Elle est désormais majoritairement suisse, alors qu’en temps normal, ceux-ci viennent du monde entier».

Le Trésor de la Basilique de Valère, qui réunit des pièces rares témoignant de la présence du Chapitre cathédral de Sion depuis 1000 ans, a quant à lui également rouvert ses portes depuis le 1er mars. Le nombre de participants aux visites est passé de 2’679 en 2019 à 1’219 en 2020, indique Pascal Ruedin, directeur des Musées cantonaux. Sachant que le prix de la visite est de 4 francs pour les adultes, le manque à gagner peut être estimé à 5’800 francs.

Animation musicale: l’autre impact de la pandémie

Partout, la situation sanitaire a affecté l’animation musicale de ces lieux emblématiques. À Sion, c’est la fondation Musique sacrée et maitrise de la cathédrale de Sion, qui s’en charge: «Nous y organisons tous les ans en décembre et janvier un Festival d’art sacré, explique Liliane Varone, sa présidente, et pour cette 16èmeédition, qui a été annulée, nous accusons entre 40’000 et 50’000 francs de manque à gagner». Mais pour Liliane Varone, le dommage artistique et moral est plus important que le déficit financier, «car une soixantaine de chanteurs et une vingtaine de musiciens sont à l’arrêt, vu les formules réduites que nous devons appliquer pour l’animation des messes que nous assurons».

La cathédrale St-Nicolas, à Fribourg |© Maurice Page

Hasard du calendrier, la cathédrale de Fribourg a de son côté réussi à tirer son épingle du jeu: «Les concerts du 23ème Festival international d’orgue ont pu s’y dérouler, car la manifestation se tient en septembre. C’était avant le deuxième semi-confinement», raconte Valentine Murith. À la cathédrale, l’animation est par ailleurs assurée par un collège de trois organistes et d’un maître de chapelle, tous salariés par la paroisse: «Vu la formule réduite imposée par les mesures sanitaires d’un organiste et d’un chantre par célébration, cela n’a pas affecté notre budget», explique la présidente du Conseil de paroisse de la cathédrale.

Baisse des dons

Pour celle qui gère les coûts de fonctionnement du bâtiment, l’impact de la pandémie se ressent surtout par la baisse des dons récoltés dans les troncs et caisses d’église, vu la jauge abaissée à 50 fidèles par célébration et l’impossibilité de passer le panier dans les rangs. Si les deux effets cumulés expliquent cette baisse, Valentine Murith la qualifie toutefois de modique, comparée aux frais pour mettre à disposition du gel hydro-alcoolique et engager du personnel pour désinfecter les bancs d’église, qu’elle estime à environ 100’000 francs pour 2020.

Reste que si la pandémie a eu un effet décourageant sur les paroissiens, elle reconnaît que, comparé aux cinémas et aux théâtres, l’Eglise a de la chance de pouvoir continuer à les accueillir. Pour la messe du dimanche de Pâques, elle a même obtenu une dérogation au-delà du traditionnel soliste autorisé jusque-là: «Nous pourrons avoir quatre chanteurs et quatre musiciens, ce qui nous permettra d’avoir une célébration plus festive», se réjouit-elle. (cath.ch/cp)

Carole Pirker

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