Le Saint-Siège, partisan du modèle européen 4/5

À l’occasion du discours au corps diplomatique prononcé le 8 février 2021 par le pape François au Vatican, I.Média revient sur les cinq dossiers qui ont marqué l’année 2020 et devraient continuer à faire l’actualité en 2021. Après la Chine, le Soudan du Sud, et la nouvelle diplomatie de l’eau, décryptage de la politique européenne du Saint-Siège.

En 2020, le Saint-Siège et l’Union européenne ont fêté leur 50 ans de relations diplomatiques. Depuis 1970, un nonce apostolique est en effet accrédité auprès de la communauté européenne. Une reconnaissance légitime, puisque le Vatican a toujours été un des fervents soutiens du projet européen.

François dans cette tradition europhile. Pour contrer «les ombres d’un monde fermé», c’est au «rêve» des Pères fondateurs de l’Union européenne qu’avait spontanément pensé le chef de l’Église catholique dans son encyclique Fratelli tutti, parue en octobre dernier. Et si, déplore-t-il dans ce document, «l’histoire est en train de donner des signes de recul», c’est encore dans son «grand patrimoine culturel et religieux» qu’il considérait que l’Europe devait venir puiser pour assumer son devoir de «responsabilité fraternelle».

L’Europe n’est plus le centre de l’Église universelle

L’importance de l’ancienne «Chrétienté» reste prégnante pour le Saint-Siège, quand bien même le Vatican considère, à l’instar du cardinal Kurt Koch, président du Conseil pontifical pour la promotion de l’unité des chrétiens, qu’elle «n’est plus le centre de l’Église universelle». Malgré cela, l’Europe a encore une mission à porter, considère le pape François. Alors que le Vieux Continent luttait contre la pandémie le 14 avril 2020, le pontife avait eu ces mots lourds de responsabilité: «Aujourd’hui, l’Union européenne fait face au défi du moment dont dépendra, non seulement son avenir, mais celui du monde entier.»

Le pape François avait à l’époque plaidé pour que ne «soit pas perdue l’occasion de donner une nouvelle preuve de solidarité», en rappelant aux origines de l’Union européenne, née du désastre de la Seconde guerre mondiale. Un souhait qu’il avait renouvelé le 29 avril, en la fête de Catherine de Sienne, patronne de l’Europe. Il avait alors prié pour l’unité de l’Europe et de l’Union européenne, condition nécessaire selon lui pour «aller de l’avant, comme frères». 

L’héritage des Pères fondateurs

Dans cette perspective, le pape François n’a d’ailleurs pas manqué de citer l’héritage de Robert Schuman, dont le procès en canonisation est toujours en court. Le 10 mai, à la fenêtre du Palais apostolique, il avait fait de la déclaration Schuman – prononcée 70 ans auparavant – le modèle d’une reconstruction fraternelle de l’Europe après la crise du Covid-19. «Europe, retrouve-toi toi-même!», exhortait-il encore dans une lettre publiée le 27 octobre 2020, soulignant le rôle décisif qu’elle avait de par «sa conception de l’homme et de la réalité».

Dans le sillage de son discours prononcé à Strasbourg en 2014, le pape François n’a pas manqué en 2020 de rappeler à l’Union européenne ses devoirs, à commencer par celui de l’accueil des migrants, lui demandant de trouver le «juste équilibre» entre l’accueil de l’étranger et la protection des droits de ses propres citoyens. De son côté, son administration, par le biais de ses nombreux dicastères, s’active sans relâche pour améliorer le sort des populations immigrées. 

En février 2020, le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Saint-Siège avait ainsi déclaré que la «contribution» des migrants au développement des pays du nord de l’Europe n’avait «pas été pleinement reconnue». Il s’était dit attristé d’observer une Europe selon lui «peu consciente» et «peu active» face à la situation migratoire actuelle. Il avait aussi plaidé pour une révision du Règlement Dublin III, qui oblige le premier pays d’accueil à assumer la responsabilité d’un migrant.

Un rôle central pour l’avenir

Le Saint-Siège, d’un autre côté, ne cesse de mettre en avant les initiatives multilatérales de l’Union européenne, et d’épauler les tentatives de l’organisation pour «harmoniser les différences». S’appuyant constamment sur les liens diplomatiques historiques qui unissent presque tous les pays d’Europe à Rome l’administration pontificale met en avant, dès qu’elle le peut, la dimension européenne dans laquelle s’intègrent ces relations.

Dans son discours du 8 février 2021 au corps diplomatique, c’est encore vers l’Union européenne que le pontife s’est tourné. Même s’il met en avant les périphéries depuis le début de son pontificat, le pape François semble avoir fait de l’Union européenne la clé de la «révolution copernicienne» des relations internationales qu’il entend promouvoir partout dans le monde. (cath.ch/imedia/cd/bh)

Retrouvez le dernier volet de nore série le 19 février: Le Liban, bastion assiégé de la fraternité

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