Pourquoi Alexeï Navalny est-il venu se fourrer à nouveau dans la gueule du loup Poutine, ce 17 janvier? Il y a, dans la volonté de rentrer en Russie de l’opposant numéro un, un courage qui confine au martyre.
Pour un prétexte futile – non-présentation à une convocation judiciaire, alors qu’il était soigné en Allemagne après la tentative d’empoisonnement dont il a été victime -, les autorités russes ont détourné son avion et l’ont arrêté.
Car Navalny, «caillou» gênant dans la chaussure de Poutine, est du genre coriace. Le président russe a tout tenté pour le déstabiliser depuis quelques années: procès, amendes, arrestation et emprisonnement, tentatives d’intimidation, harcèlement de sa famille et de son entourage, interdiction de se présenter à l’élection présidentielle, jusqu’au rocambolesque empoisonnement dont les médecins allemands ont pu mesurer les conséquences.
«En tentant d’éliminer son adversaire, Poutine a franchi une ligne rouge qui rend Navalny encore plus reconnaissable en Russie.»
La pugnacité de ce contradicteur a éclaté plus encore lorsqu’il a piégé les services secrets par une conversation téléphonique qui a confirmé la tentative d’empoisonnement.
En tentant d’éliminer son adversaire, Poutine a franchi une ligne rouge qui rend Navalny encore plus reconnaissable en Russie et plus important pour l’Occident, l’Union européenne en particulier. Ce dernier, résolu à lutter contre la corruption en Russie, ne baisse pas les bras.
Alors que le président russe a confirmé son emprise sur le pays, en ouvrant la voie à son maintien au pouvoir jusqu’en 2036, Navalny incarne l’obstacle perpétuel que rien ne semble décourager. Son combat pour la démocratie dans un pays habitué aux régimes autoritaires allie une forme d’esprit chevaleresque à une détermination sans faille. Successeur dans l’opposition à Poutine de Mikhaïl Khodorkovski – en exil depuis 2015 –, Navalny révèle au grand jour l’arbitraire du pouvoir en place à Moscou.
En ce sens, après l’affaire de la Crimée, il est un révélateur dont l’Occident mesure la portée, effrayante. Quand la Russie sera-t-elle vraiment un régime démocratique?
Bernard Litzler | Lundi 18 janvier 2021
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