Dans son édition du 9 janvier 2021, le quotidien italien Domani fait état d’une lettre de mars 2019 que le cardinal Pietro Parolin, numéro deux du Saint-Siège, a adressée au président de l’Institut des œuvres de religion (IOR), Jean-Baptiste de Franssu. Dans ce courrier, il aurait demandé à la banque privée du Vatican un prêt de 150 millions d’euros pour procéder à l’acquisition de l’immeuble de Sloane Avenue, à Londres. Ce sont les interrogations suscitées par cette demande inhabituelle qui seraient à l’origine de la révélation du scandale financier en octobre 2019.
En juin 2019, le substitut de la Secrétairerie d’Etat, Mgr Edgar Peña Parra, nommé en remplacement du cardinal Angelo Becciu, adresse officiellement à l’IOR une demande de prêt de 150 millions d’euros pour «raisons institutionnelles». Il ne précise cependant pas à son interlocuteur que la somme doit permettre de rembourser un prêt trop onéreux contracté par la Secrétairerie d’Etat auprès de Cheyne Capital afin sécuriser l’acquisition du désormais célèbre immeuble. Cependant, les révélations du quotidien Domani laissent à penser qu’une première demande avait été émise auparavant.
Le rôle du cardinal Parolin dans cette affaire dite de «l’immeuble londonien» serait en effet plus important que ce qui a été rapporté jusqu’alors. L’Italien aurait directement demandé à l’IOR un prêt dans une lettre envoyée dès le 4 mars 2019 au président de l’institution, Jean-Baptiste de Franssu. Il serait ainsi le premier à demander le «refinancement» de 150 millions d’euros nécessaires pour colmater les pertes déjà engendrées par des manipulations opaques visant à acquérir le bâtiment de Sloane Avenue. Le haut prélat, dans ce courrier, insiste de plus sur le fait que sa demande concerne des «investissements valables» qui répondent «aux besoins supérieurs du Saint-Siège».
Le cardinal italien, dans la lettre, déclare aussi qu’il faut protéger «a confidentialité» de l’investissement. A l’époque, la direction de l’IOR ne manque d’alerter l’Autorité d’information financière (renommée en décembre 2020 Autorité de surveillance et d’information financière, ASIF, ndlr), l’organisme de lutte contre le blanchiment d’argent en charge de contrôler l’IOR, affirme Domani.
Cependant, René Brülhart, directeur de l’AIF, licencié depuis, autorise finalement le prêt. L’opération est sur le point d’être effectuée, avant que Gianfranco Mammi, directeur de l’IOR, décide in extremis de porter l’affaire devant la justice vaticane le 1er juillet 2019, arguant de «l’opacité» de l’opération menée par la Secrétairerie d’État.
Si ces révélations s’avèrent fondées, la responsabilité du cardinal Parolin, alors supérieur direct des deux substituts de la Secrétairerie d’Etat concernés par l’opération – le cardinal Becciu et Mgr Peña Parra – serait clairement engagée. Cela expliquerait notamment pourquoi, depuis plusieurs mois, le pape François a considérablement diminué les prérogatives de la Secrétairerie d’État du Saint-Siège en manière économique, et donc affaibli l’influence du cardinal Parolin. Le «numéro deux» du pape a notamment été écarté de la commission cardinalice de l’IOR en septembre 2020, une première pour un secrétaire d’État.
Son dicastère a été grandement réformé par le Motu proprio du 28 décembre dernier qui transférait la plupart des pouvoirs financiers et de contrôle de la Secrétaire d’État à l’APSA et au Secrétariat pour l’économie. Les seuls fonds encore administrés par l’organe central du Saint-Siège – «les fonds réservés» – sont en outre depuis octobre 2020 sous le contrôle d’une commission de cardinaux et d’experts. (cath.ch/imedia/cd/cp)
I.MEDIA
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/scandale-financier-le-cardinal-parolin-responsable/