Vatican: la crèche «horribilis» 2020

La crèche en céramique des Abruzzes (Italie), dévoilée le 11 décembre 2020 place Saint-Pierre, n’en finit pas de faire des vagues. Des internautes se déchaînant sur les réseaux sociaux, et des visiteurs ne cachant pas leur déception, ont fraichement accueilli la crèche 2020 du Vatican.

«Totems païens», «playmobils géants»,  «Dark Vador» ou encore «Santorian» (un personnage de la série ›Docteur Who’). Les comparaisons peu amènes qu’ont fait les fidèles à propos des personnages de la crèche de Noël du Vatican, reflètent la vague d’indignation qui déferle sur les réseaux sociaux à propos de la crèche d’un style plutôt extravagant.

Sur la place Saint-Pierre, la crèche a également été fraichement accueillie: «Je n’ai pas du tout aimé, ça n’a rien à voir avec le christianisme», explique une visiteuse tandis qu’un autre s’attendait à «quelque chose de plus majestueux». Inspirés de momies égyptiennes, les personnages cylindriques en céramique et de deux mètres de haut, peu expressifs, parmi lesquels figurent un drôle de guerrier et même un cosmonaute ont provoqué «la honte» de certains fidèles.

«Une crèche horrible»

Le journaliste et spécialiste du Vatican Aldo Marria Valli ne mâche pas ces mots en évoquant, «une crèche horrible, qui fait peur et fera certainement pleurer les enfants». Face à tout ce tumulte, le pape semble bien seul en affirmant que «Jamais comme cette année, l’arbre et la crèche contribuent à créer l’atmosphère de Noël favorable pour vivre avec foi le mystère de la nature du Christ».

Sur le site anglais Catholic Herald, l’historienne de l’art Elizabeth Lev tente une explication en indiquant qu’à la fin de cette année «les gens cherchent la beauté, quelque chose pour les élever, les inspirer, les unir, et la scène offerte sur la place Saint-Pierre leur donne quelque chose d’autre. Les personnages difformes de la crèche n’ont pas toute la grâce, la proportion, la vulnérabilité et la luminosité que l’on cherche dans la crèche».

Un cosmonaute et un guerrier parmi les personnages exposés place Saint-Pierre | Tweeter.

Cette crèche qui fait tant polémique n’est pourtant pas le fruit de l’imagination d’un créateur moderne et excentrique. Elle provient en effet de Castelli, village d’un millier d’habitants situé sur les pentes du massif du Gran Sasso, dans le centre de l’Italie. La céramique est une spécialité de ce village depuis le 16e siècle.

Seuls quelques-uns des 54 santons de céramique de cette crèche monumentale sont exposés sur la Place Saint-Pierre. Ils ont été créés et fabriqués dnas les années 1960 par les élèves et les professeurs de l’Institut d’Art «F.A. Grue», spécialisé dans la réalisation d’œuvres liées au thème de Noël.

Références à l’art sumérien

On y trouve bien sûr la Sainte Famille, les rois mages, un ange aux ailes déployées, mais aussi un joueur de cornemuse, un autre de flûte de pan, une bergère à la cruche, une fillette et sa poupée. «Les statues ont été réalisées avec des modules annulaires qui, superposés, forment des bustes cylindriques», précise le communiqué du Vatican qui évoque l’aspect contemporain de ces réalisations, avec des références à des arts plus anciens – sumérien et égyptien par exemple. Le cosmonaute est ainsi une référence à la conquête de la Lune.

La première exposition publique de cette représentation de la Nativité a eu lieu à Castelli, sur le parvis de l’église du village en décembre 1965, puis, pour Noël 1970, une crèche fut exposée sur les marchés de Trajan à Rome et, quelques années plus tard, à Jérusalem, à Bethléem et à Tel-Aviv.

Sans doute le contexte de pandémie de l’année qui s’achève a-t-il mis les nerfs à rude épreuve. Une déception à laquelle s’ajoute le contraste saisissant avec la crèche de 2019. En bois sculpté, très classique, elle avait demandé aux artisans des centaines d’heures de travail et avait reçu un accueil enthousiaste.

Un travail rendu impossible cette année pour cause de crise sanitaire. Le Vatican a donc choisi une œuvre déjà sculptée dans les années 70. Un style sans doute un peu trop décalé 50 ans plus tard. (cath.ch/ag/bh)

Bernard Hallet

Portail catholique suisse

https://www.cath.ch/newsf/vatican-la-creche-horribilis-2020/