Fribourg: l’évêché passe en mode «Laudato si’»

L’évêché de Fribourg, siège du diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg (LGF), publie, le 8 décembre 2020, son bilan carbone sur l’ensemble de l’année 2019. Cette étude, réalisée par l’entreprise «Climate Services», a été demandée dans le souci de réduire les émissions de CO2 générées par l’activité de l’évêché. Werner Halter, fondateur de «Climate Services», détaille la méthode de travail.

«Le bilan carbone n’est pas une finalité en soi. C’est un point de départ», explique Werner Halter, fondateur de Climate Services, l’entreprise qui a réalisé le bilan carbone de l’évêché du diocèse de Lausanne Genève et Fribourg (LGF). L’étude donne en effet un bilan à partir duquel l’équipe de l’évêché va pouvoir travailler pour réduire ses émissions de CO2.

Un bilan honorable

Le siège épiscopal s’en sort avec un bilan plutôt honorable de 45 tonnes de CO2 (tCO2) émises pour 21 collaborateurs (14 ept), soit 2,1 tCo2 par collaborateurs (voie encadré ci-dessous). «On ne peut pas situer l’évêché dans un classement général. La comparaison dans ce domaine est difficile car chaque entreprise a ses problématiques propres», indique Werner Halter. En effet, en terme de mobilité, le bilan est excellent avec seulement 3,5% tCO2. «Un résultat qui surclasse celui de nombreuses entreprises», précise Werner Walter.

Mgr Morerod voyage en train ou à vélo dans la mesure du possible. Il a d’ailleurs parcouru près de 27’000 km en train et environ 7’000 en voiture durant l’année 2019. De plus, sur les 21 collaborateurs, 6 seulement se rendent en voiture sur leur lieu de travail, détaille l’évêché.

Le point noir demeure le chauffage au gaz qui représente à lui seul 80% des émissions de CO2. Améliorer la performance sera difficile. Le bâtiment est ancien et n’est pas situé dans le périmètre raccordable au chauffage à distance de la ville de Fribourg. Les marges d’amélioration sont donc très réduites. Le bâtiment, classé au patrimoine, ne peut pas être modifié pour une amélioration.  

Bilan complet

Mobilité, consommation énergétique (chauffage et électricité), consommation d’eau, recyclage des déchets, les éventuels services externalisés, la bureautique, (jusqu’aux cartouches de tonner de la photocopieuse), etc. tout a été passé au peigne fin et intégré au bilan. Le mode de construction des locaux de l’entreprise est aussi une donnée intégrée au bilan. «Impossible à faire dans le cas de l’évêché, un bâtiment trop ancien pour lequel on manque de données».

«Je me suis rendu sur place pour comprendre l’activité et obtenir des explications sur les sources de CO2, puis j’ai fourni un questionnaire à tous les collaborateurs de l’évêché». Le bilan, rendu à Mgr Charles Morerod, évêque de LGF, début juillet 2020, a nécessité quatre mois de travail.

Le document est un outil que l’entreprise a développé avec l’École d’ingénieur et d’architecture de Fribourg», précise le fondateur de Climate Services.

Tous les éléments sont pris en compte et convertis en équivalent carbone en utilisant des bases de données fournies par la Confédération, notamment l’office fédéral de l’environnement.

Un client inattendu

«Avoir l’évêché comme client était plutôt une surprise», sourit Werner Halter. Il a eu à faire à tous les types d’entreprises, des PME les plus modestes au géant énergétique «Groupe E», des hautes écoles ou encore la Banque cantonale de Fribourg. Quant à la prise de conscience de la crise climatique, il pense que l’encyclique du pape François Laudato si’ a joué un rôle non négligeable.

Autant l’acceptation d’une crise climatique a été longue, autant il a observé une accélération, particulièrement en 2019. «En effet, les grèves du climat et les manifestations au printemps et à l’été 2019 ont renforcé la prise de conscience. Le nombre de demandes de bilan carbone a augmenté à cette période». Malheureusement, la pandémie a relayé la transition écologique au dernier rang des préoccupations des entreprise.

La question climatique politisée

Que ce soit du point de vue scientifique ou ecclésial, la finalité reste la même, estime Werner Halter. Il s’agit de revenir à des valeurs antérieures, d’une consommation raisonnée, à l’oposé du «tout, tout de suite». Il déplore que le message scientifique ait eu autant de mal à passer dans l’opinion. «Il n’a pas été déclencheur d’une prise de conscience. L’alerte a été difficile à faire entendre». En effet, la question climatique a été d’abord politisée.

Il évoque un clivage opposant la gauche et les verts d’une part et la droite et les milieux économiques d’autre part. «Cela s’est résumé à une opposition idéologique, au-delà des faits et des chiffres pourtant flagrants d’un dérèglement climatique: on croyait ou pas à l’urgence climatique. On a perdu beaucoup de temps». Les scientifiques n’ont pas été écoutés.

Malgré le bon résultat de l’évêché sur la mobilité, on est très loin des objectifs fixés à l’horizon 2050. «Actuellement la Suisse se situe à 5 tCo2. Nous devrons atteindre 2 tCO2. Nous devons réduire nos émission carbone de 95%pour la mobilité en 2050», prévient le spécialiste fribourgeois. (cath.ch/bh)

Bernard Hallet

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