La liturgie de la Toussaint est centrée sur le récit des béatitudes. Sur la montagne, Jésus adresse à la foule neuf paroles qui commencent toutes par le mot ‘heureux’. Pour le pape François, «la sainteté est le plus beau visage de l’Eglise». Dans son exhortation apostolique Gaudete et Exsultate (Réjouissez-vous et exultez de joie!), publiée en 2018, il rappelle que «Dieu veut que nous soyons saints et il n’attend pas de nous que nous nous contentions d’une existence médiocre, édulcorée, sans consistance»(1).
La sainteté selon le pape François n’est pas un idéal inaccessible et désincarné, mais un chemin concret qui invite à avancer, en affrontant la complexité de la réalité avec ses défis et ses opportunités. «J’aime voir la sainteté dans le patient peuple de Dieu: chez ces parents qui éduquent avec tant d’amour leurs enfants, chez ces hommes et ces femmes qui travaillent pour apporter le pain à la maison, chez les malades, chez les religieuses âgées qui continuent de sourire. Dans cette constance à aller de l’avant chaque jour, je vois la sainteté de l’Eglise militante. C’est cela, souvent, la sainteté «de la porte d’à côté», de ceux qui vivent proches de nous et sont un reflet de la présence de Dieu.»(7)
Pour le pape, rien n’est plus éclairant que de revenir aux paroles de Jésus qui a expliqué avec grande simplicité ce que veut dire être saint, dans le récit des béatitudes. «Elles sont comme la carte d’identité du chrétien.»(63)
« Heureux les pauvres en esprit, car le Royaume des cieux est à eux ».
«Les richesses ne te garantissent rien. Qui plus est, quand le cœur se sent riche, il est tellement satisfait de lui-même qu’il n’y a plus de place pour la Parole de Dieu, pour aimer les frères ni pour jouir des choses les plus importantes de la vie.» (68)
« Heureux les doux, car ils posséderont la terre ».
«Si nous vivons tendus, prétentieux face aux autres, nous finissons par être fatigués et épuisés. Mais si nous regardons leurs limites et leurs défauts avec tendresse et douceur, sans nous sentir meilleurs qu’eux, nous pouvons les aider et nous évitons d’user nos énergies en lamentations inutiles.» (69)
« Heureux les affligés, car ils seront consolés »
«Le monde nous propose le contraire: le divertissement, la jouissance, le loisir, la diversion, et il nous dit que c’est cela qui fait la bonne vie. L’homme mondain ignore, détourne le regard quand il y a des problèmes de maladie ou de souffrance dans sa famille ou autour de lui. Le monde ne veut pas pleurer: il préfère ignorer les situations douloureuses, les dissimuler, les cacher. (75)
« Heureux les affamés et les assoiffés de la justice, car ils seront rassasiés »
››Avoir faim et soif’’ sont des expériences très intenses, parce qu’elles répondent à des besoins vitaux et sont liées à l’instinct de survie. Il y a des gens qui avec cette même intensité aspirent à la justice et la recherchent avec un désir vraiment ardent.» (77)
«Une telle justice commence à devenir réalité dans la vie de chacun lorsque l’on est juste dans ses propres décisions, et elle se manifeste ensuite, quand on recherche la justice pour les pauvres et les faibles. (79)
« Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde ».
«La miséricorde a deux aspects : elle consiste à donner, à aider, à servir les autres, et aussi à pardonner, à comprendre.» (80)
« Heureux les cœurs purs, car ils verront Dieu ».
«Cette béatitude concerne les personnes qui ont un cœur simple, pur, sans souillure, car un cœur qui sait aimer ne laisse pas entrer dans sa vie ce qui porte atteinte à cet amour, ce qui le fragilise ou ce qui le met en danger.» (83)
« Heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu ».
«Il n’est pas facile de bâtir cette paix évangélique qui n’exclut personne mais qui inclut également ceux qui sont un peu étranges, les personnes difficiles et compliquées, ceux qui réclament de l’attention, ceux qui sont différents, ceux qui sont malmenés par la vie, ceux qui ont d’autres intérêts.» (89)
« Heureux les persécutés pour la justice, car le Royaume des cieux est à eux ».
«Pour vivre l’Évangile, on ne peut pas s’attendre à ce que tout autour de nous soit favorable, parce que souvent les ambitions du pouvoir et les intérêts mondains jouent contre nous.» (91)
«Un saint n’est pas quelqu’un de bizarre, de distant, qui se rend insupportable par sa vanité, sa négativité et ses rancœurs», explique encore le pape François. «Le saint est capable de vivre joyeux et avec le sens de l’humour. Tout en demeurant réaliste, il éclaire les autres avec un esprit positif et rempli d’espérance.» (122)
«Je ne crois pas dans la sainteté sans prière, bien qu’il ne s’agisse pas nécessairement de longs moments ou de sentiments intenses.» (147) «J’ose donc te demander: Y a-t-il des moments où tu te mets en sa présence en silence, où tu restes avec lui sans hâte, et tu te laisses regarder par lui? Est-ce que tu laisses son feu embraser ton cœur? Si tu ne lui permets pas d’alimenter la chaleur de son amour et de sa tendresse, tu n’auras pas de feu, et ainsi comment pourras-tu enflammer le cœur des autres par ton témoignage et par tes paroles?» (151)
«Notre chemin vers la sainteté est aussi une lutte constante (162) rappelle enfin le pape. « La vie chrétienne est un combat permanent. Il faut de la force et du courage pour résister aux tentations du diable et annoncer l’Evangile.» (cath.ch/mp)
Honorer tous les saints ensemble
Fénelon (1651-1715) homme d’Eglise, théologien et pédagogue français méditait ainsi sur la fête de la Toussaint:
«L’intention de l’Eglise est d’honorer aujourd’hui tous les Saints ensemble. Je les aime, je les invoque, je m’unis à eux, je joins ma voix aux leurs pour louer Celui qui les a faits saints. […]
Je vois des saints de tous les âges, de tous les tempéraments, de toutes les conditions : il n’y a donc ni âge, ni tempérament, ni condition qui excluent de la sainteté. Ils ont eu au dehors les mêmes obstacles, les mêmes combats que nous : ils ont eu au dedans les mêmes répugnances, les mêmes sensibilités, les mêmes tentations, les mêmes révoltes de la nature corrompue ; ils ont eu des habitudes tyranniques à détruire, des rechutes à réparer, des illusions à craindre, des relâchements flatteurs à rejeter, des prétextes plausibles à surmonter, des amis à redouter, des ennemis à aimer, un orgueil à saper par le fondement, une humeur à réprimer, un amour-propre à poursuivre sans relâche, jusque dans les derniers replis du cœur.»
Maurice Page
Portail catholique suisse
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