Cette première du genre ouvre une brèche dans les relations interreligieuses au Sénégal. Le pays possède en effett une longue tradition de cohabitation pacifique entre les différentes religions et de modèle de dialogue interreligieux.
«On dit qu’il y a 95% de musulmans au Sénégal. C’est donc 5% de cette population (les chrétiens ndlr) qui ont réussi à légaliser l’alcool, l’adultère, l’homosexualité, l’usure, la danse», avait déclaré en mai 2018, l’imam Ousmane Guéladio Kâ, lors d’une conférence publique à Gorée. Considéré comme intégriste, l’imam Kâ dirige une mosquée aux ‘Parcelles assainies, un quartier populaire de plus de 160’000 habitants, au nord de la ville de Dakar.
Interrogé par le correspondant de cath.ch, Ephrem Manga, coordonnateur de la coalition a indiqué qu’il y a 75 plaintes individuelles, et une plainte collective avec plus de 2’000 signatures, recueillies lors d’une campagne sur les réseaux sociaux. «Ce n’est pas une attaque contre une religion, mais contre un individu, un citoyen. A travers ses propos, nous nous sommes sentis offensés et avons saisi la justice parce qu’il nous a fait du tort», a-t-il souligné.
Cette affaire qui sera jugée le 12 novembre prochain, rappelle un autre incident visant ls chrétiens, qui a lieu fin juillet dans le pays. Dans une interview à site d’information en ligne, le président d’une Organisation non gouvernementale islamiste, «Jamra», Mame Makhtar Guèye, s’était offusqué qu’une actrice d’une série télévisée locale porte le nom de Mame Diarra au lieu d’un nom chrétien, comme Marie. Au Sénégal, Mame Diarra est le nom de la mère de Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur de la puissante confrérie des mourides. Ce nom est très respecté.
Face à la réaction générale de chrétiens et de musulmans, Guèye s’est rétracté et présenté ses excuses aux chrétiens.
D’autres incidents ont marqué, les relations islamo-chrétiennes ces dernières années. En 2019, l’un a porté sur l’interdiction du port du voile islamique dans une école confessionnelle de Dakar . L’autre, une affaire de licenciement d’employés d’une pharmacie à Dakar. Les deux employés remerciés s’étaient alors déclarés victimes de discrimination religieuse, car ayant été licencié pour avoir prié sur leur lieu de travail.
Ces incidents illustrent la montée de l’intolérance religieuse au Sénégal, amenant le quotidien En Quête, à constater que la «la cohabitation religieuse va mal» dans le pays. «Les escarmouches et autres signes de la crise du vivre-ensemble sénégalais se multiplient non seulement entre musulmans de même bord, mais aussi entre musulmans et chrétiens, entre musulmans d’une même confrèrie, entre musulmans de même obédience», s’inquiétait déjà, en octobre 2019, une organisation musulmane intégriste, «Le Cadre unitaire de l’Islam au Sénégal». Elle alertait sur les menaces sur ce vivre-ensemble sénégalais, qui est jusqu’ici «une réputation mondiale de solidité et de résilience». (cath.ch/ibc/mp)
Ibrahima Cisse
Portail catholique suisse
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