«Quand l’ordre est venu de fermer les églises, durant le confinement, j’ai vu des personnes pleurer à l’extérieur de la basilique», assure Silvia Kimmeier, présidente du Conseil de la paroisse lausannoise. Il faut dire que la paroisse Notre-Dame paraît faire mentir l’adage selon lequel la foi ne fait plus recette. La basilique Notre-Dame de l’Assomption est en effet le lieu d’une intense ferveur et pratique religieuse. Plus de 250 personnes, en moyenne, y passent chaque jour. L’offre liturgique et pastorale est impressionnante. Plus de 23 messes sont célébrées dans la basilique de façon hebdomadaire, en français, mais aussi en italien, en portugais et en tamoul. L’adoration a lieu tous les jours, et des Vendredis de la Miséricorde sont désormais proposés chaque semaine. «Nous avons chaque jour de nombreuses confessions», indique encore François Dupraz, le curé de Notre-Dame.
Cette offre liturgique et pastorale importante résulte d’une volonté de l’Eglise catholique dans le canton de Vaud (ECVD) de fournir une équipe de prêtres suffisante, explique Jean-Daniel Richard, président du Conseil pastoral. Le but étant de garder au maximum oxygéné ce poumon spirituel de la région.
L’attractivité de Notre-Dame s’explique en partie par son histoire, note Silvia Kimmeier. En effet, la basilique a été la première église catholique érigée après l’arrivée de la Réforme dans le canton de Vaud, au 16e siècle. Une première paroisse, sans édifice, a été fondée à Lausanne au début du 19e siècle. La basilique Notre-Dame a été inaugurée en 1835.
Cette renaissance en terre devenue protestante, pour des catholiques qui ont longtemps été «bridés», explique certainement en partie la force d’une piété populaire, liée au culte marial dans la ville. Dans une Lausanne habituée de longue date à l’immigration, notamment des catholiques d’Europe du Sud, Notre-Dame a joué le rôle d’Eglise «refuge», «d’accueil», une «mère» vers laquelle ces personnes déracinées se sont tournées, souligne la présidente du Conseil de paroisse.
La multiculturalité est ainsi un aspect «traditionnel» de Notre-Dame, même si cela est actuellement le cas dans de nombreuses paroisses de Suisse romande. La première messe en italien y a été entendue dès les années 1950. Des catholiques du monde entier s’y côtoient en harmonie.
L’attractivité de Notre-Dame se reflète également dans le fait que beaucoup de personnes engagées (près de 80%) proviennent de l’extérieur de la paroisse. Le sanctuaire marial voit en outre passer des personnes visiblement non chrétiennes. «C’est un lieu de paix et de vénération qui rayonne au-delà de la sphère catholique», commente Silvia Kimmeier.
Une affection qui paraît pourtant contredite par les chiffres, puisque le nombre de catholiques officiellement recensés dans la paroisse ne cesse de régresser, jusqu’à environ 6’000 aujourd’hui. Un phénomène qui ne refléterait pas la réalité, selon Jean-Daniel Richard. Simplement parce que, depuis quelques années, protection des données oblige, les nouveaux arrivants dans les communes du canton de Vaud ne doivent plus indiquer leur confession. «Ce qu’on peut constater, c’est que l’église n’est en tout cas jamais vide», se réjouit l’abbé Dupraz.
Au-delà des anciennes tensions avec la communauté protestante, un esprit de collaboration préside maintenant dans les relations avec les réformés de la ville. De nombreuses activités, telles que l’éveil à la foi, se déroulent ainsi de manière œcuménique. La nuit de Pâques, une partie de la liturgie est partagée avec les réformés. Le centre d’accueil «Point d’appui» est également géré par les deux Eglises.
A l’instar de nombreuses mères, Notre-Dame offre sa tendresse et ses soins de multiples façons. La tradition d’entraide de la paroisse remonte ainsi à très loin. Elle va de pair avec la présence ancienne de la vie consacrée dans ce secteur de Lausanne. Aujourd’hui, cet aspect se concrétise notamment à travers un groupe d’entraide récemment repris par les Sœurs de St-Maurice.
La vie consacrée a également apporté une force d’éducation catholique importante dès le début du 19e siècle. La librairie Le Valentin, située «au socle» du grand emmarchement de la basilique, y contribue aujourd’hui de façon importante par son offre de grande qualité, ses conférences et ses cours de philosophie, souligne Silvia Kimmeier. Le loyer du magasin est assuré par plusieurs paroisses lausannoises et des particuliers.
Des atouts d’évangélisation dans la droite ligne de la baronne Marie-Eléonore d’Olcah (1754-1815), cheville ouvrière de la reconnaissance de la communauté catholique à Lausanne. Cette réfugiée de la Révolution française, connue pour être «audacieuse et prophétique», voulait faire de la capitale vaudoise un important lieu de la foi catholique.
Une flamme gardée aujourd’hui encore vive aussi grâce à l’offre contemplative de la paroisse. Un aspect auquel l’abbé Dupraz tient beaucoup. «Lorsque dans une paroisse la dimension contemplative est développée, les personnes commencent à revenir à l’église, j’ai pu le voir dans de nombreux endroits», assure-t-il.
Les responsables de la paroisse se réjouissent en tout cas de la ferveur et de la dévotion qui attirent tant de fidèles vers le cœur de Notre-Dame. «Nous avons ici une grâce», assure le curé modérateur. Ils espèrent en tout cas que la paroisse continuera d’être une maman qui rassemble ses enfants, les soutient, les inspire et les fait grandir sous le regard de Dieu. (cath.ch/rz)
Richesse architecturale
Notre-Dame de Lausanne n’est pas non plus le style de mère «qui se laisse aller». C’est ainsi que la basilique du Valentin prend soin de sa beauté. Son clocher a été réparé en 2006 et l’enveloppe extérieure rafraîchie en 2011. Le projet actuel de rénovation vise la restauration intérieure et le réaménagement de la cour. Destiné à «assurer à la paroisse des revenus complémentaires», un nouvel immeuble d’habitation est également prévu à côté de la salle paroissiale.
Un projet de recherche du Fonds national suisse (FNS), mené durant l’été 2020, tente de percer les secrets de la fresque peinte en 1935 par Gino Severini à l’intérieur de la basilique.
À l’occasion de la conclusion des travaux à la Basilique Notre-Dame et de leur présentation au public, Hautes Fréquences (RTS-La Première) a dédié l’émission du 20 septembre 2020 à ce projet de recherche mené par la Scuola universitaria professionale della Svizzera italiana (SUPSI). RZ
Raphaël Zbinden
Portail catholique suisse
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