Dans ce livre d’entretiens publié en Italie le 9 septembre 2020 à l’issue d’entretiens avec l’écrivain et activiste écologiste Carlo Petrini, créateur de Slow Food, un mouvement anti fast-food, le pape François dessine les contours d’une fraternité avec les non-croyants.
Le pontife argentin appelle en effet le chrétien à nourrir une discussion fraternelle avec «l’agnostique pieux», à défaut de «l’athée dévot». C’est ce qu’a expliqué le 8 septembre 2020 le Père Antonio Spadaro, directeur de la revue jésuite italienne Civiltà Cattolica lors d’une conférence de présentation de ce livre d’entretiens entre le pape et le journaliste non-croyant.
Carlo Petrini a souhaité insister sur la position singulière du pontife en ce qui concerne la «biodiversité culturelle». Accompagné lors de la présentation par Mgr Domenico Pompili, évêque de Rieti, en Italie, et préfacier de l’ouvrage, ainsi que du Père Spadaro, l’auteur est revenu sur l’importance accordée par le pontife à la «fraternité humaine» et à l’»amitié sociale».
Pour le directeur de la Civiltà Cattolica, ce livre est une «bonne introduction à la lecture de ce qui sera la troisième encyclique du pape». Le dialogue interreligieux que devrait prôner le pontife dans «Tous Frères», l’encyclique qu’il signera le 3 octobre 2020 à Assise, concerne «l’agnostique pieux», le non-croyant qui souhaite échanger avec le croyant, et qu’il faut distinguer de l’»athée dévot», celui qui ne croit pas dogmatiquement à l’existence d’un Dieu et refuse la discussion.
Le pape insiste sur la nécessité d’un «dialogue comme méthode», affirme le Père Spadaro, et ce au sein de l’Eglise catholique comme entre les différentes spiritualités. Dans les entretiens, rapporte pour sa part l’auteur, le pontife salue les initiatives de «synodalité civile» et invite à construire un dialogue entre croyants et non-croyants.
«La véritable laïcité est humaniste», a confié François au fondateur de Slow Food. Il a déploré la conception héritée des Lumières de «deux mondes parallèles» irréconciliables de la foi et de la raison.
Dès 2015, a rappelé le Père Spadaro, le pontife insiste sur l’importance de la «fraternité humaine», dans son discours aux jeunes du centre culturel Père Félix Varela, lors de son voyage à Cuba. Il raconte que, alors qu’un curé de Buenos Aires lui présentait un groupe de jeunes étudiants universitaires en train de construire des locaux paroissiaux – «voici l’architecte, il est juif, voici le communiste, voici le catholique pratiquant, voici… " -, il avait fait le constat suivant: «Ils étaient tous différents, mais ils travaillaient tous ensemble pour le bien commun.
C’est ce qu’on appelle l’amitié sociale, la recherche du bien commun. L’inimitié sociale détruit. Et une famille est détruite par l’inimitié. Un pays est détruit par l’inimitié. Le monde est détruit par l’inimitié. Et la plus grande inimitié est la guerre! "
L’initiative du pape s’inscrit, d’après le journaliste italien, dans la tendance de la «théologie de la libération», à laquelle il préfère le nom de «théologie du peuple». Il s’agit avant tout de favoriser le partage entre les «savoirs traditionnels» et les «savoirs académiques» qui ont tous deux beaucoup à s’apporter.
«L’Eglise a avancé grâce aux larmes, aux bonds», écrit le pontife argentin dans TerraFutura. Pour cette raison, poursuit le Père Spadaro, «il faut enflammer les discussions» afin que de nouveaux pas soient faits dans la direction de la fraternité humaine.
Carlo Petrini est le fondateur du mouvement mondial Slow Food, qui a été créé dans les années 1980 pour sauvegarder les traditions culinaires régionales face au fast food, tendance consumériste alors en pleine expansion.
Le livre est organisé autour de cinq thèmes: la biodiversité, l’économie, les migrations, l’éducation et la communauté, tous considérés dans une perspective concrète et spirituelle. Il s’agit d’une invitation urgente à «renouer» avec la planète et ses peuples, conformément à l’enseignement du pape François. (cath.ch/vaticannews/imedia/cd/be)
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