Barbara Ludwig, kath.ch/traduction et adaptation: Davide Pesenti
Une nouvelle ère a débuté au prieuré de Saint-Gérold. Après 11 ans sous la direction du Père Kolumban Reichlin, le centre de spiritualité, de formation et de culture situé dans le Vorarlberg, près de la frontière helvétique, sera guidé par le bénédictin suisse Martin Werlen.
Unique moine résidant à Saint-Gerold, Martin Werlen ne sera toutefois pas seul à gérer ce centre spirituel. «Je chapeaute un groupe de trois personnes qui dirige ensemble le centre. Car le travail en équipe est très important pour moi personnellement, déclare l’ancien Père-Abbé qui a dû prendre congé de ses confrères d’Einsiedeln.
La prière m’aidera à structurer ma nouvelle vie quotidienne.
Même s’il travaillera désormais pour la communauté de Saint-Gerold, il se sent toujours lié à Einsiedeln, notamment dans ses prières.
«Bien sûr, le rythme ici n’est pas aussi fortement prescrit qu’à Einsiedeln. Il s’agit de trouver soi-même, déclare-t-il. Les heures de prière m’aideront également à structurer ma nouvelle vie quotidienne. De plus, il y a toujours des confrères qui passent ici leurs vacances ou donnent des cours. Il y a aussi deux confrères qui ont des responsabilités pastorales dans la région et que j’accueille régulièrement».
Le changement dans l’équipe de direction vise à donner un nouvel élan à ce lieu de ressourcement autrichien.
En premier lieu, nous voulons identifier les domaines où des réformes sont urgentes.
«Saint-Gerold est important pour l’abbaye d’Einsiedeln, à laquelle le prieuré est lié dès sa fondation, au 14e siècle», explique l’ancien Père-Abbé. «Mon prédécesseur a accompli beaucoup de choses en onze ans, aussi en ce qui concerne l’infrastructure, note le nouveau responsable. Dernièrement, il s’est rendu compte que ses forces faiblissaient et qu’un changement faisait sens. J’ai donc accepté avec plaisir la proposition de notre Père-Abbé Urban Federer d’assumer cette nouvelle responsabilité».
À travers les offres de ce centre de spiritualité, d’éducation et de culture, Martin Werlen entend cheminer avec chacun. Car cette maison de formation est une grande opportunité pour les bénédictins. Elle permet notamment d’aller à la rencontre et d’accueillir des personnes qu’ils ne pourraient pas atteindre si facilement dans les préalpes schwytzoises.
«La plupart des personnes qui viennent à Einsiedeln sont des pèlerins. Ils visitent l’abbaye, mais n’y restent pas, précise le moine de 58 ans. Il y a relativement peu d’hôtes qui restent quelques jours.»
Le fait que des réformes dans l’Eglise et la société soient nécessaires, est une évidence
Le centre de Saint-Gerold, en revanche, a pu compter sur environ 13’000 nuitées en 2019. «Ceux qui viennent ici le font dans une démarche précise. Ils y restent quelques jours, pour suivre des cours, participer à une retraite spirituelle, ou simplement passer des vacances.
«Pour moi, et pour toute la communauté monastique, il est très important que le prieuré de Saint-Gerold endosse davantage le rôle de ‘cellule de réforme’», déclare le bénédictin suisse alémanique. En premier lieu, nous voulons identifier les domaines où des réformes sont urgentes – dans l’Eglise, comme dans la société civile. Avec ces cellules dites ‘de réforme’, nous désirons apporter notre contribution aux processus de réforme».
Une première ‘cellule de réforme’ aura lieu en décembre 2020. Dans chacune des cellules, les trois piliers de Saint-Gerold devront être représentés: la spiritualité, l’éducation et la culture.
«Dans notre apiculture, à Einsiedeln, est inscrit un joli dicton latin: ›Si sapis, sis apis.’ – ›Si tu veux être intelligent, sois une abeille’, explique le religieux valaisain. Si nous observons attentivement ces insectes, nous en apprendrons beaucoup sur les questions climatiques, par exemple, la façon dont les abeilles parviennent à équilibrer la température intérieure et extérieure, ou bien sur les modes de communication. En dansant, les abeilles transmettent des informations pour que les autres sachent où se trouve un champ de fleurs».
L’élan réformateur prôné par Martin Werlen s’insère dans le sillage d’une ouverture à la nouveauté qui caractérise depuis toujours le prieuré autrichien.
«Le fait que des réformes dans l’Eglise et la société soient nécessaires, est une évidence. Et Saint-Gerold a toujours été ouvert aux idées de réforme, explique le nouveau responsable du centre. J’ai pu y faire cette expérience lors de nombreuses rencontres. Je pense, par exemple, au prêtre et écrivain allemand Heinrich Spaemann (1903-2001), une figure prophétique qui m’a beaucoup impressionnée. Cependant, que Saint-Gerold se concentre maintenant surtout sur les réformes, ça c’est nouveau. L’idée est effectivement venue de moi.»
Dans tout ce qui se passe ici, c’est important que l’esprit qui a façonné ce lieu demeure présent
Martin Werlen sera avant tout responsable du domaine ›spiritualité’. Selon l’ancien Père-Abbé, la spiritualité ne doit pas être un domaine séparé des autres. Elle doit en revanche être présente partout et à tout moment.
«Chaque fois que cela est possible, nous offrirons un temps de réflexion le matin, à midi et le soir, ainsi que la participation à la célébration eucharistique. Ce qui est important, c’est que dans tout ce qui se passe ici, l’esprit qui a façonné Saint-Gerold depuis le début, devra toujours être présent», conclut Martin Werlen. (cath.ch/kath.ch/bl/dp)
Martin Werlen et l’appel au renouvellement de l’Eglise
Âgé de 58 ans, Martin Werlen a été Père-Abbé de l’abbaye bénédictine d’Einsiedeln de 2001 à 2013. Le moine valaisan est connu, aussi en Suisse romande, pour avoir rédigé de nombreux ouvrages à succès sur la spiritualité et la nécessité de reformes dans l’Eglise catholique.
Le 12 octobre 2020, il publiera un nouveau livre qu’il a écrit pendant la crise du coronavirus: «Raus aus dem Schneckenhaus. Nur wer draussen ist, kann drinnen sein. Von Pharisäern mit Vorsicht zu geniessen» (»Sortez de votre coquille de l’escargot. Seuls ceux qui sont à l’extérieur peuvent être à l’intérieur. À utiliser avec précaution par les pharisiens» – Herder Verlag).
Selon l’auteur, il s’agit de regarder l’Evangile sous un angle totalement différent – c’est-à-dire avec l’aide des Pharisiens. «Ils sont très dominants dans l’ensemble du Nouveau Testament. La plupart du temps, nous ne nous en rendons même pas compte. Leur point de vue peut nous aider à découvrir l’Évangile d’une manière totalement nouvelle».
Martin Werlen explique comment l’inspiration lui est venue des partages d’expériences de foi au cours des dernières décennies. «Dans ces échanges, nous avons rencontré à plusieurs reprises des impasses. Les personnes qui se retirent par peur donnent souvent le ton dans l’Eglise. Pour un grand nombre de personnes, c’est comme si elles s’enfuyaient. Le livre devrait encourager les gens à oser croire. C’est également ma tâche à Saint-Gerold». (bal/dp)
Davide Pesenti
Portail catholique suisse
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