Le cardinal Raï, évoquant des «causes obscures» à l’origine de la catastrophe, s’est une nouvelle fois demandé pourquoi 2’750 tonnes de nitrate d’ammonium étaient stockées dans le port. Le patriarche maronite réclame une enquête internationale, alors que le président libanais Michel Aoun rejette les appels à une telle enquête, estimant qu’elle «diluerait la vérité».
Tandis que les démissions se font de plus en plus nombreuses au niveau du gouvernement et du Parlement, le chef de l’Eglise maronite déplore que «les dirigeants restent assis sur leur trône pendant que le peuple subit toutes les catastrophes et souffre», rapporte le quotidien libanais L’Orient-Le Jour dans son édition du 10 août 2020.
Dans son homélie dominicale au siège patriarcal d’été à Dimane, le patriarche maronite a clairement fait écho à la rue libanaise, réclamant la démission du Parlement et du gouvernement.
«Les démissions de députés et de ministres ne suffisent pas. Il faut arriver au départ du gouvernement dans son ensemble, dans la mesure où il est incapable de redresser le pays, et d’organiser des élections législatives anticipées au lieu d’une Chambre qui ne fonctionne plus», a-t-il lancé. Le chef de l’Eglise maronite plaide pour des élections législatives anticipées.
De son côté, Mgr Elias Audi, métropolite grec-orthodoxe de Beyrouth, s’il n’a pas clairement réclamé le départ du gouvernement et des parlementaires, a dénoncé dans son homélie les responsables politiques aux commandes, relevant que «dans un pays qui se respecte, un responsable qui n’accomplit pas ses devoirs, ou manque à ses responsabilités démissionne!»
Suite à la catastrophe qui a dévasté Beyrouth, déjà huit députés ont démissionné et ce n’est certainement fini: Marwan Hamadé, membre du groupe parlementaire joumblattiste, Samy Gemayel, Nadim Gemayel et Elias Hankache, du parti chrétien Kataëb, Paula Yacoubian, seule députée issue de la société civile, et Neemat Frem, député indépendant, ainsi que Michel Moawad, député de Zghorta.
«Nous ne voulons plus servir de feuille de vigne au Parlement», a justifié Samy Gemayel, estimant que «ce Parlement ne produit rien et ne bâtit pas un avenir». Lundi 10 août, le député de Baabda Henri Hélou (affilié à la Rencontre démocratique de Walid Joumblatt) a présenté à son tour sa démission au secrétaire général du Parlement Adnane Daher en guise de protestation contre la classe dirigeante.
Déjà plusieurs ministres ont démissionné et d’autres devraient suivre. La ministre de l’Information, Manal Abdel Samad, a rendu son tablier, en présentant ses excuses aux Libanais, «dont nous n’avons pas réalisé les aspirations». Elle a été rejointe par Damien Kattar, ministre de l’Environnement et du Développement administratif. Ils vont peut-être bientôt compter parmi eux Raoul Nehmé, ministre de l’Economie, qui devrait franchir le pas lors du Conseil des ministres du 10 août.
De la fenêtre du palais apostolique, le pape François a une nouvelle fois appelé dimanche 9 août à une aide généreuse de la part de la communauté internationale. «Vierge de Harissa, Reine du Liban, prie pour nous!», a-t-il exhorté. Il a ensuite demandé aux évêques du Liban, aux prêtres, aux religieux, de se faire proches de la population et de vivre dans un esprit empreint de pauvreté évangélique, «sans luxe, parce que votre peuple souffre, et il souffre beaucoup». (cath.ch/orj/ag/be)
Jacques Berset
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