Le Bureau d’information islamique a porté plainte contre le Conseil municipal de Blantyre et l’Association évangélique du Malawi (EAM) en raison de cet «acte de vandalisme». Dans ce pays à majorité chrétienne, les relations interreligieuses sont d’ordinaire pacifiques. L’islam d’obédience sunnite est la seconde religion au Malawi derrière le christianisme. Des missionnaires musulmans sont installés à Blantyre, dans le sud du pays, soutenus par l’Agence musulmane pour l’Afrique.
L’affichage de ce panneau publicitaire installé dans les rues de Blantyre, invitant les chrétiens à lire maintenant «le dernier Testament» qui, selon eux, est le Coran, «le miracle ultime», est qualifié de «provocation» par des milieux chrétiens.
Pour l’Association évangélique du Malawi (EAM), une telle publicité est «inacceptable». Elle constitue une source de conflit religieux entre les communautés. Dans un communiqué rapporté par le quotidien local Nyasa Times, le président de l’association, le pasteur Zacc Kawalala, a exhorté la municipalité de Blantyre, à retirer l’affiche. «Si elle n’est pas retirée, les chrétiens de la ville adopteront un plan d’action» pour son retrait.
«La référence (par des musulmans) à l’Ancien et au Nouveau Testament dans un pays à prédominance chrétienne, même sans mentionner spécifiquement la Bible, équivaut à une comparaison entre la Bible et le Coran, a souligné le pasteur évangélique Zacc Kawalala, superviseur général des Word Alive Ministries International et également pasteur principal de l’Assemblée de Blantyre et de l’Assemblée de la Mega Church – Ndirande.
Selon le recensement de 2018, 77,3 % de la population du Malawi s’est identifiée comme chrétienne (majoritairement protestante), 13,8 % comme musulmane, 2,1 % comme sans religion, 1,1 % comme membres des religions traditionnelles et 5,6 % comme fidèles d’autres religions.
Le président actuel du Malawi Lazarus Chakwera, chrétien pratiquant, est un ancien pasteur de l’Eglise des Assemblées de Dieu. Il a donné plusieurs conférences en théologie à l’Université. Un musulman, Bakili Muluzi, avait dirigé le Malawi de 1994 à 2004.
Pour Cheikh Ahmed Chiyenda, coordinateur national du Bureau d’information islamique (BII), puisque des gens ont lu la Bible, ils ont aussi besoin de «lire le Coran, dernier livre saint pour l’humanité». Il a rejeté l’idée selon laquelle sa communauté chercherait à créer un conflit interreligieux. Il a invité les membres de l’EAM à se rapprocher du BII pour plus d’information sur l’affiche incriminé. Il a estimé qu’il n’y a pas de mal dans le message que véhicule affiche.
Il a accusé les chrétiens de vouloir dominer l’islam et que les musulmans ne font qu’exercer leurs droits constitutionnels. L’opinion publique malawite est pour sa part divisée sur cet affichage du BII. Sur les réseaux sociaux, certains considèrent la réaction chrétienne comme de «l’intolérance religieuse», d’autres, en revanche, estiment qu’il s’agit d’une provocation des musulmans, qui n’ont pas à se référer de cette manière à la Bible.
Un commentateur socio-politique chrétien, Stanly Onjezani Kenani, a écrit sur sa page Facebook que pour lui, le panneau publicitaire n’était pas insultant envers ses coreligionnaires. «J’ai lu le Coran, et en ai mémorisé les versets. Je n’ai trouvé aucun mal à lire ce livre saint», a-t-il ajouté, estimant que l’EAM, en exigeant le retrait du panneau d’affichage, a eu «une réaction excessive et fait preuve d’intolérance religieuse».
«J’ai de nombreux amis musulmans qui ont étudié la Bible avec nous, à l’époque du secondaire. Cela ne les a pas convertis au christianisme, juste de la même manière que ma lecture du Coran et la mémorisation de certaines sourates ne m’ont pas converti à l’islam», a-t-il rappelé.
Embarrassé par ce problème, le gouvernement a demandé au Comité des affaires publiques (PAC) d’intervenir, car ces tensions sont une menace pour la paix, les droits religieux et l’unité nationale. (cath.ch/ibc/be)
Ibrahima Cisse
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