Depuis Dimane, siège d’été du patriarcat, le chef de l’Eglise maronite a appelé à la tenue d’un «congrès national» pour tenter d’apporter des solutions à la profonde crise qui secoue le pays. Béchara Raï a apporté sa caution au large mouvement de contestation qui, depuis le 17 octobre 2019, investit les rues du pays pour clamer son ras-le-bol de la classe politique et son désespoir.
Le patriarche maronite a annoncé le 1er juillet le lancement d’une Charte nationale pour l’éducation, ayant pour objectif de «préserver l’identité civilisée du Liban et construire un Etat civil». S’exprimant lors d’une réunion des évêques maronites à Bkerké, Mgr Raï a dit espérer que ce document permettra de «créer une nouvelle classe dirigeante, basée sur l’humanité».
Ce document est publié alors que les Libanais sont mobilisés depuis octobre 2019 pour réclamer le départ de toute la classe politique libanaise, accusée de corruption et d’incompétence sur fond de crise économique et financière aggravée, rapporte mercredi le quotidien francophone libanais «L’Orient-Le Jour».
«Nous espérons que la révolution se fasse de manière constructive, afin de construire une nation pour tous et un Etat civil, avec une distinction claire entre l’Eglise et le pouvoir», a ajouté Béchara Raï. Ce document propose un «nouveau concept du travail politique et de l’appartenance nationale, afin de protéger la dignité des citoyens et de créer une nouvelle classe dirigeante, qui se base sur des principes humanistes».
Le pays du Cèdre connaît depuis quelques mois une inflation sans précédent. Des milliers de familles survivent grâce à la générosité des associations. Même une population qui appartenait pourtant à la classe moyenne doit faire appel à elles simplement pour se nourrir.
Mais les associations caritatives ont de plus en plus de mal à satisfaire les demandes des personnes dans le besoin. Depuis mardi soir 30 juin, plusieurs routes et autoroutes étaient coupées mardi soir à travers le Liban par des manifestants qui protestent contre la dégradation de la situation économique.
De plus un phénomène dangereux se développe, qui rappelle les années noires de la guerre civile: les lignes de démarcation et les divisions politico-religieuses qui s’étaient estompées au cours des années ressurgissent avec de graves risques de dérives communautaires.
Dimanche 28 juin, a eu lieu une manifestation à Moucharrafiyé, dans la banlieue sud de Beyrouth, et une contre-manifestation à Jal el-Dib, où la colère était particulièrement violente. Dans cette région du Metn, les contestataires ont lancé des slogans injurieux à l’encontre du Hezbollah, avant d’être violemment réprimés par les militaires. Selon des témoins, des éléments de l’armée n’ont pas résisté eux aussi à la dérive communautaire, brisant dans une tente une icône de la Vierge et arrachant une croix du cou d’un activiste, écrit le quotidien francophone libanais «L’Orient-Le Jour».
Le patriarche maronite a appelé les Libanais à poursuivre leur «révolution positive» contre la caste politique. Evoquant l’escalade observée dans la rue, il a refusé d’en imputer la responsabilité aux manifestants, condamnant en revanche «les éléments infiltrés et les casseurs qui ont attaqué les propriétés publiques et privées, et défiguré la cause pour laquelle a été déclenchée la révolte du 17 octobre». (cath.ch/ani/orj/be)
Jacques Berset
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