«Certaines critiques doctrinales» du pontificat actuel montrent une «distance progressive mais de plus en plus nette» par rapport au Concile Vatican II, souligne Sergio Centofanti dans sa mise au point. Certaines lectures qui insistent pour opposer le pape François à ses prédécesseurs immédiats, peut-on lire encore, finissent donc même par critiquer ouvertement saint Jean Paul II et Benoît XVI.
Cette clarification répond point par point à la tribune de Mgr Viganò intitulée La racine du problème, publiée le 9 juin, dans laquelle il s’en prend de façon virulente au Concile Vatican II. Selon lui, ce concile est à l’origine de nombreuses «déviances» dans l’Église catholique telles que la démocratisation de l’Église, l’abandon de l’annonce missionnaire, mais aussi le relativisme religieux, ou encore la démythologisation de la papauté. «Si notre diagnostic persiste contre toute évidence à exclure la pathologie initiale, nous ne pourrons pas prescrire une thérapie appropriée», écrit l’ancien nonce aux États-Unis, devenu un chef de file des opposants au pape François.
L’Église catholique a traversé plus de 20 conciles dans l’Histoire, lui répond ainsi le Saint-Siège par la voix de son vice-directeur éditorial. «À chaque fois, il y a eu quelqu’un qui n’a pas accepté les nouveaux développements et qui s’est fermé», ajoute-t-il.
«L’Église a introduit d’autres fêtes inconnues qui auraient probablement scandalisé de nombreux fidèles ayant vécu dans les siècles précédents»
– Sergio Centofanti
Saint Bernard de Clairvaux lui-même s’est opposé au dogme de l’Immaculée Conception avant que celui-ci ne soit proclamé par Pie IX en 1854, fait valoir le journaliste. «Je suis très inquiet, avait alors déclaré le saint, car beaucoup d’entre vous ont décidé de modifier les conditions d’événements importants, comme l’introduction de cette fête inconnue de l’Église, certainement pas approuvée par la raison, et pas même justifiée par l’ancienne tradition. Sommes-nous vraiment plus érudits et plus pieux que nos anciens pères?». Depuis, observe Sergio Centofanti, «l’Église a introduit d’autres fêtes inconnues qui auraient probablement scandalisé de nombreux fidèles ayant vécu dans les siècles précédents».
L’œcuménisme, s’indigne par ailleurs Mgr Viganò, a été «configuré de telle manière qu’il a été en directe opposition avec la doctrine précédemment exprimée par le Magistère de l’Église». En réponse, Sergio Centofanti évoque le 25e anniversaire de l’encyclique Ut Unum sint (1995), «ignoré par ceux qui proposent aujourd’hui une interprétation réductrice de la tradition, fermée à ce ›dialogue d’amour’». Pourtant lors de cet événement, Jean Paul II avait rappelé que l’engagement œcuménique et le dialogue avec les non-catholiques étaient une priorité de l’Église et découlaient de «l’ardent désir d’unité de notre Seigneur».
La sagesse, conclut le porte-parole du Saint-Siège, «recherche une justice qui surpasse celle des scribes et des pharisiens», et qui ne puise pas «uniquement dans les choses nouvelles, ni uniquement dans les choses anciennes». C’est notamment en ce sens qu’il faut lire les mots de Benoît XVI selon le responsable de communication, lorsqu’il exhorte les traditionalistes Lefebvristes à ne pas «figer l’autorité magistérielle de l’Église à l’année 1962». (cath.ch/imedia/ah/rz)
Qui est Mgr Viganò?
Âgé de 79 ans, Mgr Carlo Maria Viganò était membre du corps diplomatique du Saint-Siège jusqu’à son départ à la retraite en 2016. Un temps délégué pour les représentations pontificales, il est nommé en 2009 secrétaire général du Gouvernorat de l’État de la Cité du Vatican. Fin 2011, il est nommé – contre son gré – nonce apostolique aux Etats-Unis.
Le nom de Mgr Viganò est lié au premier scandale des Vatileaks, cette fuite dans la presse de documents officiels du Vatican. La toute première fuite – d’origine inconnue – intervient en janvier 2012 et concerne deux lettres de Mgr Viganò adressées à Benoît XVI. Le prélat y dénonce la gestion financière du Vatican, parle de corruption et affirme l’existence d’une cabale menée contre lui.
Quelques mois plus tard, en mai 2012, une troisième lettre figure dans les nouveaux documents révélés dans la presse. Mgr Viganò s’y plaint de sa nomination aux États-Unis alors qu’il voulait, écrivait-il, rester à Rome pour s’occuper de son frère gravement malade. Selon plusieurs sources, les deux frères étaient pourtant brouillés depuis plusieurs années.
En août 2018, le prélat italien publie un témoignage accusant le pape François d’avoir fait de l’alors cardinal Theodore McCarrick, archevêque émérite de Washington, un «conseiller de confiance» dans les nominations épiscopales aux États-Unis, malgré avoir informé le pontife du comportement inadapté du haut prélat envers des séminaristes et des sanctions qui pèsent contre lui. En juin 2018, deux affaires d’abus sexuels commis sur des jeunes hommes par le cardinal alors qu’ils étaient encore mineurs sont révélées, entraînant la démission de Theodore McCarrick du Collège cardinalice. Depuis, Mgr Viganò se présente comme un chef de fil des opposants au pape François, multipliant les critiques à son encontre. AH
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