Gardien de la liberté religieuse à travers le monde. C’est le rôle qu’entend continuer d’incarner Donald Trump, alors que s’amorce sa deuxième campagne électorale pour la présidence des Etats-Unis. Depuis son arrivée à la Maison-Blanche, le président américain a multiplié les initiatives pour s’ériger en défenseur de la liberté de culte, sur le front intérieur comme à l’international.
Mardi 2 juin, au lendemain de sa courte déclaration, Bible en main, devant l’église Saint John à Washington, Donald Trump a signé un décret exécutif sur la promotion de la liberté religieuse dans le monde. Le texte stipule que «la liberté de religion pour tous les pays du monde est une priorité de politique étrangère des Etats-Unis», ainsi qu’un «impératif moral de sécurité nationale».
En pratique, le décret donne six mois au secrétaire d’Etat Mike Pompeo pour élaborer un plan d’action érigeant la promotion et le respect de la liberté religieuse à travers le monde comme mission prioritaire. Le décret présidentiel donne notamment la possibilité au Trésor américain de sanctionner économiquement des personnes impliquées, selon l’administration américaine, dans des persécutions religieuses.
Le décret habilite également le gouvernement américain à refuser des visas d’entrée aux Etats-Unis pour les mêmes motifs. 50 millions de dollars (45 millions d’euros) seront désormais alloués chaque année pour poursuivre cette diplomatie.
La promotion de la liberté religieuse n’est pas un thème nouveau pour Donald Trump. Comme le rappelle Mokhtar Ben Barka, professeur de civilisation américaine à l’université de Valenciennes le président «en avait déjà fait un thème de campagne pour sa première élection et ainsi s’assurer le soutien de l’électorat évangélique, dont le prosélytisme à travers le monde est l’un des piliers. Et Donald Trump tient en général ses promesses », note le chercheur.
En coulisses derrière le président, l’activisme de son comité consultatif évangélique — un cercle restreint de personnalités qui le conseillent sur les sujets religieux — et la Commission américaine sur la liberté religieuse internationale.
«En principe, cette commission est indépendante du gouvernement mais en réalité, elle est largement dominée par un état-major évangélique depuis l’administration de Gorges W Bush», précise Mokhtar Ben Barka. Chaque année, l’organisation publie un rapport épinglant les pays, «particulièrement préoccupants» sur le front de la liberté religieuse.
En 2020, des États comme la Birmanie, la Chine, l’Iran, la Corée du Nord, la Syrie et la Russie y figurent. «Cette commission est très contestée, même en France, reprend Mokhtar Ben Barka. Beaucoup d’Etats comme la Chine pensent que ses efforts visent à imposer les valeurs américaines chez eux et servent le prosélytisme des groupes chrétiens».
La défense des libertés religieuses est aussi un outil diplomatique. Dans le viseur de Washington, la Chine, accusée de persécutions religieuses contre des groupes chrétiens et musulmans. Le régime chinois a toujours été désigné par le département d’Etat américain comme un «pays particulièrement préoccupant» en raison de ses mauvais résultats en matière de liberté religieuse depuis 1999.
Souvent silencieuse sur la question des droits humains dans le monde, l’administration Trump s’est récemment saisie du sort des Ouïghours, au nom de la liberté de religion. Dénonçant «l’horrible campagne de répression» à l’égard de cette minorité musulmane, elle a multiplié les réquisitoires implacables contre la Chine, qu’elle considère comme son principal rival stratégique sur le long terme.
Le Congrès américain a adopté fin mai une proposition de loi pour sanctionner des responsables chinois accusés de «l’internement de masse» des musulmans ouïghours, qui risque d’envenimer encore davantage des relations déjà tendues à l’extrême entre Washington et Pékin. «La Chine a déclaré la guerre à toutes les croyances religieuses», a justifié le Donald Trump, ajoutant que le régime est devenu «une menace internationale.»
«Le thème de la liberté religieuse permet à Donald Trump d’ouvrir un nouveau front contre Pékin, analyse Mokhtar Ben Barka. Mais aussi de se positionner devant son électorat comme le gendarme des libertés religieuses, un sujet fédérateur dans le pays. En 2019, 25 % des adultes américains se déclaraient évangéliques et 81 % des électeurs évangéliques blancs ont voté pour Donald Trump en 2016. (cath.ch/cx/hn/cp)
Carole Pirker
Portail catholique suisse
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