Située de manière remarquable à Rome, la place Navone est l’un des centres névralgiques de la Ville éternelle. Grande d’un hectare environ, elle se trouve à mi-distance entre le Vatican et le Capitole. On est alors à seulement une vingtaine de minutes à pied de la place Saint-Pierre, au nord-ouest, ou du Forum romain, au sud-est. Point de passage obligé, la piazza Navona est devenu un rendez-vous obligatoire pour tout visiteur de la capitale italienne: on s’y retrouve à la terrasse de l’un des innombrables cafés qui la bordent ou à l’ombre de son obélisque central.
Différents éléments frappent d’emblée celui qui foule les pavés de cette place, l’une des plus grandes de la ville. Les fontaines magistrales et baroques mais aussi les deux églises de part et d’autre des deux longueurs de l’oblongue Navone: Sainte-Agnès-in-Agone, côté occidental et Notre-Dame du Sacré-Cœur, plus ancienne, vers l’Orient. Les palais aux façades ocres et volets verts couronnent le charme de cet endroit que l’on doit à un pape issu d’une grande famille romaine du 17e siècle.
L’aménagement de la place Navone tel qu’on le connaît aujourd’hui date en effet du temps du pape Innocent X . C’est sous ce pape profondément romain – issu de la célébrissime famille Pamphili, implantée à Rome au 15e siècle – que la place Navone a été réaménagée de fond en comble. Giovanni Battista Pamphili a 70 ans lorsqu’il est élu sur la chaire de Pierre en 1644, à la suite d’Urbain VIII, son prédécesseur, lui aussi de noble extraction, venant de la famille Barberini.
Rapidement, le nouveau pontife commande des travaux d’embellissement de cette place centrale, érigée à l’endroit même d’un ancien stade du 1er siècle. Les travaux débutent en 1647, trois ans après son élection. Le pape souhaite notamment agrémenter la place d’une fontaine, majestueuse, qui trônerait en son centre. Ce chantier est confié au Bernin et sera terminé en 1651.
Les quatre fleuves qu’elle représentera à la fin de sa confection, et que l’on admire encore aujourd’hui en face de l’église Sainte-Agnès-in-agone, symbolisent chacun un continent : le Danube pour l’Europe, sculpté par Antonio Raggi, le Gange pour l’Asie, sculpté par Claude Poussin, le Nil pour l’Afrique, sculpté par Giacomo Antonio Fancelli et le Rio de la Plata pour l’Amérique, sculpté par Francesco Baratta. Dans un contexte de Contre-Réforme et du développement des missions dans le monde entier, cette symbolique des quatre continents permet au pontife de réaffirmer l’influence des catholiques et la puissance de l’Eglise dans le monde entier. Le blason du pape y est soutenu par l’Europe.
Un obélisque égyptien surplombe la fontaine. A l’origine, il a été apporté à Rome par l’empereur romain Caracalla (188-217). Il a ensuite été placé dans le cirque que l’empereur Maxence voulut situer hors de la ville, au 3e mille de la voie Appienne. Ce long morceau de granite rouge de Syène (Egypte), mesurant plus de 16 mètres de la base à son sommet, est restauré et placé par Le Bernin sur sa fontaine des Quatre-Fleuves. A son sommet, se trouvent les emblèmes de la famille Pamphili : une colombe et un rameau d’olivier.
Cette colombe et ce rameau d’olivier sont présents absolument partout sur la partie ouest de la place. Outre au zénith du monolithe égyptien, on les retrouve à Sainte-Agnès-in-agone, sur toutes les portes et dans tous les chapiteaux des colonnes.
Fils d’un de ces Pamphili, et estimant le besoin de bâtir une demeure plus digne encore que les précédentes, Innocent X décide la construction d’un palais à la hauteur du prestige apporté par sa nomination papale. Ses bâtisseurs, avec à leur tête l’architecte italien Girolamo Rainaldi, mettront six ans à réaliser ce chantier terminé en 1650.
Le palais se dresse fièrement sur trois étages et possède trois cours intérieures. Racheté en 1964 par l’Etat brésilien, il est devenu l’ambassade du Brésil. Depuis cette acquisition, un drapeau du pays flotte sur la place Navone avec sa devise flanquée sur le tissu vert et jaune au globe étoilé : ‘ordem e progresso’.
Le 236e pape tombe malade en août 1654 et meurt en janvier de l’année suivante. Il est d’abord enterré au Vatican avant que ses restes ne soient pieusement déplacés dans l’église Sainte-Agnès-in-Agone, bâtie sur le lieu du martyre d’une jeune romaine tuée en 304. C’est dans cet édifice, qui fait face à la fontaine des Quatre-Fleuves, que repose désormais le corps d’Innocent X.
Cette grandiose église fait également partie des aménagements souhaités par l’ancien vice-camerlingue du collège cardinalice (1643-1644). Ses travaux ont été conduits d’abord par Girolamo Rainaldi, puis par Borromini à qui l’on doit notamment la façade concave et le dôme. En entrant dans l’édifice baroque, on trouve un monument dédié à Innocent X, bâtisseur de l’église. Sa tombe se situe quant à elle à gauche de l’autel principal. (cath.ch/imedia/pad/rz)
L’origine du terme ‘Navone’
Tous les bâtiments qui bordent la place Navone ont été érigés sur les gradins d’un ancien édifice romain du 1er siècle de notre ère. A quelques mètres au dessous du niveau actuel du sol, se trouve en effet la piste du stade de Domitien. C’est de ce stade que la place tire l’origine de son nom. ‘Navone’ dérive en effet du terme grec ‘agone’, qui désigne les spectacles de lutte qui s’y tenaient. ‘In agones’, signifie donc ‘sur le lieu des concours’.
Au 21e siècle, il n’est plus question bien entendu d’assister à des concours athlétiques (tels que des courses, des lancés de javelot ou de disques) quoique la place reste animée par de nombreux artistes aguichant les touristes de l’aube au crépuscule. PAD
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