Le deuil à l’ère du coronavirus

Dans le canton de Vaud, le deuil se joue de plus en plus à huit-clos suite aux restrictions liées au coronavirus. S’il y a confinement de la population, il n’y aura plus de cérémonie, selon Edmond Pittet. Le directeur des Pompes funèbres à Lausanne s’organise sur Facebook, pour partager ce moment d’adieux.

«Je viens de quitter le cimetière pour un défunt qui aurait probablement rassemblé 300 personnes et nous étions quinze.» Edmond Pittet me parle au volant de sa voiture, en kit mains libres. Directeur des Pompes funèbres à Lausanne, il constate, impuissant, l’impact des directives cantonales liées au coronavirus, entrées en vigueur le 16 mars: «Désormais, les services funéraires sont limités à dix personnes, incluant le personnel funéraire. Ils se font donc dans la stricte intimité. Et si les proches du défunt excèdent ce nombre, le personnel se met à l’extérieur de la chapelle, comme cela m’est arrivé tout-à-l’heure.» 

Pour l’heure, explique le professionnel du mortuaire, en poste depuis 40 ans, les directives actuelles n’entraînent aucune restriction sur le plan du rituel funéraire. Les endeuillés peuvent encore se réunir dans la chambre funéraire, que ce soit à l’hôpital ou dans une chapelle mortuaire. Ils peuvent assister à la fermeture du cercueil et accompagner celui-ci au cimetière. «Mais le défunt ne peut pas être entouré de tous ses amis et les familles qui renoncent à un service public en raison des nouvelles dispositions le font dans la tristesse et une certaine frustration», soupire-t-il.

Toutefois, l’inhumation des cendres n’est désormais plus possible partout: «Beaucoup de communes vaudoises nous ont signifié des restrictions pour l’inhumation des cendres, vu que beaucoup de leur personnel est à l’arrêt», confirme-t-il. 

Facebook, pour partager le deuil

Vu la situation, les Pompes funèbres lausannoise s’apprêtent à mettre en place, sur leur page Facebook, des extraits vidéo pour pouvoir partager ce moment d’adieux avec celles et ceux qui n’auront pas pu y assister: «On a filmé intégralement la cérémonie d’hier comme celle d’aujourd’hui et on va en tirer trois extraits de 20 secondes chacun, avec la mention «Nous les avons accompagnés aujourd’hui », avec le nom et le prénom de la personne. On espère pouvoir démarrer d’ici à la semaine prochaine». 

«En France, le défunt est placé dans une housse sanitaire, mis dans un cercueil qui est ensuite scellé. Les familles n’ont pas accès au cercueil. On les effraie et on les traumatise à vie, c’est horrible!»,

Les décès liés au Covid-19

Edmond Pittet, qui a déjà accompagné des personnes décédées du Covid-19, estime important de ne pas sombrer dans les normes d’hygiène: «En France, par exemple, le défunt est placé dans une housse sanitaire, mis dans un cercueil qui est ensuite scellé. Les familles n’ont pas accès au cercueil. On les effraie et on les traumatise à vie, c’est horrible!», s’exclame-t-il.  

En Suisse, poursuit Edmond Pittet, il n’y a aucune disposition particulière à respecter pour les personnes décédées du coronavirus, «parce, selon un avis médical autorisé, le corps d’une personne décédées du Covid-19 ne peut pas en contaminer d’autres. Il faut plutôt être vigilant face aux proches que nous accompagnons lors de l’organisation des obsèques.» En cas de suspicion, il organise des entretiens téléphoniques et communique par mail les dispositions arrêtées. 

Plus de cérémonie en cas de confinement

Et si l’on arrive à des mesures de confinement de la population, comme les cantons semblent pousser la Confédération à le faire? «Avec le Conseil fédéral, qui vient de déconseiller les rassemblements de plus de cinq personnes, désormais à éviter (ndlr. annonce faite le 19 mars, à 18h), on ne pourra plus procéder à des obsèques, explique-t-il. Il n’y aura plus de cérémonie, tout au plus un recueillement avec quelques personnes.» (cath.ch/cp)

Carole Pirker

Portail catholique suisse

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