Coronavirus: des événements religieux vecteurs majeurs de propagation

Un rassemblement de l’Eglise évangélique «La Porte ouverte chrétienne», à Mulhouse, a été identifié comme un foyer important de propagation du coronavirus Covid-19 en France et en Suisse. D’autres rassemblements religieux dans le monde, notamment en Corée du Sud, semblent avoir été des vecteurs de contaminations importants.

Six personnes fréquentant l’Eglise évangélique de Lonay, près de Lausanne, ont été confinées chez elles de manière préventive, rapporte le 6 mars 2020 la Fédération romande d’Eglises évangéliques (FREE) dans un communiqué, à laquelle est affiliée l’Eglise de Lonay. Toutes ces personnes ont été en contact avec une femme testée positive au Covid-19. Cette dernière avait participé à un rassemblement de l’Eglise «La Porte ouverte chrétienne», entre le 7 et le 21 février 2020 à Mulhouse.

Contamination de masse

L’événement, qui a rassemblé environ 2’000 personnes, a été identifié comme un foyer important de propagation en France. Dans le quartier de Bourtzwiller, «La Porte ouverte chrétienne», considérée comme l’une des plus grandes «megachurches» de France, avait convié des fidèles de toute le pays, outre-mer inclus, pour une semaine de jeûne et de prière. «Il y a beaucoup de partage, c’est un contexte propice à la contamination», a confié au site Francinfo le médecin Jonathan Peterschmitt, fils du pasteur de cette Eglise, lui-même contaminé, comme plusieurs membres de sa famille.

Quelques jours après la fin du rassemblement, les autorités ont tiré la sonnette d’alarme. Le 4 mars, la préfecture du Haut-Rhin a annoncé la contamination de dix personnes dans le département, en lien avec l’événement. Le 5 mars, les craintes de dissémination se sont concrétisées, avec des cas identifiés parmi les fidèles dans de nombreuses régions, dont certaines encore épargnées par l’épidémie.

Stigmatisation en Corée du Sud

L’épisode de Mulhouse rappelle celui qui s’est déroulé à Daegu en février. Dans cette quatrième ville de Corée du Sud, le pays le plus touché au 9 mars 2020 après la Chine et l’Italie, une autre «megachurch», l’Eglise Shincheonji de Jésus, a été au centre du processus de propagation. Une femme de 61 ans présentant des symptômes grippaux a assisté à deux offices religieux depuis le 10 février, où se sont trouvés plus de 1’000 autres fidèles.

La Sud-Coréenne a été confirmée atteinte du Covid-19 le 18 février. D’après les experts, la femme aurait contaminé 43 personnes. Le nombre de cas confirmés en Corée du Sud a connu, suite à cela, une brusque augmentation. La propagation s’est ensuite emballée, jusqu’à atteindre près de 7’500 cas confirmés au 9 mars. Pensant n’avoir qu’un rhume ordinaire, la femme à l’origine de la contagion avait refusé à deux reprises d’être dépistée.

L’Eglise Shincheonji s’est très rapidement vue accusée d’avoir favorisé la dissémination du virus. Plus de 500’000 personnes ont signé une pétition demandant la dissolution de l’organisation. Le 2 mars, la mairie de Séoul a porté plainte pour homicide contre douze dirigeants du mouvement, dont le fondateur Lee Man-hee. Ils sont accusés de ne pas avoir encouragé leurs membres à coopérer avec les autorités pour empêcher la propagation. Le même jour, Lee Man-hee s’est présenté en public, à genoux et front contre terre, pour s’excuser de la responsabilité de son organisation.

Annulation des cultes

En France, «La Porte ouverte chrétienne» n’a pas subi une telle stigmatisation. L’Eglise a tout de même diffusé, le 7 mars, un communiqué expliquant les circonstances de la propagation. Les responsables de l’Eglise y soulignent notamment que, du 17 au 21 février, il n’y avait encore aucune recommandation gouvernementale. «La France est au stade 1, c’est-à-dire que le virus n’est pas en circulation générale dans la population», relève le communiqué.

L’Eglise assure avoir, dans le cadre de l’événement, «mis en place les éléments de sécurité nécessaires à l’accueil du public, à savoir: service de sécurité, permanence sanitaire, inscription nominative des mineurs». Un service de premier secours était assuré et n’a relevé sur place aucun participant ayant des signes grippaux, affirme «La Porte ouverte chrétienne». Les dirigeants de l’organisation assurent avoir pleinement collaboré avec les services de l’Etat suite aux révélations de contaminations multiples. Selon evangliques.info, «La Porte ouverte chrétienne» a annulé tous ses cultes et ses activités jusqu’au 17 mars.

Pasteur en quarantaine

Des participants au rassemblement de Mulhouse venaient également de Suisse. Les personnes identifiées ont été l’objet de mesures de sécurité. Le 6 mars, le canton de Neuchâtel a annoncé 10 nouveaux cas de Covid-19, tous en lien avec la manifestation en France. D’après la FREE, «plusieurs évangéliques romands ont été contaminés» suite à la semaine de prière et de jeûne.

La fidèle de Lonay qui a participé au rassemblement de Mulhouse a été détectée positive au Covid-19 le 4 mars. Les cinq personnes qui l’ont côtoyée de près ont été placées en confinement à leur domicile. Parmi elles se trouve Marc Gallay, le pasteur de la communauté, en quarantaine préventive jusqu’au 15 mars, avec son épouse. A trois reprises, le pasteur s’est trouvé à moins de deux mètres de la personne contaminée pendant plus de 15 minutes. La femme infectée ne serait pas une personne à risque et se porterait bien. «A l’époque, on ne parlait pas du coronavirus de la même manière qu’aujourd’hui. Elle ne se doutait de rien et nous non plus», confie-t-il à 24 Heures.

Par précaution, le culte du dimanche 8 mars a été annulé à Lonay. Si les autres Eglise membres de la FREE continueront d’ouvrir leurs portes, la Fédération émet des recommandation officielles de prudence, conseillant notamment de célébrer la sainte cène avec des gobelets et du pain prédécoupé.

La Conférence des évêques suisses (CES) a également communiqué, le 5 mars, un certain nombre de recommandations d’hygiène et de comportement lors des offices religieux. (cath.ch/rz)

Raphaël Zbinden

Portail catholique suisse

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