Alors que le Brésil fête aujourd’hui la Journée de la conscience noire destinée à valoriser la culture afro descendante, le MMFDH révèle que 152 plaintes pour discrimination religieuse contre les terreiros (lieux de culte) et les fidèles de religions de matrice africaine comme le Candomblé et l’Ubanda ont été enregistrées en 2018. Il y en avait eu 144 en 2017. Soit une augmentation de 5,5% en une année.
L’étude, publiée à l’occasion de la journée de la conscience noire destinée à valoriser la culture afro descendante, révèle également que, dans le même temps, les plaintes pour discriminations religieuses ont baissé de 9,9 % en moyenne en ce qui concerne les autres religions (354 plaintes en 2018 contre 397 en 2017).
Pour Hédio da Silva Junior, avocat, Docteur en Droit et ex-secrétaire de la Justice de l’Etat de Sao Paulo, ces chiffres ne sont pas surprenants et tendent même à s’aggraver. «Les traditions judéo-chrétiennes sont d’avantage protégées par le discours du gouvernement fédéral, a t-il expliqué, dans le colonnes du journal Globo. En revanche, les religions de matrice africaine, indigène et même les athées ne sont pas aussi protégées, et sont de plus en plus confrontées à l’intolérance religieuse».
Hédio da Silva Junior rappelle également que la Constitution brésilienne garantit la liberté de culte, la tolérance religieuse et la libre expression des groupes religieux qui forment la nation brésilienne. «On peut donc affirmer, qu’aujourd’hui, le discours officiel de l’Etat brésilien va à l’encontre de la Constitution et expose le président, qui en est le garant, à une possible procédure de destitution».
«Les religions de matrice africaine, indigène et même les athées sont de plus en plus confrontées à l’intolérance religieuse»
Hédio da Silva Junior
D’après les chiffres du ministère de la Femme, de l’Enfance et des Droits Humains, les violences les plus fréquentes sont d’ordre psychologique. Sont considérées comme «psychologiques», les violences qui «outragent, humilient ou méprisent une personne pour sa pratique ou son identité religieuse».
À ce titre, les membres de la religion Ubanda ont déposé le plus grand nombre de plaintes en 2018. Les adeptes de la religion du Candomblé ont pour leur part déposé 47 plaintes cette même année. Et les chiffres de la discriminations ne semblent pas prêts de fléchir puisque 119 cas ont déjà été enregistrés pour ces deux religions entre janvier et juin 2019.
Pour assurer l’accueil et l’écoute des victimes, Hédio da Silva Junior a récemment créé l’Institut de Défense des Droits des Religions Afro descendantes (Idafro). Cette association est constituée d’avocats, comptables, pompiers, militaires, architectes et sociologues, préparés pour accueillir, informer, orienter et conseiller les représentants des religions afro-brésiliennes sur différents sujets. Claudio Alexandre fait partie de ceux-là.
Ce Père de Saint est responsable d’un Terreiro de Candomblé à Paraty, à 250 km à l’ouest de Rio de Janeiro, voisin d’un temple évangélique. «Pendant au moins trois ans, confie-t-il au quotidien Globo, à chaque fois que nous nous réunissions pour pratiquer notre culte, un groupe d’évangéliques apparaissait, branchait les hygiaphones et criait des paroles d’exorcisation. Nous avions peur d’une invasion du terreiro et de déprédations des locaux, mais nous pensons que de ne pas céder au provocations a été la meilleure réponse possible, même si notre silence réduit les statistiques du ministère». Et le Père de Saint de s’interroger: «Comment peut-on empêcher une autre religion de célébrer son culte?».
L’anecdote est significative. «Les chiffres du Ministère sont insignifiants au regard de la réalité», assure Hédio da Silva Junior. Nous parlons en effet de personnes qui professent les religions afro brésiliennes mais qui ne l’assument pas toujours, par peur justement de l’intolérance». Un sentiment partagé par la députée (Parti Communiste du Brésil – PcdoB) qui estime également que les attaques faites aux religions afro-brésiliennes sont motivées par le racisme à l’égard des noirs du Brésil.
«Lorsqu’il s’agit de thématiques liées aux noirs, il existe toujours des personnes pour commettre des actes de discrimination, directs ou indirects, s’insurge la députée. La liberté religieuse est un droit garanti par la Constitution fédérale et la voix des victimes est importante pour faire respecter ce droit. Alors, malgré la peur qui règne aujourd’hui, il faut que les dénonciations continuent». (cath.ch/jcg/bh).
Jean-Claude Gérez
Portail catholique suisse
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