Togo: L’archevêque de Lomé victime de menaces de mort

Mgr Philippe Fanoko Kpodzro, archevêque émérite de Lomé, au Togo, s’est dit «menacé de mort» par le pouvoir pour s’être rangé du côté de l’opposition dans la perspective de l’élection présidentielle, prévue en février ou mars 2020.

Le 14 novembre 2019, l’archevêque émérite a dénoncé les menaces de mort qui pèseraient sur sa vie et celle de son collaborateur, Marc Mondji. Pour Mgr Philippe Kpodzro, si un malheur arrivait à lui ou à son chargé de communication, «cela ne pourrait venir que du chef de l’Etat et de ses collaborateurs».

Militant pour «une alternance politique»

Le prélat âgé de 89 ans souhaite «une alternance politique» lors de cette présidentielle dont la date exacte n’est pas encore publiée. Bien qu’ayant officiellement pris sa retraite en 2007, Mgr Philippe Kpodzro n’a cependant jamais quitté le devant de la scène politique de ce pays d’Afrique de l’Ouest.

Le 12 novembre 2019,  il a reçu des responsables de la société civile et des représentants de 14 partis politiques d’opposition, dont des candidats potentiels à la présidentielle auquel le président sortant Faure Eyadéma, au pouvoir depuis 2005, après le décès de son père Gnassingbé Eyadéma, pourrait se représenter pour un quatrième mandat à la tête du pays.

Président de père en fils

Les discussions entre Mgr Kpodzro, la société civile et les opposants ont porté sur le scrutin, et le processus électoral. La rencontre a débouché sur une plate-forme revendicative en 18 points, adressée au gouvernement. Il s’agit, entre autres, de la «transparence» du scrutin, des changements au sein de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), la reconstitution de la Cour constitutionnelle et l’audit de l’ensemble du processus électoral.

En attendant la satisfaction de ses réclamations, ils ont demandé la «suspension immédiate» du processus électoral en cours. Une supplique suffisante pour mettre le pouvoir des tous ses états contre l’archevêque qui dit avoir reçu par la suite «de sérieuses menaces de la présidence de la République, depuis plusieurs jours», a déclaré son porte-parole, Marc Mondji.

«Dans le collimateur des autorités»

«Je veux dire publiquement, que si quelque chose nous arrive, il faut qu’on s’en prenne directement au chef de l’Etat qui nous dirige», a-t-il dit, ajoutant qu’il est «dans le collimateur des autorités pour s’être rangé du côté de l’opposition, et avoir demandé un report de l’élection».

Marc Mondji relève que ces menaces sont adressée lors d’appels téléphoniques «pour nous mettre en garde et dire que notre vie est en danger, et qu’il faut qu’on arrête ce qu’on est en train de faire ou il faut quitter le pays».  Les relations entre le pouvoir et l’Eglise catholique du Togo sont tendues à tel point que le gouvernement avait refusé d’accréditer des observateurs catholiques lors des élections des élections législatives de décembre 2018.

Les prêtres invités à ne pas faire de la politique partisane

Le pouvoir avait invoqué des «financements douteux» dans les activités de la commission Justice et Paix. Ces allégations ont été rejetées par la Conférence épiscopale du Togo (CET). Dans une déclaration publiée en octobre, elle avait souligné que ses messages sont dictés «par la fidélité à l’Evangile et par la recherche du bien commun».

«C’est dans ce sens que nous avons toujours invité les prêtres à éviter tout affichage de positions politiques partisanes et de militantisme en faveur des partis politiques», a encore rappelé la CET.  

Les engagements socio-politiques font partie de la mission des baptisés

Les évêques togolais affirment cependant être loin de «démissionner» de leurs engagements socio-politiques qui font également partie de la mission des baptisés. Néanmoins, ils restent «toujours  rigoureusement contre des prêtres qui affichent des positions politiques partisanes», estimant  que le prêtre togolais doit faire de la politique «une vocation de service en faveur du bien commun», comme le souhaitait le saint évêque Oscar Arnulfo Romero, assassiné par les «escadrons de la mort» au Salvador le 24 mars 1980. (cath.ch/ibc/be)

Ibrahima Cisse

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