Duterte affirme qu’il s’agit d’organisations de façade de groupes terroristes locaux, voire de la Nouvelle Armée du Peuple (NPA), la branche armée du Parti communiste. Tant le Conseil œcuménique des Eglises (COE) à Genève que les évêques de l’Eglise épiscopalienne des Philippines, membre du NCCP, ont vivement critiqué le gouvernement philippin pour avoir mis le Conseil national des Eglises des Philippines sur cette liste. Les Eglises sont ainsi désignées comme cibles des forces armées.
L’évêque Rex Reyes, du diocèse épiscopalien de Central Philippines, membre de la Communion anglicane, a qualifié ce geste du gouvernement d’action «irresponsable et malveillante». La déclaration de l’ancien secrétaire général du NCCP a été soutenue par l’Eglise épiscopalienne des Philippines, qui fait partie du Conseil national des Eglises. Le NCCP a été qualifié de «groupe terroriste communiste» par un chef du renseignement philippin lors d’une audience publique au Congrès des Philippines.
Le COE, par le biais de son secrétaire général, le pasteur Olav Fykse Tveit, a fait part de sa profonde inquiétude et s’est dit «gravement préoccupé» par le dangereux «étiquetage» du Conseil national des Eglises. Dans le contexte politique actuel aux Philippines, une telle désignation comme «rouges» donne en fait le feu vert au harcèlement et aux attaques meurtrières des forces de sécurité et des milices contre les personnes figurant sur la liste.
Le Conseil national des Eglises des Philippines n’a cessé de s’élever contre la «guerre contre la drogue» menée sous l’égide du président Duterte. «Le NCCP a également toujours défendu les droits des pauvres, des peuples autochtones et de nombreux autres groupes marginalisés et vulnérables», relève le secrétaire général du COE.
«Des évêques, des membres du clergé et des fidèles, ainsi que de nombreux autres défenseurs des droits humains aux Philippines, ont déjà été pris pour cible, arrêtés et menacés de représailles», a déclaré dans un communiqué Olav Fykse Tveit.
Depuis l’arrivée au pouvoir du président Rodrigo Duterte en 2016, des milliers de personnes ont été tuées dans une vague de violence cautionnée par l’Etat et sans que les auteurs de ces exécutions extrajudiciaire de trafiquants et d’usagers présumés de drogue ne soient inquiétés.
En juillet 2019, Amnesty International a publié un rapport intitulé «They just kill»: Ongoing extrajudicial executions and other human rights violations in the Philippines ›war on drugs’, dans lequel l’organisation de défense des droits humains expose comment de hauts gradés de la police qui supervisaient des opérations brutales à Manille ont été mutés dans la région de Luçon centrale pour continuer d’y diriger une violente campagne d’homicides. Amnesty International considère que ces homicides ont atteint un tel niveau qu’ils constituent des crimes contre l’humanité. (cath.ch/coe/be)
Jacques Berset
Portail catholique suisse