L’un des faits les plus marquants de l’action d’Abiy Ahmed a été son succès indéniable dans le règlement de la crise qui a longtemps divisé l’Eglise orthodoxe éthiopienne. Grâce à sa médiation, les clans opposés se sont retrouvés autour d’une seule autorité.
Jusqu’au milieu du XXe siècle, l’Eglise orthodoxe d’Ethiopie faisait partie de l’Eglise copte orthodoxe d’Egypte. Mais en 1959, les Ethiopiens ont décidé de nommer leur propre patriarche. Le premier a été Abune Merkorios. Il a été contraint d’abdiquer en 1991, après le renversement du régime communiste de Mengistu Haile Mariam par le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF). Il était accusé d’être trop étroitement lié au régime déchu. Il s’est alors exilé aux Etats-Unis où il a créé une Eglise dissidente. L’Eglise orthodoxe d’Ethiopie non-exilée a alors nommé ses propres patriarches à partir de 1992. Abune Mathias est devenu le chef de cette communauté en 2013.
En août 2018, un accord de réunification des deux Eglises a été signé. Abune Merkorios, après 27 ans d’exil, a repris sa place de chef spirituel, mais Abune Mathias a conservé son titre de patriarche, chargé du domaine de l’administration.
Le Premier ministre nobélisé a également entrepris un projet de protection d’églises classées dans la région de Lalibela, au nord du pays. Le site fait partie des douze premiers lieux de culte orthodoxes, classés au Patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco en 1978. Ces édifices religieux creusés à même la roche ont été construits vers le 13e siècle. Ils sont un haut lieu du christianisme éthiopien et une importante destination de pèlerinages.
En mars dernier, Abiy Ahmed a profité d’une visite officielle du président français Emmanuel Macron pour solliciter l’aide de ce pays dans la réhabilitation de ces onze églises menacées par l’érosion. Le chef d’Etat a promis une aide financière et technique pour la réalisation de ce projet.
A noter que les relations entre l’Eglise catholique, à laquelle appartiennent 0,7% des 108 millions d’Ethiopiens, et le régime du Premier ministre Ahmed sont largement positives. Elles ont été renforcées par la visite au Vatican, le 21 janvier 2019, du chef du gouvernement éthiopien. En novembre 2018, la ministre éthiopienne de la Paix, Muferiat Kamil, avait rendu hommage à l’Eglise catholique pour sa contribution à la paix et au développement du pays, notamment par le biais des écoles.
Les relations avec la communauté musulmane sont toutefois plus compliquées. Elles sont empreintes de méfiance, les leaders et les organisations islamiques accusant le gouvernement de s’ingérer dans leurs affaires internes. Des difficultés qui sont cependant antérieures à l’arrivée d’Abiy Ahmed au pouvoir. En 2012 déjà, des milliers de musulmans avaient manifesté à la grande mosquée Anwar d’Addis-Abeba, la capitale, pour dénoncer la répression policière prétendument exercée sur leur communauté.
Abiy Ahmed est un chrétien protestant, de père musulman et de mère chrétienne orthodoxe. (cath.ch/ibc/ag/rz)
Ibrahima Cisse
Portail catholique suisse
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