Le Père Hubert Niclasse est un chasseur comblé. Joint par téléphone à fin septembre, il rentrait d’Alsace, de la région du Florival, au pied des Ballons. La chasse reste sa passion: «J’y trouve une ambiance. On se retrouve entre copains, qui sont tous d’origines diverses. Et là, les rangs sociaux disparaissent, confie l’ancien official du diocèse LGF. Surtout le soir autour d’un feu ou d’un repas».
Alors, fanatique de la chasse, Père Hubert? «La chasse, c’est d’abord un état d’esprit, dit-il. Il n’y pas, en premier, l’acte de tuer un animal. Car que dire de la communion avec la nature… On observe les animaux, on les suit, on les connaît. A l’affût, il y a tant de belles choses à voir. Et on ne tire pas à chaque fois…».
Chasseur depuis son plus jeune âge, Hubert Niclasse, Gruérien d’origine, défend «l’état d’esprit» qui prévaut parmi les porteurs de fusil. Une passion «qui vient du fond des âges», dit-il. «Sans doute que les pulsions violentes que l’on a comme jeune peuvent s’exprimer à travers la chasse. Mais, comme beaucoup de mes confrères chasseurs, je me suis assagi avec l’âge. Et je vis maintenant un profond respect pour les animaux, la nature».
Pourtant, la chasse fait appel à l’instinct. «Psychologiquement, elle fait partie de notre héritage, estime le religieux. L’homme primitif était chasseur et cueilleur. Mais il chassait aussi pour se défendre, ne l’oublions pas». Pour le chasseur Niclasse, la chasse est fondamentalement en lien avec la civilisation rurale. «C’est une tradition, comme celle de l’agriculture ou de l’exploitation des forêts».
Et il en vante les avantages: «Dans cette civilisation, il n’y a pas de barrières sociales, tout le monde est considéré. Or ce monde-là disparaît, déplore Hubert Niclasse. Le monde citadin qui se cache derrière ses thuyas ne supporte plus les cloches des vaches. Il vit en ignorant ses voisins et il croit vivre en liberté…»
Les fédérations de chasseurs voient leurs rangs s’éclaircir. Ce qui ne manque pas d’inquiéter les forestiers et les paysans. «On ne veut pas trop d’animaux en forêt ou trop de sangliers qui viennent causer des dégâts aux cultures». Un espoir toutefois: «Les dames sont de plus en plus nombreuses parmi nous, indique le dominicain chasseur. Et elles sont efficaces!».
Saint Hubert, patron des chasseurs… C’est aussi l’occasion de messes sonnées à la trompe. «J’aime ces messes, confie le Père Niclasse, surtout quand elles sont accompagnées de la bénédiction des chiens. La messe n’est pas chantée mais sonnée à la trompe de chasse. Et des pièces sont écrites spécialement pour cela avec Kyrie, Gloria et tout». Confidences d’un religieux chasseur ou d’un chasseur religieux. (cath.ch/bl)
Une légende et un but
Hubert (656 ou 658 – 727) est le fils du duc d’Aquitaine. Jeune, il se distingue par «les folles joies de la vie mondaine», rapportent les chroniqueurs. Mais, vers 705, il vit une conversion extraordinaire, liée à un épisode de chasse. Pourchassant un cerf dans une forêt d’Ardennes, il se retrouve face à l’animal. Une bête extraordinaire, blanche, avec une croix lumineuse au milieu de ses bois.
Une voix céleste interpelle le chasseur: «Hubert! Jusqu’à quand poursuivras-tu les bêtes dans les forêts? Jusqu’à quand cette vaine passion te fera-t-elle oublier le salut de ton âme?». Hubert, humblement, se jette à terre et suit la voix du Seigneur qui l’envoie auprès de saint Lambert, évêque de Maastricht. Il va alors s’engager dans une vie monastique exemplaire. A la mort de Lambert, il transférera ses reliques à Liège, devenant le premier évêque de la ville.
La mémoire d’Hubert en a donc fait le patron des chasseurs. Mais, pour le Père Niclasse, cette belle légende «a été réactivée au 15e siècle». Dans un but précis: «On a ressuscité saint Hubert pour que le clergé, qui chassait, n’oublie pas le service divin».
Bernard Litzler
Portail catholique suisse
https://www.cath.ch/newsf/hubert-patron-de-la-chasse-et-du-pere-niclasse/