Nancy Goethals, Hebdomadaire Dimanche (Bruxelles)
Le label ›Eglise verte’ fête ses deux ans, avec un certain succès. Son but est d’accompagner les communautés chrétiennes pour agir en écho à Laudato Si’. «Les gens veulent des idées concrètes. C’est ce qui nous a poussés à trouver un outil concret facilement utilisable», explique Elena Lasida, coordinatrice du projet ›Ecologie et société’ lancé en 2015 dans la foulée de Laudato Si’ et de la 21e conférence pour le climat à Paris (COP21).
Elena Lasida, en quoi consiste le projet ›Eglise verte’?
Il s’agit d’une labellisation de tout ce qui touche à la gestion des églises, salles paroissiales, communautés, séminaires… pour qu’elles répondent mieux aux enjeux écologiques. Le projet est œcuménique car y participent les catholiques, les protestants et les orthodoxes.
Aujourd’hui en France, 312 organisations – paroisses, groupes communautaires, écoles… – sont labellisées. La croissance a été beaucoup plus rapide que prévu. On reçoit en permanence des appels de paroisses qui demandent comment faire. Il éveille aussi l’intérêt d’autres pays, Pays-Bas, Espagne, Portugal, etc., mais aussi d’autres confessions religieuses (les musulmans de France, par exemple).
Comment avez-vous débuté?
On a rassemblé différents mouvements intéressés par la question écologique. Et on a organisé des événements pour la COP 21. Quand elle s’est terminée, on s’est demandé quoi faire. Nous nous sommes inspirés d’une initiative anglaise, Ecochurch, née avant la publication de Laudato Si’. Il a fallu l’adapter. Puis on s’est dit qu’il fallait créer notre propre outil. L’aile française de cette association nous a aidés à mettre en place le projet ›Eglise Verte’.
Quels sont les projets mis en place?
Il y a des pratiques très différentes. Sur un petit terrain, une paroisse fait du compost communautaire dont chacun peut bénéficier. C’est une petite initiative qui a créé du lien dans la communauté avec l’idée que tout le monde contribue au compost et tout le monde peut s’en servir. D’autres placent des ruches. Il y a aussi beaucoup de choses faites au niveau des célébrations et des rencontres paroissiales.
On a une lettre d’info bimensuelle, qui permet de s’inspirer mutuellement des pratiques. Le plus intéressant n’est pas de prendre les choses toutes faites. La question est de savoir comment créer une ou des initiatives adaptées à sa réalité. Par exemple, il y a un séminaire à Tours qui a demandé la labellisation. Les séminaristes ont créé un jardin potager et témoignent à quel point ce travail ensemble dans le jardin a tissé des liens. Il y a donc des effets collatéraux très bénéfiques à la réalisation de l’écologie intégrale!
Et dans les diocèses?
On a mis en place dans chaque diocèse un référent diocésain à l’écologie intégrale. Leur activité n’est pas uniquement la labellisation, mais on se sert beaucoup d’eux. Par exemple, ils peuvent faire une conférence de sensibilisation. L’idée est de créer un réseau et d’utiliser les ressources locales. Nous ne voulons pas ouvrir la porte à une instrumentalisation du label à des fins commerciales. Par exemple, des entreprises ayant une identité chrétienne ont demandé à être labellisées. Grand débat entre nous, car nous avons peur du green washing [ou écoblanchiment, procédé de marketing d’une organisation qui «s’habille de vert» pour se donner une image écologique trompeuse, n.d.l.r.]. Cela nous renvoie à des questions énormes.
Comment le label peut-il se financer?
Il a fallu clarifier: le label n’est pas payant! Mais pour fonctionner et le développer nous avons besoin de financement. Nous demandons donc à chacun de participer, selon ses capacités. Au départ, le projet de labellisation est financé par les trois Eglises catholique, orthodoxe et protestante. Mais l’idée est qu’il puisse progressivement s’autofinancer. Toujours est-il que la recherche de financement reste un défi permanent.
Par ailleurs le support des groupes qui veulent se lancer dans la labellisation est essentiel. Deux personnes ont été engagées et se consacrent majoritairement à répondre aux appels. Des appels pour des renseignements, des demandes de conférences ou d’accompagnement dans les démarches, qui sont en augmentation. Ce qui a conduit à créer deux autres emplois.
Quels conseils pour ceux qui voudraient se lancer?
La clé du succès, c’est le travail collectif. Il faut rassembler un noyau de personnes prêtes à évoluer en permanence et à se remettre en question. Quand il y a un accord avec le groupe de base, aller voir les autorités pour demander un soutien, entre autres financier.
Votre projet inspire dans d’autres pays. Quel soutien peut apporter le Vatican?
Le Vatican a fait beaucoup, avec Laudato Si’. Il souhaite maintenant que chaque Eglise développe localement les outils les plus adaptés. Cela valorise et légitime le travail des Eglises locales et cela donne des idées aux autres.
Le rôle du Vatican est avant tout d’entendre et de faire écho, mais surtout ne pas imposer. Il peut consolider, reconnaître, donner à connaître et il faut qu’il renforce la créativité locale. Laudato Si’ a attiré l’attention de l’Eglise et de ses composantes qui ont compris que ce problème les touchait aussi, au cœur de leur foi. (cath.ch/dimanche/bl)
Ecologiques et créatrices de liens
Depuis deux ans, le procédé de labellisation propose différents niveaux d’engagement avec des fiches de renseignements associées. Sont pris en compte différents secteurs: célébration et catéchèse, bâtiments, terrain, engagements local et global, mode de vie et outils de communication.
Les actions: du compostage communautaire aux célébrations et fêtes plus durables en passant par des formations, conférences, animations, sensibilisations visant à réduire l’empreinte écologique dans les églises et communautés… Et toutes ces activités sont créatrices de liens.
Informations sur les projets et le fonctionnement: site ›Eglise verte’ www.egliseverte.org
En Suisse: Oeco – Eglise et environnement depuis 1986
En Suisse, plus de 600 paroisses, organisations liées à l’Eglise et un grand nombre de personnes sont membres de l’association œco Eglise et environnement, créée en 1986. œco est reconnue en qualité d’organe de consultation pour les questions écologiques par la Conférence des évêques suisses (CES) et la Fédération des Eglises Protestantes de Suisse (FEPS). Cette association œcuménique est placée sous la conduite d’un comité bénévole et dispose d’un secrétariat à Berne.
L’association a notamment publié Paroisses vertes, un guide écologique à l’attention des églises est toute une série de conseils pratiques et de mesures applicables dans une paroisse: consommation d’énergie, chauffage, utilisation et évacuation de l’eau, gestion des déchets, entretien des espaces verts, respect de la faune. Cet ouvrage de 144 pages est ponctué d’exemples de bonnes pratiques et de renvois sur des sites d’informations, le tout agrémenté par des dessins de Mix et Remix. Oeco –eglise et environnement publie aussi une série de fiches pratiques pour les paroisses.
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