La réforme de la Curie romaine face au manque d'argent

Par CIC, traduction et adaptation: Raphaël Zbinden

Les responsables des différentes autorités vaticanes se réunissent le 20 septembre 2019 pour discuter des options économiques. Face à une situation financière considérée comme «tendue», les dicastères pourraient être appelés à se serrer la ceinture.

La rencontre du 20 septembre est une réunion dans le cadre des activités du Conseil pour l’économie, a annoncé le 18 septembre le Bureau de presse du Vatican, sans plus de détails.

Selon les observateurs, les responsables de la Curie pourraient être astreints à un régime minceur. Car la situation financière de la direction centrale de l’Église catholique est considérée comme tendue. Curieusement, le Vatican n’a plus publié de rapport budgétaire ces dernières années.

Le Conseil pour l’économie, créé en 2014, a une fonction de supervision des affaires budgétaires de la Curie romaine. Le Secrétariat économique, qui lui est subordonné, est responsable des activités opérationnelles de contrôle. Or son poste de direction est vacant depuis un certain temps.

Une situation financière peu claire

Cette réunion du Conseil est la 31e de la sorte convoquée par le pape François. Il avait créé la structure immédiatement après son élection au printemps 2013. Elle ne compte plus, à présent, que six cardinaux et deux secrétaires. L’accent de la rencontre sera mis sur les retours informatifs concernant les nouvelles règles de la Curie. En avril 2019, le projet de nouvelle Constitution Praedicate evangelium (Proclamer l’Evangile) a été envoyé aux Conférences épiscopales, aux responsables de congrégations religieuses, aux responsables de la Curie et aux autres experts compétents.

Les conseillers pontificaux parleront sans doute aussi d’un autre problème non négligeable pour la réforme: le manque d’argent. Le cardinal allemand Reinhard Marx, en tant que président du Conseil pour l’économie, a donc convoqué cette semaine les responsables de la Curie, comme le pape François le lui avait demandé, affirme le quotidien américain Wall Street Journal.

Lors de la réunion, Mgr Marx pourrait une fois de plus imposer aux chefs de dicastères des mesures d’économie. Première difficulté, le Vatican lui-même ne connaît pas exactement le montant de ses revenus, de ses avoirs et de ses dépenses. Depuis que le bureau de presse du Vatican a présenté, pour la dernière fois au printemps 2017, un rapport financier – les chiffres clés pour le budget 2015 -, la situation financière du Vatican est encore moins claire qu’auparavant.

Mgr Pell pas remplacé

Les finances du Saint-Siège (l’autorité dirigeante de l’Église universelle) seraient plutôt dans le rouge, et celles du mini-Etat du Vatican dans le noir. Concrètement: en 2015, le Saint-Siège a fait état d’une perte de 12,4 millions d’euros, tandis que l’État du Vatican a annoncé près de 60 millions de bénéfice. Même si les chiffres exacts n’ont pas été inclus dans les aperçus financiers, ils ont donné quelques indices.

Cette situation était censée s’améliorer avec la réforme de la Curie. Mais les autorités financières du Vatican sont depuis longtemps en manque d’effectifs. Depuis le départ du cardinal George Pell en juillet 2017, le Secrétariat à l’économie, conçu comme un département clé pour les finances, s’est retrouvé sans chef. Bien que le pape François ait renforcé le poste de vérificateur général en janvier 2019, il n’a pas remplacé le prélat australien emprisonné dans son pays pour des accusations d’abus sexuels sur mineurs. L’énergique cardinal Pell avait essayé d’obtenir un panorama complet de la situation financière de toutes les autorités, mais il s’était heurté à des murs et s’était attiré de nombreux adversaires.

Les Musées à la rescousse

La réforme de l’Institut des œuvres de religion (IOR), la ‘banque du Vatican’, et l’Autorité de surveillance financière (AIF), entamée par Benoît XVI, s’est relativement bien déroulée. Ce dernier organe est dirigé par le Fribourgeois René Brülhart. L’AIF n’est chargée que de surveiller la légalité des transactions. Mais si l’IOR a supprimé un certain nombre de comptes douteux et a révisé sa politique d’investissement selon des normes éthiques, il a transféré depuis un certain temps beaucoup moins de profits au Saint-Siège. Son apport a diminué de 69,3 millions d’euros en 2014, à 31,9 millions en 2017, avant de retomber à 17,5 millions en 2018.

Les recettes financières sont un problème crucial pour le Vatican. Il ne perçoit pas d’impôts, mais vit des dons et des droits d’entrée sur son territoire. Les Musées du Vatican perçoivent à eux seuls chaque année des dizaines de millions d’euros. Certains demandent d’ailleurs si la contribution des Musées ne leur serait pas excessive et nuisible. Une situation qui a poussé la branche américaine de l’association de mécénat «Patrons of the Arts in the Vatican Museum» à réduire ses subventions.

Mauvaise gestion?

Dans le cas du Saint-Siège, les dons proviennent principalement de la quête annuelle mondiale pour le pape, le «denier de saint Pierre», ainsi que de versements volontaires de diocèses de certains pays, comme les Etats-Unis, l’Allemagne, l’Italie ou la Pologne. En raison du scandale des abus, les dons en provenance des États-Unis ont considérablement baissé.

Des critiques s’élèvent en outre contre l’utilisation des dons. Certains ont par exemple servi à combler des déficits dans les comptes d’hôpitaux appartenant à l’Eglise. Des reproches sont également apparus quant à des locations de biens immobiliers de haut standing bien en-dessous de leur valeur.

Afin de réduire les coûts de personnel, des postes vacants n’ont pas été repourvus depuis 2017 et les contrats de travail ont été limités à dix ans pour éviter les demandes de pension. Cela a eu un certain effet, mais n’a pas été suffisant pour redresser les comptes. Certaines autorités s’opposent constamment à ce que des consultants externes examinent les processus de travail et les structures de dépenses. (cath.ch/cic/rz)

Raphaël Zbinden

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