Bernard Litzler: «Le Christ est un chemin de bonheur pour l'homme»

Bernard Litzler, directeur du Centre catholique des médias Cath-Info, sera ordonné diacre permanent pour le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg, le 8 septembre 2019, à la basilique Notre Dame de Lausanne. Il revient avec cath.ch sur le sens et l’orientation de cet engagement.

Rappelez-nous le rôle et la place d’un diacre permanent.
Le diacre permanent est ordonné par l’évêque. Ce ministère de service existe depuis les débuts de l’Eglise. Au fil du temps, le diaconat était devenu une simple étape vers la prêtrise. A l’époque contemporaine, le Concile Vatican II l’a remis en oeuvre en tant que ministère permanent. Et depuis lors, l’Eglise a ordonné de nombreux diacres permanents dont la plupart sont mariés.

Leur ministère est centré en premier lieu sur la notion de service aux plus pauvres et aux démunis. Le diacre est aussi l’homme des sacramentaux. Il ne célèbre pas l’eucharistie, mais il peut prêcher, donner le baptême, célébrer les mariages, présider des funérailles, prononcer des bénédictions. Certains parlent de «ministère du seuil», c’est-à-dire que le diacre est entre l’autel et l’assemblée. On le remarque lors de la messe où le diacre invite au geste de paix et prononce l’envoi final. Il est aussi le seuil entre ceux qui sont dans l’Eglise et ceux qui sont au dehors.

Les engagements du diacre permanent peuvent être très divers.
Une partie des diacres sont engagés en pastorale, comme animateurs, catéchistes, aumôniers ou parfois responsables de paroisse. C’est surtout le cas en Suisse allemande. En Suisse romande, les diacres conservent généralement leur activité professionnelle dans les domaines les plus divers. On peut presque dire qu’il y a autant d’insertions qu’il y a de diacres.

Comment avez-vous cheminé vers cet engagement?
J’ai ressenti un appel à l’été 2015 à m’engager vers le diaconat. Je suis un homme qui a été toujours guidé par ses intuitions. Ce sont des appels intérieurs que j’ai suivis. Je songeais au diaconat depuis un certain temps, mais l’appel s’est fait plus clair à ce moment-là.

Il y a ensuite tout un cheminement d’abord une année de discernement avec une demande à l’évêque et un accompagnement spirituel. Puis viennent trois ans de formation marqués par de nouvelles étapes: le lectorat-acolytat puis l’admissio. La dernière année, nous sommes suivis par un groupe d’accompagnement. Le parcours est bien balisé. Au plan de la formation, la première année se penche sur la théologie fondamentale, la deuxième sur la théologie biblique et la troisième sur la morale et la liturgie. Chaque année nous vivons une retraite spirituelle.

Je découvre de plus en plus que le Christ est un chemin de bonheur pour l’homme. J’ai envie de le vivre et de le proclamer.

Vous êtes marié. Quel est le rôle de la femme du diacre?
L’épouse est très impliquée dans le cheminement diaconal. Elle est invitée à toutes les rencontres de formation. Il y a aussi des rencontres spécifiques uniquement pour les épouses. Lors de l’ordination, l’épouse est invitée à donner son accord avec une assez belle formule: «Acceptez-vous tout ce que le diaconat apportera de nouveauté dans votre couple?» Cela a intensifié le dialogue entre nous.

Le sacrement de l’ordre n’efface pas celui du mariage, mais lui donne une orientation différente. Nous n’avons pas d’enfants, mais certains candidats ont dû renoncer pour des questions familiales qui restent prioritaires. La mission du diacre est aussi portée par son épouse.

Aujourd’hui la question du diaconat féminin se pose avec toujours plus d’insistance.
Fondamentalement, je pense que les femmes pourraient être diacres, mais je préfère ne pas mélanger les choses. Je ne dirais pas ‘ma femme est autant diacre que moi’. La grâce diaconale bénéficie au couple, mais elle est donnée au mari. Je pense que pour donner aux femmes plus de responsabilités dans l’Eglise, le diaconat féminin est certainement une des pistes à suivre.

En devenant diacre, vous devenez membre du clergé et vous devez obéissance à l’évêque. N’y a-t-il pas là une tension avec le principe de l’indépendance journalistique?
Je ne pense pas que cela apportera de changement dans ma pratique professionnelle. En tant que Centre catholique des médias, nous ne recevons pas d’ordres de l’évêque. Ce que nous n’accepterions pas. Même si je suis diacre, l’obéissance n’est pas servile. Et notre charte rédactionnelle protège l’indépendance des journalistes. Dans mon rôle de directeur de Cath-Info, je ne suis pas un agent pastoral. Nous rendons compte de la vie de l’Eglise, mais nous ne sommes pas ses agents de communication. Ou alors c’est une communication différente.

Cela dit, si nous voulons être honnêtes, nous devons aussi montrer que l’Eglise peut être un milieu d’épanouissement au-delà des nombreux problèmes que nous ne connaissons que trop bien. Personnellement, je vis avec bonheur l’évolution de l’Eglise après Vatican II. Une Eglise plus ouverte, plus centrée sur la personne, moins orientée sur la peur. J’espère que la célébration de l’ordination diaconale le montrera.

Comment les gens ont-ils réagi à l’annonce de votre ordination?
J’ai été étonné, car ils ont été heureux, voire admiratifs. Je ne le recherchais pas, mais constater que des personnes continuent à s’engager dans l’Eglise est un encouragement. Moi-même, je me sens épaulé par ce soutien.

Comme vous l’avez indiqué, ce ministère de diacre permanent est relativement nouveau. Qu’aimeriez-vous y apporter?
Un des aspects qui me semble important est de favoriser les liens et la fraternité entre les diacres. Le diacre court le risque de se trouver un peu seul dans son ministère et peu inséré dans la vie de l’Eglise. Ayant été appelé, j’aimerais aussi être un appelant. (cath.ch/mp)

Maurice Page

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