Dans une interview à l’hebdomadaire catholique allemand Tagespost et à Thomas Binotto, pour le bulletin Forum de l’Eglise du canton de Zurich, Mgr Bürcher revient sur ses premiers mois à l’évêché de Coire.
«Je ne suis pas impliqué dans la recherche d’un nouvel évêque»
«Je ne suis pas impliqué dans la recherche d’un nouvel évêque. C’est l’affaire du nonce apostolique en Suisse, du Saint-Siège et du Chapitre de la cathédrale de Coire», souligne d’emblée l’ancien évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg. «Mais ce que je sais, c’est que le pape François m’a dit que je n’aurais à présider le diocèse de Coire que pour quelques mois comme administrateur apostolique. Je ne fais donc pas de pronostics concrets.» Mgr Bürcher, qui fut aussi évêque de Reykjavik, en Islande de 2007 à 2015, répète aussi avoir été surpris «comme Mgr Vitus Huonder» par la décision du pape. «Nous avons eu peu de temps devant nous! Tout s’est passé très vite!»
Pour son administrateur apostolique, le plus grand défi pour Coire est celui de chaque diocèse: «rester une partie de l’Église universelle malgré toute sa diversité. Maintenir l’unité non seulement localement, mais aussi avec le reste de l’Église universelle. Cela ne va qu’avec l’unité dans la foi au-delà des particularités culturelles et régionales. La conscience d’être au service du Seigneur et de ses semblables avec toute l’Église catholique est incontournable. «Zurich appartient au diocèse de Coire, le diocèse de Coire appartient à l’Eglise catholique et c’est le peuple de Dieu ! Un catholique n’est pas un satellite : il est un membre vivant du corps du Christ, de l’Église.»
Au cours des dernières années, depuis sa démission comme évêque de Reykjavik en 2015, Pierre Bürcher a passé la moitié de l’année en Suisse et les autres mois en Terre Sainte. Il n’avait donc pas suivi de près la situation dans le diocèse de Coire. «Mais de loin, j’ai parfois pensé qu’il n’était certainement pas facile d’être évêque d’un grand diocèse comme Coire avec tant d’attentes, parfois contraires. Attentes entre les intérêts des corporations ecclésiastiques dans les diverses régions et au sein de la base des croyants allant d’idées très traditionnelles aux plus progressistes.»
Interrogé sur le système dual de l’Eglise suisse, où les structures ecclésiales sont doublées de structures de droit civil, Mgr Bürcher répond succinctement que «selon le «Vademecum» de la Conférence des évêques suisses, le système dual a besoin de certaines réformes.» Il estime personnellement que toutes les façons régionales ou culturelles d’organiser localement l’Eglise ou d’œuvrer dans la société sont bonnes pour autant qu’elles servent l’unité dans la foi.
«La diversité, c’est aussi la richesse»
Pour l’administrateur apostolique de Coire, l’Eglise en Suisse a fondamentalement besoin de plus d’aspiration vers Dieu. «Un grand défi est le passage d’une Eglise sociologique (Volkskirche) à une Eglise que l’on choisit (Entscheidungskirche), parce que le courant social dominant s’oppose de plus en plus à la doctrine de l’Eglise. Nous devons aussi apprendre à expliquer la foi aujourd’hui de manière à ce que les personnes qui ne sont pas socialisées dans l’Eglise puissent la comprendre à nouveau. Qu’est-ce qu’un sacrement, que signifie la résurrection, pourquoi l’Eglise? Trouver un nouveau langage pour les éléments essentiels de la foi, mais sans diluer la substance ou la sacrifier au courant dominant.»
Cela exige non seulement des réformes structurelles de l’Eglise, mais surtout et encore une formation de foi de qualité pour les enfants et les jeunes, ainsi que des lieux de formation continue pour les adultes. Cela commence aussi par une formation actualisée des prêtres et des agents pastoraux.
Depuis son arrivée à Coire, Mgr Bürcher a pris le temps de rencontrer les diverses instances et les divers ‘partis’. »Sans parler de partis, j’ai dit : " Nous sommes tous membres de l’Église, d’abord par notre baptême, puis par nos divers ministères et services. […] Il est clair pour moi que l’évêque doit être là pour tous. […] J’ai déjà eu des conversations avec de nombreuses personnes dans les sept cantons du diocèse. J’ai aussi fait la même expérience avec de nombreux organismes et institutions du diocèse, comme notre séminaire, notre faculté théologique, plusieurs de nos chanoines, notre conseil épiscopal, notre conseil d’administration diocésain, avec certains de nos doyens, avec les responsables de la catéchèse et de la pastorale des jeunes, dans les hôpitaux et dans les foyers pour personnes âgées, ainsi qu’avec beaucoup d’autres catholiques de base. […] La diversité, c’est aussi la richesse!, insiste l’évêque. Je me suis rendu dans toutes les régions du diocèse. Quelle beauté et quelle diversité entre Lungern et Müstair, Kloten et San Vittore.»
Concrètement Mgr Bürcher explique n’avoir reçu aucune directive formelle du pape. «La chose la plus importante est une bonne période de transition pacifique. J’ai rencontré une équipe bien rodée et je suis heureux que nous ayons pu poursuivre nos activités quotidiennes plus ou moins en douceur.» L’administrateur apostolique souligne aussi vouloir prendre le moins possible de décisions qui engageraient le futur évêque de Coire. C’est ainsi qu’il a maintenu en place les vicaires généraux et l’équipe de l’ordinariat de Coire. " Pour un mandat si court, je ne voulais pas tout changer.»
Libéré de sa tâche d’administrateur apostolique, Mgr Bürcher n’aspire qu’à une chose: reprendre sa vie de ces trois dernières années: un semestre en Suisse et l’autre en Terre Sainte. (cath.ch/mp)
Maurice Page
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